Alexandre Marlier, coureur en N3 et YouTubeur

Crédit photo DR

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Les casquettes d’Alexandre Marlier sont nombreuses. Coureur, YouTubeur, commentateur de courses sur Zwift, étudiant en Sciences Humaines pour devenir professeur d’histoire, géographie et sciences sociales… ; l’athlète originaire de Charleroi et aujourd’hui résident de Bruxelles n’a pas franchement le temps de s’ennuyer au quotidien. Y compris en cette période de confinement, qui ne l’empêche tout de même pas de rouler en Belgique. Entretien avec le membre d’une N3 française, le SCD Boulonnais-Casino Golden Palace BSM.  

DirectVelo : Faut-il avant tout te considérer comme coureur ou comme YouTubeur ?
Alexandre Marlier : Les deux activités sont liées. Enfin… “activités” si on peut le dire comme ça car ce sont avant tout des passions que j’exerce bénévolement. Je n’en vis pas. Aujourd’hui, je reste avant tout un étudiant. J’ai débuté le cyclisme en Cadets seulement. Je n’ai aucune prétention de devenir un grand champion cycliste à l’avenir. Je suis un “petit” coureur, bien conscient de mes limites. Cette année, j’ai l’occasion de courir dans une N3 française. C’est une belle opportunité. Pour autant, ça ne change pas beaucoup mon quotidien : je cours essentiellement en Belgique. Les courses en France, c’est uniquement pour les manches de Coupe de France et de Coupe des Hauts-de-France. En parallèle, j’ai toujours aimé la vidéo également. Plus jeune, je passais des après-midi entiers chez mes grand-parents qui ont toujours aimé ça également, et c’est venu d’eux. J’ai commencé à faire des vlogs sur différents sujets et plusieurs de mes passions comme la magie.

Comment et pourquoi as-tu commencé à tourner des vidéos consacrées au cyclisme ?
Je me suis lancé lorsque je préparais le triathlon longue distance de l’Alpe d’Huez. J’avais décidé de faire une vidéo par jour sur ma préparation à cet événement. Au début, ça ne fonctionnait pas du tout. Enfin… Façon de parler. Seulement une centaine de personnes suivait mes vidéos. Mais depuis, ça a pris un peu d’ampleur. J’ai amélioré mes vidéos : j’ai commencé à commenter les courses, à faire des montage plus poussés. Je suis agréablement surpris du nombre de lectures pour ma vidéo de la Vienne Classic (près de 20.000, NDLR), mais je crois que la période de confinement y est pour beaucoup.

Quel contenu cherches-tu à apporter ?
Ce qui compte pour moi, c’est de sortir du “classique”, de ce que l’on voit déjà partout. On connaît le vélo à la télé, avec toujours le même type d’images. Mais je trouvais que ça manquait de parties “inside”. Des vlogs, il en existe déjà des tonnes pour les voyages, les recettes de cuisine ou autre. Par contre, lorsque je m’y suis mis pour le vélo, il y en avait très peu et je trouvais que ça manquait. Aujourd’hui, la nouvelle génération passe beaucoup moins de temps sur la télé. Par contre, ils sont énormément sur l’ordinateur, les tablettes, le téléphone. Je voulais toucher un certain public, plus jeune.

« JE NE VEUX PAS PASSER POUR UN GUIGNOL »

Et ça marche ?
Oui, j’ai un public varié mais avec beaucoup de jeunes. Je reçois régulièrement des messages d’ados qui me disent qu’ils ont commencé le vélo grâce à moi, parce qu’ils ont vu mes vidéos et que ça leur a donné envie d’essayer le vélo. J’ai un ou deux messages du genre par semaine et ça me pousse vraiment à continuer.

N’est-il pas difficile d’obtenir des autorisations pour avoir le droit de filmer en course ?
Si, c’est compliqué. J’essaie d’anticiper et de demander des autorisations mais il arrive régulièrement qu’on me les refuse. En Belgique, ce n’est pas toujours évident, hormis sur les petites kermesses. Et encore, ça dépend… Certains sont bien content que je filme car ça fait aussi parler de la course. En France, je sais que plusieurs autres le font aussi, alors je fais ma vie sans trop rien dire. Jusqu’à présent, on ne m’a jamais fait de réflexion. Parfois, la situation est frustrante car je passe la semaine à dire à mes abonnés qu’ils pourront suivre ma course du dimanche et au dernier moment, je suis privé de filmer. Du coup, je n’ai pas de contenu à mettre sur ma chaîne. Or, il faut alimenter la chaîne régulièrement, au risque de perdre des abonnés.

On imagine que le fait de proposer ce genre de contenu représente également une certaine pression sportive, dans le sens où tu ne peux pas “bâcher” chaque dimanche après 20 kilomètres…
Oui, c’est une pression et elle n’est pas que positive (sourires). Sur mes dernières courses par exemple, tout ne s’est pas super bien passé. J’ai été bêtement piégé en début de course sur la Vienne Classic, et j’ai chuté sur la kermesse de Templeuve. J’ai fait, en gros, 25 et 40 bornes sur les deux courses. Quand ça se passe de cette façon, ce n’est pas bon (rires). Il ne faut pas que ça arrive cinq fois de suite sinon, les gens ne me suivront plus. Je ne veux pas passer pour un guignol. Quand tu deviens un personnage public, tu peux vite te faire allumer sur les réseaux sociaux si ça ne va pas. Heureusement, je trouve que la plupart des gens sont sympathiques et bienveillants.

« FAIRE QUELQUE CHOSE DE PLUS INTIMISTE »

Lors de ta vidéo de la Vienne Classic (voir ici), on t’entend dire que tu vas te faire engueuler par ton directeur sportif lorsqu’il va découvrir l’erreur tactique faite en course…
(Rires). On s’est effectivement fait engueuler deux fois. Une première fois au moment de la course, bien sûr. Puis une seconde fois après la publication de ma vidéo. Il n’était pas très content mais il a aussi vu que j’avais la lucidité de savoir la bêtise que j’avais faite. Faute avouée, à moitié pardonnée.

Plus généralement, que pensent le staff et tes coéquipiers de ces vidéos ?
Le staff s’en fiche. Ils ne sont pas trop dans ce délire là, ça leur fait ni chaud ni froid. Personnellement, j’aimerais pouvoir faire quelque chose de plus intimiste, parfois. Faire un véritable “inside” avec toute l’équipe, mais c’est délicat car je suis timide, en réalité, et je n’ai pas envie d’imposer ça aux autres. Ils n’ont pas forcément tous envie d’être à l’écran. En général, je filme tout seul dans mon coin avant le départ, discrètement, sans embêter personne. Et puis, surtout, je suis coureur avant d’être monteur. Il faut que je reste un minimum concentré sur la course. Je ne peux pas me comporter comme un journaliste reporter à une heure du départ d’une course. C’est difficile d’avoir plein de tâches et de rôles différents. Je dois trouver le meilleur équilibre possible.

Combien de temps te prend, en moyenne, le montage d’une vidéo ?
Entre l’envoi des fichiers vidéos sur le PC adapté, les différents chargements, les synchronisations, le décrochage, l’écriture, le tournage et l’enregistrement de la voix par dessus les images, les transitions, le mixage du son… J’en ai pour 15-20 heures à chaque fois.

« JE NE MANQUE PAS D'IDÉES, MAIS IL FAUT AVOIR LE TEMPS »

Outre le montage de tes vidéos personnelles, tu commentes également des courses sur Zwift !
J’adore commenter les courses sur la “Frenchy Fuzion”, c’est une grande passion pour moi. J’espère que ça va pouvoir m’ouvrir de nouvelles portes pour l’avenir. Je fais des études pour devenir professeur d’histoire géographie mais ma grande passion, c’est le cyclisme et le sport en général. Si je passe autant d’heures sur ces montages, c’est aussi dans l’espoir d’être repéré et de pouvoir en vivre à l’avenir. Je suis prêt à saisir toute opportunité qui se présenterait. J’ai d’ailleurs plein de projets à l’étude, avec d’autres YouTubers, ou sur des idées de podcast radio sur le cyclisme. Je ne manque pas d’idées, mais il faut avoir le temps de gérer à la fois ma vie de petit coureur, d’étudiant, de commentateur et de monteur vidéo. Je reçois beaucoup de messages d’encouragement et de soutien, ça fait plaisir. Et puis, je me régale dans ce que je fais alors je ne vais pas me plaindre !

En février dernier, tu as aussi consacré une vidéo au jeu DirectVelo Manager (voir ici)...
Je trouve ça super marrant et très intéressant. Par fierté, j’aimerais pouvoir être bien classé mais le problème, c’est que je connais pas très bien le peloton amateur français. J’ai pratiquement tapé des noms au hasard au moment de constituer mon équipe (rires). Certains sont déjà passés pros et ne vont m’apporter aucun point (Maxime Chevalier, NDLR). C’est la “loose” ! Mais ça reste très drôle.

Comment t’adaptes-tu à l’actuelle période de confinement, qui te prive de disputer des compétitions et donc également de produire des vidéos ?
Au début, j’ai vite eu peur de tourner en rond. Puis je me suis dit qu’il fallait innover et me filmer chez moi, via des séances d’entraînement sur les plateformes virtuelles, par exemple. Il y a beaucoup de gens sur les écrans en ce moment, il faut en profiter pour essayer de divertir les gens.

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