Ancienne infirmière, Chloé Charpentier est retournée à l'hôpital

Crédit photo DR

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Après une bonne saison 2019 (voir ici), Chloé Charpentier espérait répondre présente dès le début de ce cru 2020. Mais en pleine pandémie de coronavirus, la sociétaire du VC Morteau-Montbenoît s’est lancée un autre défi. Ancienne infirmière, la cycliste de 26 ans a choisi de retourner à l'hôpital pour soulager les équipes soignantes. “Je ne suis pas en recherche de reconnaissance”, dit-elle modestement à DirectVelo, pour qui elle revient sur cette période si particulière.

DirectVelo : Te voilà de retour à l’hôpital comme infirmière...
Chloé Charpentier : Une fois sortie de l’école d’infirmières, j’ai travaillé pendant deux ans à l'hôpital de Chalon-sur-Saône. J’ai été déçue car j’ai enchaîné des CDD d’un ou trois mois pendant deux ans… On ne m’a jamais proposé de CDI. Je voulais faire infirmière pour m’occuper des patients dans des bonnes conditions et le système ne nous permet pas toujours de le faire. J’ai été dégoutée par les conditions de travail. Alors je me suis réorientée en reprenant des études, il y a deux ans et demi, pour être prof d’EPS. Avec le coronavirus, la fac a été fermée, comme le lycée où je travaille en parallèle pour payer mes études. Je me suis retrouvée avec beaucoup de temps libre. Alors j’ai proposé mon aide à mon ancien hôpital. On m’a de suite dit oui. On m’a même demandé de commencer le lendemain… Mais comme je suis sur Besançon, j’ai demandé une journée pour redescendre à Chalon-sur-Saône. J’ai attaqué ce mercredi. 

Dans quel service travailles-tu ?
Je suis dans le service d’hémodialyse. C’est un service très technique, où il faut un mois de formation à une infirmière pour être opérationnelle. J’étais dans ce service quand je travaillais à l’hôpital. Le fait que je vienne a permis de libérer des infirmières de réanimation qui étaient alors en “dialyse”. Ça leur a permis de retourner en “réa” gonfler les effectifs. 

« ON S’ATTEND À VOIR UNE GROSSE VAGUE ARRIVER »

À quoi ressemblent tes journées ?
Je travaille douze heures par jour. Soit je commence à 6h30, soit à 7h20. Et donc le soir, je termine soit à 18h30, soit à 19h20. J’ai quand même des jours de repos. On n’en est pas au même stade de l’épidémie partout. À Chalon-sur-Saône, nous ne sommes pas encore complètement débordés… On est en pleine organisation car on s’attend à voir une grosse vague arriver.

Toi qui es cycliste, que te dis-tu lorsque tu vois que certains roulent encore sur la route ?
Quand j’ai appris que les courses étaient annulées et qu’il y avait le confinement, évidemment j’étais déçue. Je sortais d’une grosse préparation hivernale. Je m’étais investie tout l’hiver, j’étais en forme. J’attendais le début de saison avec impatience alors forcément, tu es déçue quand on te dit que tu vas être confinée. Mais on relativise vite, surtout quand on arrive à l'hôpital. Tu prends vite la mesure de la situation. Il y a bien plus grave que ne pas faire de vélo. Alors oui, certains continuent quand même à aller s’entrainer. Je peux comprendre qu’il est difficile d’accepter la situation pour les athlètes. Mais il me semble important de bien comprendre la situation dans laquelle on se trouve et de revoir ses priorités. Certains vont rouler ou vont marcher, et il y a aussi beaucoup d’accidents domestiques, de motoculteurs par exemple. Les gens cherchent à s’occuper, ce qui est compréhensible mais ils se mettent en danger sans trop s’en rendre compte. Ça demande des soins derrière, sauf que c’est compliqué pour les équipes. On bosse dans des conditions particulières. On doit se protéger ou protéger les autres pour ne pas infecter tout le monde. 

Vous en parlez entre vous de ces personnes-là ?
On en parle beaucoup entre nous. Les avis divergent un peu. Je viens d’enchaîner deux journées de douze heures. J’aimerais bien faire quelque chose d’autre qu’être enfermée chez moi, je voudrais me changer les idées surtout après un poste de 12h... Certains collègues sont pour le confinement total, d’autres pensent qu’il faut une petite activité à condition d’être seul bien sûr. Personne n’a le même avis. Mais en tout cas, chacun doit réfléchir à ce qu’il fait et doit se responsabiliser.

« JE NE ME VOYAIS PAS RESTER CHEZ MOI »

Ta saison cycliste doit te paraître bien loin…
Les jours où je travaille, je ne pense pas au vélo (sourires). On est sans cesse dans l’économie du matériel. Il faut faire attention à tout. J’évite de boire sinon il faut jeter le masque à la poubelle directement. Je ne suis donc pas du tout dans l’optique vélo quand je bosse. Ce matin, j’ai quand même eu mon entraîneur au téléphone. On essaie d’organiser les choses pour garder un minimum de condition physique… Je compte bien reprendre, même si la forme sera différente de début mars.

Es-tu fière de ce que tu fais actuellement ?
Je ne suis pas en recherche de reconnaissance. Je ne me voyais pas rester chez moi en confinement alors que j’ai des compétences pour aider et soulager les équipes soignantes. Je fais ça par solidarité. J’en profite pour faire passer un message. Hier (jeudi), je transfusais un patient, et je me disais que ceux qui ne respectent pas le confinement, ce n’est pas pour aller donner leur sang… Mais nous en avons besoin. Il n’y a pas que le Covid-19 à gérer. Si les gens veulent sortir, ils peuvent donner leur sang… On en aura vite besoin.

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