Pauline Ferrand-Prévot : « Je voulais avoir ma photo toute seule »

Crédit photo Thomas Maheux / A.S.O.
Il n'y avait pas besoin de river ses yeux sur les écrans télé, les oreilles suffisaient pour entendre Pauline Ferrand-Prévot défiler dans les rues de Roubaix, jusqu'à son entrée dans le vélodrome André-Petrieux. La foule a vibré tel un seul homme, et une seule femme, pour accompagner le défilé de la coureuse de Visma-Lease a Bike, durant un tour et demi. Le poing levé, déjà en train de savourer un succès qui ne pouvait plus lui échapper, les cris descendaient des tribunes sur son passage (voir classement). Pour son retour sur la route cette saison, Pauline Ferrand-Prévot a déjà tapé fort, alors qu'elle n'avait même pas mis l'Enfer du Nord à son calendrier initial. Et ce n'est pas une chute en cours de route qui l'a privée de ce succès mémorable. Et ce n'est pas non plus un virus ces derniers jours qui a entaché sa volonté de décrocher le fameux pavé, qu'elle va pouvoir poser à côté d'un autre pavé à la maison, celui de son compagnon Dylan van Baarle. En conférence de presse où DirectVelo était présent, la Rémoise est revenue sur ce succès mythique.
DirectVelo : Qu'est-ce que ça fait de gagner Paris-Roubaix ?
Pauline Ferrand-Prévot : C'est une bonne question (sourire). Je suis super contente. Je ne me sentais pas super bien les derniers jours. J'ai eu un accident aux Strade, et comme je n'ai pas totalement récupéré de l'accident, j'ai eu une infection et j'ai dû prendre des antibiotiques une fois, deux fois. J'ai arrêté les antibiotiques lundi, et je suis de nouveau tombée malade. J'ai arrêté l'entraînement hier parce que je me sentais très faible. Ce matin, je n'avais plus de fièvre donc on m'a dit qu'on allait juste essayer d'aider Marianne (Vos) pour qu'elle ait une meilleure chance de jouer. Pour être honnête, je n'étais pas vraiment sûre de ma condition ce matin. L'objectif était que Marianne puisse être la plus fraîche possible et jouer la gagne. C'est ce que j'ai fait en attaquant au bon moment. Je ne pensais pas vraiment à gagner la course.
À quel moment tu as pris conscience que la victoire te tendait les bras ?
Sincèrement, je n'ai pas du tout pensé à gagner. Je ne voulais pas me mettre dans la tête qu'il fallait que je gagne. J'ai essayé de les faire travailler au maximum. C'est assez marrant parce que juste quand je suis entrée dans le vélodrome, je me suis dit « qu'est-ce qu'il m'arrive, qu'est-ce que je dois faire ». C'était une sensation assez bizarre.
À quoi as-tu pensé pendant ce tour et demi de vélodrome, le point levé avec le public en fusion ?
Je me suis dit : « si je fais un tour et que je les croise, qu'est-ce que je dois faire ? Je dois me mettre derrière le groupe ou je dois les passer ? ». Parce que je voulais avoir ma photo toute seule (rires). Après je n'ai vu personne arriver. Je me suis dit que j'allais avoir une belle photo. C'est assez incroyable parce que je ne réalise vraiment pas du tout. J'ai hâte d'appeler mes parents et Dylan, de pouvoir profiter avec tout le monde.
« SI VOUS M'AVEZ VU L'ANNÉE DERNIÈRE AU CHAMPIONNAT DU MONDE... »
Tu n'avais pas vraiment prévu de participer cet hiver...
Non, ce n'était pas dans mon calendrier. Normalement, j'étais supposée être en altitude. Après les Strade et San Remo, j'ai discuté avec mon coach, et je lui ai demandé si je pouvais faire le Tour des Flandres. Il y a eu des discussions, et on m'a dit que je pouvais y aller. Une semaine plus tard, je leur ai demandé si je pouvais faire Roubaix. Ils ont réfléchi, et ils m'ont dit que je pouvais le faire. C'était une décision à la dernière minute. Mais c'est aussi ce que j'aime avec l'équipe, je m'entraîne un peu comme je le veux. Pour cette première année route, j'ai essayé de découvrir ce que je pouvais faire. Même si l'objectif principal est de gagner le Tour de France, les Flandres et Roubaix étaient un bon point de passage parce que les trois étapes du Tour en Bretagne seront très compliquées. J'ai voulu m'entraîner à me battre pour le positionnement. Et c'était le meilleur entrainement possible.
Quelle charge de travail représente ton retour sur route au haut niveau ?
Ce n'était pas facile. Si vous m'avez vu l'année dernière au Championnat du Monde sur route, vous pouvez constater que ce n'était pas facile. Il y avait beaucoup de travail à faire pendant l'hiver. Il fallait être patient, avoir confiance dans le processus. C'est un sport complètement différent. Il faut s'habituer à tout. C'était aussi un processus de construction. Maintenant, je me sens assez à l'aise. L'année dernière, je n'avais pas assez confiance pour attaquer. Mais aujourd'hui, je me suis dit que je devais essayer quelque chose. Chaque week-end, il faut aller plus haut.
« JE NE SAIS PAS SI JE REVIENDRAI »
Tu as quasiment tout gagné dans le vélo...
Pas tout ! Je veux vraiment gagner le Tour de France. C'est la prochaine grande course. C'est un grand but de ma carrière. Gagner les Jeux à la maison, c'était la plus belle victoire que j'ai eue. Maintenant, je m'amuse sur la route, et à travailler en équipe avec mes collègues. Tout ça, c'est génial. C'est drôle, car j'ai vraiment voulu tout gagner en VTT, et maintenant je gagne en équipe, je n'ai plus de pression. Je me sens très bien et très heureuse.
Comme Dylan van Baarle, tu as maintenant ton propre pavé...
On en a parlé hier ou il y a deux jours. On a fait une interview ensemble. Dans ma tête, ce n'était pas un grand but. Je suis super contente de l'avoir gagné, mais ce n'était pas un but. Mais je vais pouvoir le mettre à côté du sien. J'espère que les gars pourront faire de même et en ramener un autre pour Visma. Maintenant, je vais prendre l'avion avec ce pavé et payer 200 euros (rires).
Reviendras-tu ?
C'est une bonne question. C'est aussi à voir si ça va aller avec les préparations pour les années prochaines. Si on voit que je suis à la ramasse au Tour de France cet été, on va peut-être se dire qu'il ne faut pas faire ces Classiques-là et faire une préparation en altitude un peu plus longue. Je ne sais pas si je reviendrai. Peut-être, ou peut-être pas.
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