Romain Feillu : « À l'époque, j'étais le plus sérieux »

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

Romain Feillu (St-Michel-Auber 93) passe à autre chose. Le coureur de 35 ans a effectué ses derniers tours de roues à l'occasion de Paris-Bourges. Professionnel pendant treize ans, il prépare depuis la fin de saison dernière le DEJEPS dans le but d'encadrer des groupes de coureurs en loisir. Le porteur du maillot jaune sur le Tour de France 2008 se confie à DirectVelo.

DirectVelo : Dans quel état d'esprit es-tu un mois après l'arrêt de ta carrière ?

Romain Feillu :  Ça va, j'ai terminé, je suis allé au bout d'un truc. J'avais bien dévissé au niveau des performances ces dernières années. Même au niveau de l'emploi du temps, j'étais beaucoup plus souvent à la maison. Ça a été une transition en douceur. J'ai entamé le DEJEPS, je prépare doucement mon avenir.

« PLUS ATTIRÉ PAR LE CÔTÉ RELATION PUBLIC QUE DIRECTEUR SPORTIF »

Que vas-tu faire ces prochains mois ?
J'aurai des épreuves pour mon DEJEPS à passer en février-mars. Après, ça sera bon. Je travaille là-dessus. Je passe du temps en famille aussi. Je regarde les projets pour l'année prochaine. Je me renseigne pour effectuer mes stages près de chez moi ou en itinérance. Ce serait plutôt à visée touristique avec un public avec qui je pourrai mettre des parcours et un service logistique, des déplacements de bagages d'un point A à un point B pas trop loin autour de Brive (Corrèze). Ça peut être du VTT, mais j'accompagnerai plutôt des sorties routes.

Tu ne souhaites donc pas devenir directeur sportif...
Je suis plus attiré par le côté relation public plus que par le fait d'être directeur sportif. Le DEJEPS est intéressant pour avoir des notions d'entraînements plus poussées que l'expérience accumulée au cours de ma carrière. C'est aussi obligatoire pour encadrer des groupes et éventuellement pourquoi pas le faire pour d'autres structures en tant que sous-traitant.

« BIEN PASSÉ D'UN POINT DE VUE ÉMOTIONNEL »

As-tu toujours été attiré par la transmission ?
C'est vraiment quelque chose que j'ai apprécié sur les dernières années de ma carrière. J'ai eu l'occasion d'accompagner quelques groupes. A l'entraînement, je suis souvent celui qui dessine les parcours, qui coache les gars sur les pauses et les coins sympas.

Comment as-tu vécu cette ultime saison ?
Ça s'est bien passé d'un point de vue émotionnel. Au niveau sportif, j'étais moins à la hauteur, mais j'ai vécu de bons moments avec les collègues. Avec le DEJEPS, je ne pouvais pas rouler en début d'année comme je voulais. Ça n'a pas été très simple. Le temps perdu est très dur à rattraper, voire impossible. Le DEJEPS se passe sur deux ans quasiment. Je suis rentré en octobre l'an passé. On a eu pas mal de présence en hiver, du début d'année jusqu'en avril. On a été plus tranquille ensuite, ça se faisait à distance. Ça prenait un peu de temps, de la concentration et de l'énergie qui n'étaient pas mis au service du vélo.

« IL Y AVAIT MOINS DE SÉRIEUX QU'AUJOURD'HUI »

Que retiendras-tu de ta carrière ?
Je retiens des belles premières années au niveau sportif. C'est clair qu'elles ont été les meilleures pour moi. J'ai eu des gros soucis de genou quand j'ai été jeune après un accident sur la voie publique. Je m'étais fait opérer. Je suis passé pro, j'avais vraiment le couteau entre les dents. J'ai eu l'impression de passer pro tard par rapport à ce que je pouvais. J'ai beaucoup donné sur quatre-cinq années jusqu'en 2011. En 2012, j'ai eu la déception de ne pas disputer le Tour de France. Je n'ai pas été présent non plus en 2013 à cause de ces problèmes de genou. J'ai beaucoup dévissé dans la tête. J'ai le sentiment d'avoir effectué un très gros début de carrière. Après, j'ai dû poser les armes pour continuer mais plus sur le côté plaisir que sur la performance. J'ai refait le Tour en 2014. C'est le seul que j'ai fini, où je n'ai pas eu de soucis de genou. J'ai quand même été sur le fil un peu tout le temps en y allant tranquille dans la montagne alors que les jambes pouvaient peut-être me permettre de faire mieux. Je ressens de la frustration par rapport à ça.
 
As-tu senti une évolution dans le monde du vélo entre le début et la fin de ta carrière ?
Oui, notamment avec l'arrivée des capteurs de puissance. Quand on voit des photos de coureurs au début de ma carrière, on voyait qu'ils n'étaient pas encore affutés en mai. Aujourd'hui, c'est complètement fini. Déjà en janvier, tous les coureurs sont hyper affutés. Ce n'est le plus la même époque. Pourtant, j'ai l'impression d'avoir fait du cyclisme moderne. J'ai le souvenir de coureurs qui buvaient systématiquement une bière le soir. Il y a même quelques coureurs qui allumaient une cigarette sur les courses par étapes quand je suis passé pro. Il y avait moins de sérieux qu'aujourd'hui. A l'époque, j'étais vraiment le plus sérieux de tous. En ayant levé un peu le pied mais pas plus que ça, à la fin, j'étais plus dévergondé.

Mots-clés

En savoir plus

Portrait de Romain FEILLU