Noé Melot : « C’est un truc de fou »

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

C’est une grosse surprise y compris pour le principal intéressé ! Noé Melot n’avait pas imaginé une seule seconde devenir Champion de France Juniors, et c'est pourtant bien lui qui a triomphé en solitaire en haut de la montée Magenta, à Plédran (voir classement). Le coureur de la Région Sud PACA a profité du dernier tour pour sortir seul d’un groupe de favoris composé d’une quinzaine d’éléments. Avec trois de ses coéquipiers, ils ont été dans tous les bons coups ce dimanche, avant de signer le doublé avec Hugo Tapiz. Longtemps au tennis, et venu au vélo seulement au début de la crise du Covid, le sociétaire du MS Mandelieu était très loin d’imaginer avoir un maillot tricolore sur les épaules lorsqu’il s’amusait sur le home trainer ou sur la route avec son père. Surtout qu’il y a un mois, il aurait pu tout arrêter et se consacrer aux études. Noé Melot est revenu sur ce jour de gloire pour DirectVelo, et a retracé son parcours assez atypique.

DirectVelo : Tu t'étais imaginé avec ce maillot bleu-blanc-rouge ?
Noé Melot : Pas du tout ! Ça peut paraitre étrange, mais ce n'était absolument pas mon objectif en venant ici. Je venais plus pour faire de l'intensité et passer un cap. Je m'étais plus préparé pour des courses de grimpeur comme le Tour du Léman. Peut-être que ça m'a retiré de la pression. Depuis une semaine je sens que j'ai des jambes de dingue. Au chrono je ne fais que 11e mais sur la dernière bosse je suis monté à bloc. Mais je n'étais pas parti assez vite donc ça ne s'était pas vu que les jambes étaient super. Je savais que c'était possible, mais je ne m'étais pas imaginé ça non plus, c'est un truc de fou.

Comment t'es-tu retrouvé seul devant ?
Je ne pensais pas vraiment partir. Ce n'était pas vraiment une attaque, plutôt un gros coup de vis. À partir de là je me suis dit "mon gars tu as dix bornes, tu accélère, tu te mets à fond". Je voyais les watts à 350, à 400 dans les bosses. Je me disais "tu es bien, relance, relance". Dans les bosses c'était super dur, j'étais à fond. Dans la dernière montée il n'y a plus rien, plus de jus, mais il y a les supporters sur le côté et c'est un truc de dingue.

Savais-tu ce qu'il se passait derrière toi ?
Pas du tout. Au début je ne me suis quasiment pas retourné. Au bout de six bornes je commençais à être un peu à bloc, je ne voyais personne. Et dans la dernière bosse j'ai eu une lueur de lucidité et j'ai vu un maillot jaune. Mais je ne savais pas si c'était Pays de la Loire ou Hugo (Tapiz).

« ON PENSE AUX HEURES DE SOUFFRANCE À L’ENTRAINEMENT »

Il y avait un gros collectif du Sud PACA aujourd'hui !
Déjà au moment où il y a le groupe de la victoire qui se forme, à deux ou trois tours de l'arrivée, on est quatre avec Hugo, Gabin (Favard) et Neriah (Meunier Sow). Là je me dis, si on ne fait pas au moins un podium c'est du gâchis. On est quatre éléments, tous les quatre bien. C'était notre rôle de suivre les coups. Quand quelqu'un accélère, je me suis dit que tout le monde avait mal, il fallait y aller. Et la suite on la connait.

À quoi as-tu pensé dans ces derniers mètres où tu as pu savourer ?
Forcément on repense à tout le travail fait en amont. On pense aux heures de souffrance à l'entrainement, et on se dit que finalement ça n'a pas servi à rien, on ne s'est pas arraché la gueule pour rien.

Tu étais dans une bonne dynamique après la Coupe des Nations...
J'ai passé un cap depuis la préparation pour la Classique des Alpes où ça ne s'est pas du tout passé comme je le voulais. Mais je savais malgré ce résultat que j'avais passé un cap. Ça s'est vu en Slovaquie où je fais 4 au général, et je le remontre encore aujourd'hui. Je ne pense pas exceller dans un domaine. J'aime beaucoup les efforts de montagne. Faire des efforts longs au seuil. J'ai senti que je peinais un peu dans les parties où il faut faire des efforts très brefs et violents sur 15-20 secondes. Mais c'est normal, je n'ai pas tellement travaillé ça. Mes derniers entrainements, c'était du seuil. C'est pour ça que j'étais bien dans la longue bosse d'arrivée, c'était plus lissé.

« QUAND J’AI UN ÉCHEC JE REMETS TOUT EN QUESTION »

Comment es-tu venu au vélo ?
Je ne suis pas du tout d'une famille de cyclistes. J'ai commencé le vélo pendant le confinement. Avant je faisais énormément de tennis. Depuis que j'ai six ans, environ. Je faisais pas mal de ski l'hiver aussi. Mais le tennis, c'est super dur mentalement. J'étais quelqu'un de très nerveux, j'ai lâché dans la tête et j'ai perdu cette passion. J'ai toujours beaucoup regardé le vélo à la télé, je me suis inscrit au Sprint Club de Nice fin 2019. Mais je faisais toujours du tennis en parallèle. Puis il y a eu le confinement et j'ai commencé à pas mal rouler. J'ai commencé à m'entrainer sérieusement cet hiver, et là ça a fonctionné.

Pourquoi y'a-t-il eu ce déclic en 2019 ?
J'ai rencontré des personnes dans le tennis qui m'ont dégoûté de ce sport. J'ai commencé à faire un peu de vélo avec mon père, comme ça, le week-end ou une fois sur deux. Et quand j'ai commencé à le battre, même si ce n'est pas un champion (rires)... Je prenais plaisir à souffrir, j'adore me faire très mal et finir arraché sur le côté de la route, m'entrainer des heures et des heures. Ça peut paraitre fou.

Comment es-tu passé d'une pratique pendant le confinement au haut-niveau ?
J'en faisais pendant le confinement sur home trainer. Je ne m'entrainais pas beaucoup mais je suis arrivé au VC La Pomme Marseille en J1 et j'ai commencé à faire mes premières Fédérales, puis les UCI. Malheureusement, fin juillet j'ai attrapé la mononucléose. Donc pour les France de l'année dernière. Ça m'a complètement plombé la fin de saison, mais ce qui ne tue pas rend plus fort. Je m'en suis servi pour rebondir, quand j'ai un échec je remets tout en question, j'en fais beaucoup plus et ça me fait progresser.

« JE DEVAIS ARRÊTER LE VÉLO POUR FAIRE MÉDECINE »

Dans quel coin t'entraines-tu ?
J'habite à Colomars (Alpes-Maritimes), dans le meilleur endroit du monde pour rouler. Là je suis en Bretagne depuis une semaine, honnêtement c'est la catastrophe (rires). J'ai pris des tempêtes, je n'en pouvais plus sur le vélo. Je suis né à Nice, j'ai vécu à Nice, et je resterai à Nice pour rouler (sourire). Je suis entrainé par un vététiste, Joris Bagnol. Il a monté son équipe de VTT. Je n'en fais pas du tout, mais quand j'ai commencé, c'était l'entraineur de l'équipe de Nice. Je suis resté avec lui depuis. Je suis au Pole cyclisme à Nice, et lui il entraine là-bas donc c'était le meilleur moyen d'être avec quelqu'un qui est là toute la semaine et en qui j'ai confiance. On est proches.

Tu te consacres à 100% au vélo ?
Je fais des études de commerce, je voulais faire médecine mais si j'avais fait ça je n'aurais pas pu devenir Champion de France car la prépa commence début août. Je devais arrêter le vélo pour faire médecine, donc je me suis tourné vers le commerce. Tout est en distanciel donc je vais pouvoir faire du vélo à 100% la semaine prochaine. J'ai décidé ça il y a... un mois (sourire). Ça dépendait de mon début de saison et la motivation sur le vélo. Avant le France elle était maximale. Maintenant, elle est sur-maximale (rires).

« J’AVAIS DES IDÉES, DES PLANS AVANT »

Tu n'aurais pas imaginé ça il y a quatre ans ?
C'est irréel. J'ai regardé le Championnat de France chrono amateurs, avec la victoire de Mathias Ribeiro da Cruz. Son histoire m'a fait penser à moi. Il a commencé aussi pendant le confinement, il me semble. Et je me suis dit que c'était fou de devenir Champion de France après ce parcours. Et il m'arrive la même chose.

Comment tu vois la suite ?
Je n'ai pas tellement réfléchi, je ne pensais déjà pas devenir Champion de France (rires). Peut-être que le maillot va bouleverser mes plans, mais j'aimerais bien rester du côté de Nice. C'est le meilleur endroit pour progresser, c'est un endroit que j'apprécie beaucoup, toute ma famille est là. J'avais des idées, des plans avant, mais je ne sais pas si ça va être bouleversé maintenant.

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