Classement UCI : Vers une fin de saison explosive ?

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

En septembre dernier, l’UCI profitait des Championnats du Monde d’Innsbruck pour officialiser la mise en place d’une réforme du cyclisme professionnel. Parmi les nouveautés, un classement par équipes regroupant les formations des trois premières divisions mondiales et permettant - en fin de saison - aux deux meilleures structures de deuxième division d’être automatiquement invitées pour les trois Grands Tours lors de la saison suivante. Pour toutes les autres épreuves du WorldTour, ce sont mêmes les trois meilleures Continental Pro qui auront le droit d’y participer sans dépendre du bon vouloir des organisateurs (lire ici).
Mais alors, qu’en pensent les principaux intéressés ? Les formations de deuxième division mondiale ont-elles adapté leur effectif et leur calendrier 2019 en conséquence de cette réforme ? Comptent-elles mener une véritable “chasse aux points” tout au long de la saison ? Y’a-t-il un risque de voir des équipes se marquer en fin de saison ? Certains organisateurs peuvent-ils profiter - ou au contraire payer - ce nouveau système en terme de qualité de plateau ? Les équipes comptent-elles désigner des coureurs pour marquer un maximum de points, puisqu’à la fin de l’année, seuls les points des dix meilleurs « scoreurs » de chaque groupe sportif seront comptabilisés ? Le barème semble-t-il logique et cohérent ?
DirectVelo a pris le pouls du peloton, du côté des formations Arkéa-Samsic, Cofidis, Delko Marseille Provence, Direct Energie, Israël Cycling Academy, Vital Concept-B&B Hôtels et Wanty-Gobert.

LES ÉQUIPES VONT-ELLES SE ROULER DESSUS ?

Et si le classement par équipes UCI se jouait à quelques points près ? Si les dernières courses du calendrier servaient de juge de paix pour désigner les deux invitations d'office pour les Grands Tours 2020 ? C’est une éventualité qui n’est pas à exclure, et Roger Tréhin en a bien conscience. Quitte à voir des drôles de scénarios de course en fin de saison. On n'est pas à l'abri de voir des équipes se courir dessus, c'est clair. Indépendamment de notre volonté, il faudra peut-être le faire... C'est sans doute le revers de la médaille de ce classement”, considère le directeur sportif d’Arkéa-Samsic. Voir une équipe rouler sur une autre dans une course de fin de saison, Christian Guiberteau a, pour sa part, du mal à l’imaginer. Il y a peu de chance que ça arrive, à moins que ce soit très serré en fin de saison. Il y a plein de cas de figure possibles, en fait. Si vraiment ça se joue à quelques points près, alors oui, bien sûr, il y aura la possibilité de courir pour faire perdre l’autre. Mais franchement, ce serait quand même un drôle de scénario”.

Chez Israël Cycling Academy, on ne songe pas encore à cette hypothétique bataille entre plusieurs formations. En revanche, Lionel Marie promet que tous ses coureurs sont prêts à lutter jusqu’à la dernière course de la saison pour arracher l’une des tant convoitées deux premières places du classement synonymes de sésame. “Nos coureurs connaissent les règles et ils sont prêts à faire des sacrifices. On aura une discussion avec l’ensemble du groupe plus tard dans la saison, c’est évident. Je ne doute pas une seconde que tout le monde adhère au projet. Si on veut profiter de cette nouvelle réglementation, on doit mettre toutes les chances de notre côté”. Ce classement UCI est donc clairement une priorité absolue pour la structure israélienne. “On espère faire le Tour de France 2020 et on sait par quoi ça passe… Les règles sont claires. Je trouve cette nouvelle règle intéressante. Au moins, on se bat pour quelque chose toute l’année, et on sait pourquoi on le fait”.

INVITATIONS : LE SPORTIF PLUTÔT QUE L'ÉCONOMIQUE ?

Justement, outre les problèmes de barème (lire ici) ou la question des scoreurs (lire ici) qui se sont posées précédemment,  apprécie-t-on cette réforme au sein des différentes équipes ? “Qui vivra verra. On ne peut pas le dire pour l'instant. Il faut voir ce que ça va générer à l'avenir”, répond Frédéric Rostaing, le manager de Delko Marseille Provence. “C'est un peu comme lorsque le WorldTour s'est créé. Pour rentrer dans les 18 meilleures équipes, on avait déjà assisté à cette chasse aux points. Il y avait eu du n'importe quoi sur les premières années, puis ça s'était stabilisé. Il faut attendre de voir”.

Christian Guiberteau y voit déjà une certaine logique, en pensant aux prochaines invitations pour les plus grosses courses du calendrier. “Disons que ça permet d’avoir un axe sportif toute l’année. Parfois, on ne comprend pas certaines invitations d’équipes sur des courses WorldTour… Il y avait d’autres enjeux que le sportif, c’est évident. Là, au moins, les meilleurs seront au Giro, au Tour ou à la Vuelta. C’est bien”. Comme le directeur sportif de la Cofidis, Lylian Lebreton (Total Direct Energie) est lui aussi satisfait pour les mêmes raisons. “La règle a le mérite d’exister car avant, c’était complètement flou pour les invitations. Personne ne savait véritablement ce qu’il fallait faire pour être invité”.

COFIDIS EN PÔLE POUR LE TRÔNE ?

Mais au fait, quelles sont donc les formations les mieux placées remporter ce classement UCI des Conti Pro ? L'an dernier, Wanty-Groupe Gobert avait remporté le classement de l'Europe Tour devant Cofidis. Au dernier classement UCI, l'équipe française devance les Belges et Total Direct Energie.

Jean-Marc Rossignon (Wanty-Gobert) a une idée bien précise en tête du lauréat de cette année.
“Cofidis est favori. Ils sont bâtis comme une équipe WorldTour, pratiquement. Direct Energie est également un candidat sérieux, comme Arkéa-Samsic. Attention à des équipes dont on parle moins comme Roompot ou Corendon-Circus. Ils ont des projets cohérents et des groupes solides. Il y aura de la bagarre toute l’année, mais aussi dans les saisons futures”, prévient-il. Jérôme Pineau voit également la Cofidis l’emporter. Mais regrette en même temps un certain manque d’équité. “Plus de la moitié des courses se déroulent sur un territoire : le Bénélux. Une équipe comme la Cofidis est plus souvent présente sur ces courses, parce que plus près. Ca leur coûte moins d’argent, donc ils font plus de courses. Et si tu fais plus de courses, tu marques plus de points. C'est idéal pour eux. Cela dit, ils n’ont pas besoin de ça. C'est une équipe solide, quasi WorldTour, et ils mériteraient de finir devant”.

Qu’en pense-t-on chez les premiers intéressés ? C’est vrai que depuis trois-quatre ans, l’équipe Cofidis est toujours là, présente, mais on n’est pas à l’abri d’une saison un peu moins bonne”, modère Christian Guiberteau. “L’an dernier, on a gagné 21 fois. On espère faire aussi bien. Logiquement, si on fait la même saison qu’en 2018, on devrait être dans les clous. Mais il y a toujours une part d’incertitude”.


Mots-clés

En savoir plus