Flamanville : Des absences et des questions

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

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Après la manche de Besançon en novembre dernier, la France accueille son deuxième et dernier grand rendez-vous international de la saison de cyclo-cross. C’est à Flamanville, terre habituelle des hivers des spécialistes français de la discipline, que la Coupe du Monde fait escale pour l’avant-dernière manche Elite, et la dernière pour les Espoirs et Juniors puisqu'ils ne pourront pas courir à Hoogerheide. Parmi les coureurs présents à la reconnaissance ce samedi, Eli Iserbyt, vainqueur de la manche en Franche-Comté, a apprécié le site. "C’est un très beau parcours, surtout avec le château. Avec les montées courtes, les descentes, les virages, il demande beaucoup d'explosivité. Je crois qu'il va pleuvoir demain (dimanche) donc la course sera plus lente. C'est un parcours français typique. Je suis content d'être là car les courses françaises me conviennent très bien".

Son adversaire principal de Besançon, Toon Aerts, est lui aussi de la partie. "Je suis très content de découvrir un nouveau circuit. En Belgique, je fais tous les parcours depuis quinze ans. C'est un circuit typiquement français avec des portions larges où on peut se doubler. En Belgique, le parcours est parfois plus étroit. On peut prendre plus de vitesse. Par exemple en Belgique, il y a des virages serrés où on repart à zéro, ici il n'y en a pas. En reconnaissance, je suis déjà à 19 km/h de moyenne sur un tour. En Belgique, ce n'est jamais le cas dans une reco". Le leader de la Coupe du Monde rejoint l’avis du coureur de Baloise Trek Lions. "C’est toujours très large. En Belgique, parfois on se retrouve dans des endroits où on se demande si c'est vraiment pour le cyclo-cross. En France, le parcours est toujours dur, les courses sont difficiles, on le voit à la télévision. J'espère que demain il y aura beaucoup de spectateurs". Ils seront 5000, soit le maximum autorisé.

« C’EST BIEN POUR NOUS, COMME ÇA C’EST PLUS OUVERT »

Côté suisse, Loris Rouiller découvre aussi Flamanville, mais il a pu bénéficier des conseils d’un Français qui connait bien cette terre normande. "C’est un très beau parcours, bien pensé. Je le trouve super joli mais il est super dur, très exigeant. On pense que c’est un parcours roulant mais ça colle énormément. Il y a pas mal de faux plats, de petites buttes, et tout le temps des relances. J’ai eu Antoine Benoist au téléphone, qui a été Champion de France sur ce parcours, mais à l’envers. Normalement il ne doit pas y avoir d’écarts. Mais de ce que j’ai vu aujourd’hui ça va être difficile, usant. Il va falloir gérer sa course et garder la tête. Il ne faudra pas exploser au premier tour, ça va être intéressant, pour le public aussi. Il y aura des groupes, des écarts, mais ça va rester assez groupé devant".

Malgré l’engouement partagé, le plateau souffre de quelques trous. Chez les femmes surtout, de nombreuses concurrentes du haut du classement mondial manquent à l’appel. "C’est assez ouvert pour demain, toutes les filles ne sont pas venues. À deux semaines du Mondial, elles se préservent. Il y a quelque chose de bien à faire. Elles font l’impasse sur Flamanville qui est loin, mais elles seront là à Hoogerheide. C’est bien pour nous, comme ça c’est plus ouvert, mais il y aura quand même des filles fortes", préfère tempérer Perrine Clauzel. Chez les hommes, Tom Pidcock, le Champion d’Europe Lars van der Haar, et évidemment les deux ogres de la discipline, seront absents. Wout van Aert a mis un terme à sa saison, alors que Mathieu Van der Poel est blessé. "Je tenais à venir ici. J'aurais pu passer mon tour mais je voulais venir car c'est vraiment un beau parcours. J'ai vu des vidéos du Championnat de France 2020, ça m'a donné envie", concède Eli Iserbyt.

« POUR LES MONDIAUX, CE N’EST PAS OPTIMAL »

Chacun vient avec des motivations différentes. Toon Aerts veut lui défendre une place au classement général. "C’est important pour moi. Je suis 3e et j'espère rester sur le podium et me rapprocher du 2e (il est à 17 points de Michael Vanthourenhout, NDLR). Je ferai la course à fond ce dimanche mais pour celle de la semaine prochaine, il faudra voir combien de points me manquent. Car pour la récupération, ce sera difficile de faire la course à bloc le dimanche et de voyager vers les Etats-Unis le lundi". Eli Iserbyt a lui déjà la Coupe du Monde en poche. Mais c’est une raison supplémentaire pour continuer à être présent partout. "Ça ne m'empêche pas d'avoir envie de courir toutes les manches. Comme ça je pourrai dire que je suis un vainqueur complet. Je veux prouver que cette nouvelle Coupe du Monde avec seize manches, c'est faisable de les courir toutes. Nous sommes des ambassadeurs et nous devons promouvoir le cyclo-cross dans tous les pays".

Quant à Loris Rouiller, il admet qu’il n’avait pas prévu la course à son programme, mais les courses jeunes annulées aux Pays-Bas ont changé son choix. "Je viens de faire une semaine aux Canaries. Je devais faire dix jours mais j’ai préféré venir ici comme ils ont annulé les manches jeunes à Hoogerheide. Je voulais faire une dernière course avec les U23". La principale raison de ces forfaits est bien sûr le Championnat du Monde américain, dans quinze jours. "Pour les Mondiaux, ce n’est pas optimal. Quand on regarde la préparation d’un Van der Poel, en général il fait deux semaines de camp, ensuite une course, et c’est le Mondial. Pidcock est encore au camp, il n’a pas couru le week-end dernier. C’est une course en plus, mais ça fait partie du rythme. J’aime aussi courir. Si tu as envie de venir, il faut venir, mais si c’est par contrainte ce n’est pas bon. J’ai envie de courir ici et le week-end prochain aussi".

« JE NE LEUR JETTE PAS LA PIERRE, MAIS C’EST DOMMAGE »

Toon Aerts regrette les absences, mais émet une autre hypothèse. "Chez les hommes, parmi les meilleurs, il manque seulement Pidcock. Chez les Femmes, il y a plus d'absentes, c'est triste pour le cyclo-cross. Chacun fait ses choix. Il y a beaucoup de manches. Seize, c'est un peu trop, et c'est sans doute la raison des absences". Mais Eli Iserbyt répond à son compatriote. "Nous sommes professionnels, c'est notre boulot de les faire. Il faut seulement songer à se reposer assez. Nous prenons nos précautions pour le covid. Notre saison s'arrête fin février en Belgique, elle ne dure que six mois". Le coureur de Pauwels Sauzen-Bingoal reste le bon élève de cette campagne. "Je comprends mais les mêmes coureurs peuvent aussi manquer des courses en novembre ou décembre. Je veux montrer que c'est faisable de courir toutes les manches. Je ne leur jette pas la pierre, mais c'est dommage, surtout pour les spécialistes du cross à plein temps".

Parmi les favoris aux États-Unis, Eli Iserbyt estime que le Mondial hante de nombreux esprits, encore plus après le forfait des deux ogres. "Les spécialistes devraient courir le plus possible, car c'est la base de la discipline. C'est comme si au Tour de France, un coureur décidait de manquer une journée. C'est la particularité du cross de courir souvent. Beaucoup de coureurs ont déjà Fayetteville dans la tête car nous sommes plusieurs à pouvoir être Champion du Monde cette année. Mais moi je suis ici pour courir". Il redemande même des circuits hors des terres flamandes. "J'espère qu'il y aura encore trois ou quatre Coupe du Monde ici (en France, NDLR), rien que justement, pour le format des parcours. En Italie, le parcours était différent, aux Etats-Unis, les parcours étaient différents… Cette diversité est importante pour le classement général". Mais malgré les absences, Flamanville a toutes les chances de basculer en « Flamand ville » ce dimanche.

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