On a retrouvé : Mickaël Jeannin

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

Près de six ans déjà, qu’il a rangé le vélo au fin fond du garage. Pendant cinq saisons, Mickaël Jeannin a porté le maillot du CC Etupes : c’était entre 2008 et 2012. Une période au cours de laquelle il a vécu de grands succès avec des coéquipiers devenus depuis, pour certains, de grands noms du peloton international. Aujourd’hui installé à Guyans-Durnes (Doubs), au sud-est de Besançon, l’ancien athlète de 31 ans ne touche plus du tout à son vélo. Mais il continue de suivre avec passion le cyclisme professionnel… et amateur. « J’aime d’ailleurs lire votre série “On a retrouvé” et je me demandais bien quand est-ce que vous alliez m’appeler », s’amuse-t-il auprès de DirectVelo.

DirectVelo : On ne te voit plus du tout dans le monde du cyclisme !
Mickaël Jeannin : Ah ça… On ne risque pas de me croiser : je ne me rends pratiquement jamais sur les courses. L’une des seules exceptions, c’était lors d’un Châtillon-Dijon, où j’avais fait découvrir la course à ma femme. Mais sinon, je me fais très rare…

Que deviens-tu ?
J’ai rencontré ma compagne et j’ai eu deux enfants. Je suis pleinement rentré dans la vie active puisque je travaille dans le bâtiment. Aujourd’hui, je suis spécialisé dans l’aménagement extérieur. Sinon, j’ai construit ma propre maison entre 2016 et 2017. Ca nous a pris beaucoup de temps mais c’est un bel accomplissement.

Tu ne roules plus du tout ?
Je suis monté sur un vélo ce lundi, mais c’était uniquement pour le tester avant de le vendre (sourires). Depuis fin 2012, j’ai dû remonter trois fois sur le vélo. Une fois pour aller chercher le pain, une autre fois sur le VTT et donc lundi. J’ai vraiment tout arrêté du jour au lendemain. Il le fallait, j’avais fait le tour de la question et je commençais à en avoir ma claque.

Tu n’es jamais nostalgique ?
Forcément, il m’arrive de repenser à toutes ces années en compétition. On refait le monde entre copains… Je fréquente encore quelques coureurs comme Morgan Kneisky, Matthieu Converset, Mathieu Chiocca ou Clément Mahé. On se remémore nos vieilles anecdotes. Quand je suis arrivé au CC Etupes (en 2008), j’étais surmotivé. Tu vois des mecs d’un super niveau à côté de toi et tu te dis qu’il y a moyen de passer pro. La première année était géniale puis ensuite, je faisais moins gaffe aux petits détails, je profitais sans doute moins, sans vraiment m’en rendre compte. Ce n’est pas que je n’étais plus motivé, mais disons que j’étais rentré dans une sorte de routine. Sur la fin, j’ai réussi à vraiment me remotiver, grâce notamment à Niels Brouzes qui m’avait fait complètement changer mon planning d’entraînement. Sur la fin, j’en avais marre : les courses au soleil, les Classiques puis les courses par étapes… C’est toujours pareil. Une fois que tu as fait le calendrier amateur pendant de longues années, tu te dis que tu n’as plus rien à découvrir. Et puis, je savais que j’étais très manuel en parallèle et j’avais un métier qui m’attendait, alors que cette vie de cycliste de DN1 était précaire. 

« WARREN BARGUIL, C'ÉTAIT UN DINGO »

Tu as toujours été reconnu en tant que coureur au tempérament offensif…
Le vélo d’attaque, c’est le vrai vélo ! C’est ce que j’aime. Je n’ai pas réussi à me faire un gros palmarès mais bizarrement, j’ai toujours beaucoup ressemblé à Thomas De Gendt, tant au niveau du caractère que physiquement, sur le vélo… Bien sûr, j’étais bien moins fort que lui. Mais c’est simplement qu’en terme de profil, c’est celui en qui je me reconnais encore aujourd’hui.


De 2008 à 2012, tu as eu de nombreux coéquipiers qui ont, depuis, fait carrière dans le peloton. Quels sont ceux qui t’avaient le plus marqué à l’époque ?
Le premier, c’est Thibaut Pinot ! Je me souviens de notre premier stage de début de saison, lorsqu’il est arrivé au club (en 2009, pour sa seule saison dans l’équipe, NDLR). Nous avions des entretiens individuels avec le staff. Jérôme Gannat nous demandait de faire nos voeux au niveau du programme de courses. A la fin, il posait tout ça sur la table et nous pouvions voir tous ensemble ce que l’on allait faire. Thibaut avait une liste de souhaits longue comme le bras, avec des épreuves de Classe 2 dès le début de saison. Sur le coup, on lui avait dit : “attends, tu as 18 ans, on va y aller doucement…”. Mais finalement, j’ai couru avec lui sur les Courses au soleil et je l’ai vu prendre quatre échappées en quatre jours. Et là, j’ai tout de suite compris. D’ailleurs, je lui ai dit qu’il n’allait pas rester en amateurs bien longtemps.

C’est donc celui qui t’a fait la plus grosse impression ?
Il y a aussi eu Warren Barguil. Lui, c’était “pire”. C’était un dingo ! Je lui disais de se calmer car on finissait par s’engueuler, c’était vraiment trop…

Comment ça ?
On n’arrivait pas à le canaliser, en course. Il ne calculait rien, il attaquait de partout, tout le temps. Je me souviens notamment de l’Essor breton, qu’il avait remporté (lors de sa seule saison à Etupes, en 2012, NDLR). Le premier jour, il avait été battu et il était super énervé. Le lendemain, on avait mis un plan en place et nous devions travailler pour lui, mais il avait fait sauter tout le monde de la roue très vite, nous y compris. Je lui avais dit qu’il fallait qu’il se calme sinon, il allait se débrouiller tout seul (sourires). Cela dit, ça lui a réussi par la suite, et ce sont de grands souvenirs.

« IL ARRIVAIT QUE L’ON N'ÉCOUTE PAS TROP JÉJÉ »

A l’image de Thibaut Pinot ou de Warren Barguil, tu as donc vu des coureurs passer par le CC Etupes une seule saison avant qu’ils ne s’envolent pour le peloton professionnel. De ton côté, tu es resté “au même étage” pendant toutes ces années : comment l’as-tu vécu ?
Très bien. Je faisais mon truc. Je ne me prenais pas la tête et j’étais simplement content pour eux. Ce qui était vraiment agréable à Etupes, c’est que tous ces coureurs qui ont marché fort étaient vraiment de bons gars. C’était un plaisir de les aider.

Que te dis-tu lorsque tu vois ces coureurs évoluer sur les plus grandes épreuves mondiales aujourd’hui ?
J’aime bien faire “le vieux con” et rappeler à mes proches que j’ai couru avec certains d’entre eux, et que je leur ai fait mal à la gueule (rires) ou que je les ai battu.

En 2009, vous aviez remporté la Coupe de France DN1…
C’était notre plus grande saison. Il y a vraiment un truc qui s’était passé, surtout en Coupe de France, d’ailleurs. Il y avait une sacrée émulation dans le groupe et ça se passait toujours bien. Sur le papier, nous n’avions pas toujours les meilleures individualités, mais quel groupe ! Et on gagnait ! J’étais fier d’appartenir à cette équipe. On sentait que nous étions respectés dans le peloton. Tout coulait de source entre nous, on savait quoi faire sur le terrain.

Il n’y avait pas besoin de briefing alors ?
(Rires). Il arrivait que l’on n’écoute pas trop Jéjé (Jérôme Gannat). Je reviens à l’Essor breton que l’on avait gagné avec Warren (Barguil) : à un moment donné, on n’avait plus besoin de descendre à la voiture et on n’écoutait plus trop les consignes. C’est comme si nous savions déjà ce qu’il fallait faire mais surtout, on savait déjà qu’on allait réussir à le faire. Parfois, ça se passait comme dans un film. On imaginait un scénario avant la course et ça se produisait. Bon, il y a aussi des fois où ça marchait beaucoup moins bien… Mais on prenait tellement de plaisir ! J’espère que les collègues en gardent les mêmes bons souvenirs, et qu’ils se souviennent de moi (rires).


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