Victor Lafay : « Prêt à assumer un nouveau statut »

Crédit photo Nicolas Mabyle / DirectVelo

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Jusqu’à présent, la carrière de Victor Lafay n’a pas été un long fleuve tranquille. En dents de scie, son parcours a connu un sommet à des hauteurs encore inexplorées jusqu’alors en mai dernier, quand il a remporté une étape du Tour d’Italie à Guardia Sanframondi, en Campanie. Solide sur le Championnat de France ou lors de l’Arctic Race en Norvège, le coureur de la Cofidis semblait (enfin) lancé pour de bon mais c’était sans compter sur un nouveau pépin physique qui lui a pourri toute sa fin de saison. “J’ai l’habitude des galères. Je les cumule sans vraiment savoir pourquoi… Sur le moment, c’est dur mais j’essaie toujours d’en garder du positif et de me projeter sur la suite”, assure-t-il après coup. Car l’athlète de 26 ans a désormais une grande confiance en lui et l’envie de jouer un rôle majeur en 2022, en étant l’un des fers de lance de la structure nordiste. Avec un objectif clair en tête en ce début de saison : décrocher sa place pour une première participation au Tour de France en juillet prochain. Le moral regonflé à bloc, il lance sa mission cette semaine sur les routes du Tour de la Provence. Entretien pour DirectVelo

DirectVelo : Avec le recul, dirais-tu que 2021 a été une année capitale dans ta carrière cycliste ?
Victor Lafay : J’ai passé un cap, c’est sûr. Mais en fait, l’hiver dernier, avant même le début de la saison, j’ai déjà senti que j’avais passé un cap. Je savais que j’allais pouvoir faire de bonnes choses et enfin me montrer sur les courses. La saison 2021 a été très importante pour moi, bien sûr. J’ai pu montrer à l’équipe qu’ils ont eu raison de me faire confiance jusque-là. J’ai prouvé que quand je suis en grande condition et que je ne suis pas embêté par des maladies ou des blessures, je suis capable de jouer le podium sur différentes courses. Maintenant, 2022 doit être l’année de la confirmation. Je veux être régulier et je me sens prêt à assumer un nouveau statut.

« J'ÉTAIS NUL, J’AVAIS LE NIVEAU D’UN CADET ET C'ÉTAIT IMPOSSIBLE À CACHER »


Celui de coureur protégé, voire de leader, lors de différentes compétitions ?
Carrément ! J’ai déjà pu l’expérimenter à Valence ou en Norvège. Avoir des responsabilités est quelque chose qui me booste vraiment. Quand tu vois tes coéquipiers se faire mal à la gueule pour toi, tu te sens obligé d’en faire au moins autant. Ça tire vers le haut. Je suis prêt à assumer mais d’un autre côté, je n’ai pas de mal à dire quand ça ne va pas. Au briefing ou en début de course, si je sens que je ne suis pas “ouf”, je le dis rapidement. Je n’ai pas envie que l’on se mette à mon service pour rien. Si ça ne va pas, autant que les autres mecs de l’équipe jouent leur carte. C’est le plus honnête. Mais en tout cas, oui, je me sens prêt à avoir des responsabilités, ça ne me fait pas peur. Au contraire, ça me plaît.

L’an dernier, tu as évidemment vécu ce très grand moment en remportant une étape du Tour d’Italie. Mais il serait réducteur de résumer ta saison à ce succès car tu as fait preuve d’une belle régularité jusqu’à l’été…
J’ai été présent dès le début de saison. Si je n’étais pas tombé en Ardèche, j’aurais pu jouer un Top 5 là-bas. J’étais vite dans le jeu. Une fois que je me suis remis de ma commotion (traumatisme crânien à la suite de cette chute sur la Classic de l’Ardèche, NDLR), j’ai vite été de retour à un bon niveau à Valence (2e d’étape, 4e du général et meilleur jeune, NDLR). Il y a ensuite eu cette victoire d’étape sur le Tour d’Italie mais je ne voulais pas m’arrêter là. L’idée n’était pas de signer un nouveau contrat puis de me la couler douce. Surtout pas ! J’ai voulu montrer que je pouvais enchaîner. J’ai fait un bon Championnat de France (6e), en étant appliqué, même si j’avais les boules car j’ai eu un problème mécanique dans le sprint… Mais au moins, j’ai montré encore une fois que je pouvais répondre présent. Idem en Norvège (3e et meilleur jeune de l’Arctic Race, NDLR).

Tu as, en revanche, totalement disparu de la circulation en fin de saison. Que s’est-il passé ?
J’ai chopé un virus en Norvège, justement. On n’a jamais vraiment su ce que c’était. Je n’ai pas voulu lâcher l’affaire mais avec le recul, j’aurais sûrement dû mettre un terme à ma saison. Il était inutile d’insister. Je le saurai pour la prochaine fois. Mais il y avait un gros enjeu pour l’équipe : je faisais partie des dix premiers du groupe pour les points UCI et on sait à quel point ça va être important pour rester dans le WorldTour en fin d’année. Je n’ai pas voulu lâcher l’affaire mais finalement, ce n’était pas la bonne solution. J’étais dans un état de fatigue assez abominable durant toute la fin de saison. Dès les premiers kilomètres des courses, j’étais dans les voitures avant même que l’échappée ne parte. J’étais le premier lâché à chaque fois. Je faisais 60 bornes maximum sur les courses. J’étais nul, j’avais le niveau d’un cadet et c’était impossible à cacher. Les directeurs sportifs voyaient bien que je pétais d’entrée… Il m’a fallu cinq semaines de coupure pour récupérer. Et encore… Je n’étais pas totalement remis. J’ai totalement récupéré en décembre.

« LE TOUR, FORCÉMENT, ÇA ME FAIT TRÈS ENVIE »


Depuis les rangs amateurs, tu accumules les pépins. Comment le vis-tu ? 
Il ne faut pas y penser et faire en sorte que ça n’arrive plus, ou le moins souvent possible, en restant prudent et en faisant attention à tous les détails, en course comme à la maison, pour ne pas attraper froid ou des trucs du genre… C’est tout bête mais autant se mettre à l’abri de déconvenues même si pour la Norvège, je pense que c’est juste de la malchance et que je n’y suis pour rien. J’ai l’habitude des galères. Je les cumule sans vraiment savoir pourquoi… Sur le moment, c’est dur mais j’essaie toujours d’en garder du positif et de me projeter sur la suite. En général, maintenant, j’arrive à vite remettre en route.

Tu lances ta saison 2022 sur le Tour de la Provence avec, donc, la volonté de confirmer ce que tu as montré l’an passé !  
J’aurais dû reprendre au Grand Prix La Marseillaise mais j’ai attrapé la Covid en janvier et ça m’a fatigué sur le moment. J’ai donc dû réduire la durée de mon stage avec l’équipe et j’ai passé une petite semaine sans toucher au vélo. J’étais vite essoufflé, rien qu’en montant les escaliers… J’avais dû mal à respirer. C’était assez costaud mais ça n’a pas duré longtemps. J’ai vite pu retrouver l’équipe en Sierra Nevada après une période d’isolement. Pour ma reprise, après le Tour de la Provence (voir le classement du prologue), je vais enchaîner avec le “Haut-Var” (Tour des Alpes-Maritimes et du Var, NDLR) puis la Drôme/Ardèche. De base, je comptais déjà arriver en forme dès La Marseillaise. Le fait d’avoir chopé la Covid décale un peu mon programme mais je pense quand même que je ne devrais pas être trop mal à partir du “Haut-Var”. En espérant ensuite être performant en Drôme/Ardèche, sur des courses qui peuvent me convenir. Ensuite, je dois faire le Tour de Catalogne mais j’aimerais aussi être sur Tirreno-Adriatico, juste avant. Je pense que ça pourrait me servir de premier gros test. Je me sens capable d’y être performant.

Après ta victoire d’étape sur le Tour d’Italie l’an dernier, envisages-tu de remettre le couvert cette saison ou souhaites-tu découvrir le Tour de France ?
Je ne serai pas de retour sur le Giro cette année car je vise une participation au Tour de France. J’ai très envie d’y être cette année. Contrairement à Guillaume (Martin) qui va enchaîner les deux, ou même peut-être Anthony (Perez) ou Pierre-Luc (Périchon), je ne me sens pas encore capable d’être compétitif sur le Tour en ayant déjà le Giro dans les pattes. Donc ce sera soit le Tour, soit la Vuelta. Si je suis sur le Tour, ce sera avec l’envie de jouer une victoire d’étape. Forcément, ça me fait très envie, d’autant qu’il y aura des étapes pas loin de la maison comme celle de Châtel. C’est aussi pour ça que je veux faire un gros début de saison et montrer que je suis en forme. Je veux gagner ma place pour le Tour et rappeler, encore, qu’on peut me faire confiance.

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