Andrés Ardila, l'Aigle du Cerro Gordo

Crédit photo James Odvart - DirectVelo

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Alors qu'Egan Bernal remportait le Tour de Suisse, un de ses compatriotes se démarquait au Tour d'Italie Espoirs. Après Cayetano Sarmiento en 2009 et Carlos Betancur en 2010, Andrés Camilo Ardila a offert à la Colombie un troisième sacre sur cette épreuve. Fait historique, le podium final était entièrement jaune-bleu-rouge avec Einer Augusto Rubio et Juan Diego Alba.

Dans son pays, Andrés Camilo Ardila est surnommé el Aguila de Cerro Gordo, c'est à dire l'Aigle du Cerro Gordo (un sommet culminant à plus de 3000 mètres d'altitude). "En raison de son prodigieux talent de grimpeur, il ne pédale pas, il vole", commente le sélectionneur colombien Carlos Jaramillo. Pourtant, il est longtemps resté à l'écart dans de petites équipes avant d'être remarqué l'an dernier par la formation EPM.

SOUS LE CHARME D'UN VIEUX VÉLO EN RUINE

Ardila vient d'un milieu modeste, uni autour de la ferme familiale où l'on cultive avocats et canne à sucre. Gentil garçon, il a toujours aidé ses parents après l'école. "Un jour, vers 8-9 ans, je suis tombé sous le charme d'un vieux vélo en ruine chez mon oncle, mon père m'a promis qu'on le réparerait ensemble et qu'après il me l'offrirait", raconte-t-il.

C'est comme ça que son amour pour le vélo a commencé. Le jeune garçon suivait son père qui s'est toujours déplacé à bicyclette. Il aimait ça et, à 13 ans, il a participé à sa première compétition. "Il y avait une petite course dans mon village. Je m'y suis inscrit, j'ai obtenu de bons résultats, cela m'a plu. Alors, j'ai continué avec celles des patelins voisins. De petites courses en petites courses, j'ai finalement participé à trois championnats régionaux, deux Vueltas del Futuro (NDLR : la course nationale de référence chez les Cadets), deux Vueltas del Porvenir (NDLR : le Tour de Colombie Juniors). Et je suis passé chez les Espoirs", résume-t-il.

À 18 ANS, IL PRIVILÉGIE LE VÉLO AUX ÉTUDES

Jusqu'à ses débuts dans les moins de 23 ans, ses résultats ne cassent pas trois pattes à un canard. Il termine 44e de la Vuelta del Porvenir en 2017 mais 4e du Championnat Panaméricain de contre-la-montre. Le Colombien évolue alors dans de petites structures mais la municipalité de Mariquita dont il est originaire a appris son existence et l'a aidé : des collectes de fond ont été ouvertes pour gérer d'abord les épreuves régionales, puis nationales. Alejandro Galindo, le maire de Mariquita, a également joué un rôle important, puisqu'il a donné de l'argent, prêté sa propre voiture et sa camionnette pour qu'Andrés Camilo puisse continuer à courir. A 18 ans, il termine le lycée, obtenant l'équivalent du Bac, il doit choisir entre l'école ou le cyclisme. "Mon père m'a dit que je devais faire un choix car c'est impossible de faire les deux convenablement, j'ai opté pour le vélo".

C'est comme ça qu'en 2018, il entame sa première année Espoirs toujours dans une petite équipe, chez Tolima es Pasion. Il éclate à la Vuelta de la Juventud (Tour de Colombie Espoirs) en terminant cinquième du général. Cette prestation aurait dû lui ouvrir les portes de la sélection nationale pour disputer, déjà, le Tour d'Italie Espoirs. Cependant, une blessure au genou freine sa progression. Finalement, grâce à son entraineur de l'époque, Carlos Perez, Ardila va être engagé par Raúl Mesa, responsable de l'équipe Continental EPM (Empresas Públicas de Medellín). Faire partie d'une plus grande structure permet au jeune homme de progresser rapidement. A la Vuelta de la Juventud 2019, il fait encore mieux. Il enlève deux étapes et termine troisième du classement général.

UN LEADER QUI AIME VOIR LES AUTRES GAGNER

C'est donc en forme que le modeste Aigle de Colombie a débarqué au Giro Espoirs. Véritable altruiste, il a semblé encore plus satisfait lors de la victoire de son coéquiper Juan Diego Alba lors de l'étape d'Aprica marquée par une double ascension du Mortirolo. "Cela illustre sa personnalité", assure Carlos Jamarillo. "Andrés est très calme, très collaborateur, il aime que ses amis gagnent, il aide ses coéquipiers. Il a le potentiel d'un leader car il ne veut pas être victorieux tout seul, ça lui importe beaucoup de gagner ensemble. Il est aussi extraverti et a les pieds bien sur terre." Les pieds sur terre mais des ailes dans le dos. L'Aigle a épaté par ses qualités exceptionnelles de grimpeur. En effet, pendant ces dix jours, il s'envole dans la montagne. Il a remporté deux étapes et a contrôlé la course de bout en bout, sans jamais être en difficulté.

A présent, Andrés Camilo Ardila est rentré au pays. Tout d'abord, il veut passer du temps avec sa famille et analyser ce qu'il va faire, avant de revenir en Europe en août pour le Tour de l'Avenir. En tout cas, pour 2020, il a déjà l'embarras du choix. Quatre équipes (Astana, UAE-Team Emirates, Androni Giocatolli-Sidermec et Nippo-Vini Fantini) aimeraient l'engager la saison prochaine. "Bien sûr, le WorldTour, c'est un peu comme un rêve. J'ai travaillé pour ça. Mais je veux surtout donner du spectacle aux Colombiens et de la fierté à mes proches, c'est mon but premier", termine-t-il.

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Portrait de Andres Camilo ARDILA ORDONEZ
EPM