On a retrouvé : Laurent Denonfoux

Crédit photo Régis Garnier - DirectVelo

Crédit photo Régis Garnier - DirectVelo

Laurent Denonfoux n’a pas de regrets. Il garde même de très bons souvenirs de ses années passées dans le peloton amateur français. Prometteur chez les Juniors, le Roannais était ensuite passé par le Chambéry CF, le CR4C Roanne - par deux fois - puis l’AVC Aix-en-Provence, sans jamais convaincre une équipe professionnelle de lui donner sa chance. Il avait alors arrêté le cyclisme dès ses 23 ans, comprenant qu’il n’allait pas faire carrière sur le vélo. DirectVelo a retrouvé l’ancien Champion de Rhône-Alpes sur route. 

DirectVelo : Que deviens-tu ?
Laurent Denonfoux : J’ai mis un terme à ma carrière fin 2011, alors que je venais de passer une deuxième saison à l’AVC Aix-en-Provence. Je m’étais donné quelques années chez les Elites pour passer à l’échelon supérieur, chose que je n’ai pas su faire. Alors j’ai considéré qu’il était temps d’arrêter. Quelques semaines avant d’arrêter, j’ai rencontré ma copine, qui était Miss sur une course. Une fois la saison terminée, il a fallu que je me mette à trouver du boulot. Ma petite amie devait terminer ses études à Nice, alors je l’ai suivie là-bas. On s’est installé à Draguignan, pendant deux ans. J’ai travaillé à Intersport, puis on est remonté dans ma région, dans la banlieue de Saint-Etienne, à Firminy, même si je suis un Roannais (sourires). J’ai bossé six mois dans un magasin de cycles, avant de retrouver un poste dans un magasin Intersport, pour lequel je travaille toujours.

Quels liens entretiens-tu avec le monde du cyclisme aujourd’hui ?
Je continue de rouler quand je le peux, mais bien moins qu’avant, bien sûr. Je suis toujours de près les résultats et les courses. Peut-être même plus maintenant que ces dernières années, curieusement. Cette année, je me suis inscrit à l’Etape du Tour, que je disputerai pour la deuxième fois après l’avoir déjà faite en 2015. J’avais terminé dans les cent premiers et je n’étais pas mécontent. Pour le reste, je continue de garder des liens avec quelques personnes du milieu. Par exemple, mon ancien coéquipier Thomas Rostollan est récemment passé au magasin. On en a profité pour se faire un petit repas, c’était super sympa de le revoir. J’ai aussi gardé d’autres liens forts du côté de l’AVC Aix, notamment avec Jean-Michel (Bourgouin). 

C’est un manager qui t’a beaucoup apporté ?
Le feeling était directement passé à l’époque. On a la même vision du vélo et je sais que l’on s’apprécie vraiment mutuellement. J’ai toujours apprécié sa franchise. Un jour, je me souviens qu’il m’avait gueulé un bon “merde” après une course où il n’avait pas été content de moi. Et le soir même, on buvait un coup et c’était reparti ! Je l’ai encore eu au téléphone pas plus tard que la semaine dernière. Tous les ans, j’essaie de faire une course avec l’AVC Aix, en tant que mécano, pendant mes congés. L’an dernier, j’étais parti sur le Tour de Martinique avec eux. Les autres années, j’allais souvent au Tour Alsace. Ce sont toujours de beaux moments.

« LE DESTIN FAIT BIEN LES CHOSES »

Comme ton frère Marc, tu avais fait le choix d’arrêter le cyclisme assez tôt, dès tes 23 ans…
A l’époque, ça avait toujours été clair dans ma tête. Si je ne perçais pas, je ne voulais pas insister et vite passer à autre chose. Je ne m’étais pas fixé de date limite mais je voulais être raisonnable. Le vélo, même en amateur, c’est beaucoup de sacrifices. Autant que chez les pros, en réalité. A un moment donné, ça ne servait à rien de repousser l’échéance en sachant que je n’allais pas faire carrière. J’ai rencontré ma copine, j’ai trouvé du boulot, et j’ai débuté une nouvelle vie. Je suis heureux comme ça et je pense que le destin fait bien les choses.

Outre l’AVC Aix, tu avais donc porté le maillot de deux autres grands clubs amateurs français, au Chambéry CF et au CR4C Roanne. Que retiens-tu, avec le recul, de ces trois expériences ?
J’ai eu la chance de connaître des structures très différentes. Le CCF, comme tout le monde le sait, est une équipe très cadrée et très structurée. Tout était millimétré là-bas. Je suis moi-même rigoureux et perfectionniste, mais ça ne me correspondait pas totalement. Je me suis impliqué à 100%, mais j’aurais eu besoin de plus de moments à moi, avec ma famille, pour me détacher un peu… On était sans arrêt ensemble, dans les logements, à parler de vélo. Je n’ai pas de regrets, mais ce n’était pas l’idéal pour moi, avec le recul. Et je me suis donc retrouvé au CR4C Roanne en 2009. Ca marchait très bien là-bas.

C’était ta meilleure saison ?
Sans doute oui. J’ai marché toute l’année, j’étais bien avec notamment cette victoire sur le Championnat Rhône-Alpes. Mais en habitant tout près du siège du club, j’ai connu les mêmes problèmes qu’au CCF, ou presque. J’étais très souvent avec des membres du staff et du club. Mais j’aurais préféré avoir plus de “libertés”, être seul et couper un peu du vélo. C’est ensuite ce que j’ai trouvé à Aix. Quand je rentrais chez moi, dans la Loire, je pouvais véritablement couper.

Tu étais prometteur chez les Juniors et tu pouvais légitimement attendre beaucoup de la suite de ta carrière. Que t’a-t-il manqué ?
Certainement plus de régularité et de meilleurs résultats, tout simplement. Je n’avais peut-être pas su faire toutes les démarches nécessaires non plus pour me vendre auprès des équipes pros.

« ROMAIN (BARDET) SE COMPARAIT ÉNORMÉMENT À THIBAUT PINOT »

Il y avait aussi eu cette longue blessure au CCF…
Oui mais je n’ai pas envie de me chercher d’excuse, même si j’en avais eu pour six mois (lire ici). Tous les ans, il y a des coureurs qui se blessent et ça ne les empêche pas de revenir par la suite et de performer au plus haut-niveau.

En 2009, lors de ta fameuse “meilleure saison” à Roanne, tu portais le même maillot que Romain Bardet, Rudy Molard ou encore Arthur Vichot !
On avait une équipe de dingues ! Quand je revois certaines photos de l’époque, de la présentation de l’équipe par exemple, j’en rigole. Lorsque des gens me demandent ce que je faisais avant de travailler, et qu’ils ne connaissent pas grand-chose au vélo, je leur dis que je courais avec Romain Bardet. Et là, ça leur parle (sourires).

Quels souvenirs gardes-tu du Romain Bardet de cette époque ?
De très bons souvenirs. Ce qui est marrant, avec le recul, c’est que je me souviens qu’il me demandait des conseils. Enfin, des conseils… Disons qu’il doutait. Il sortait des rangs Juniors et à l’époque, il se comparait énormément à Thibaut Pinot. A cette période, je trouvais que Romain était légèrement en retard sur Thibaut, qui était selon moi déjà plus mâture. Romain me disait : “je ne comprends pas, t’as vu comme il marche Thibaut ?”. Je lui disais de ne pas s’inquiéter, que Pinot était déjà focalisé à 100% sur le vélo. Il ne faisait que ça alors que Romain avait ses études à côté et en plus, il était en retard physiquement. Il avait encore le corps d’un adolescent. Je lui disais que ça allait venir avec les années. Bon… Je crois que depuis, il a bien comblé cette différence (rires).

T'impressionnait-il déjà à Roanne ?
Bien sûr ! Il était tout jeune et il avait déjà le programme de courses d’un coureur expérimenté de 30 ans. C’était impressionnant. On avait vite compris que ça allait être un Champion.

« À L’AVC AIX, J’AI MOINS PENSÉ À MOI »

Tu fais référence à Romain Bardet et à Thibaut Pinot. Tu as suivi avec intérêt leur duel sur le récent Tour du Haut-Var ?
Je continue de suivre tout ça de près, oui. D’ailleurs, j’ai été interpellé par les propos de Romain après la course (lire ici). C’est là qu’on voit toute son évolution depuis ces dernières années. A l’époque, il se serait peut-être un peu affolé, il se serait demandé pourquoi c’est Thibaut qui gagnait et pas lui. Aujourd’hui, tu as le sentiment qu’il s’en moque… Il sait exactement ce qu’il fait, où il en est, et ce qu’il lui reste à faire. Il me semble super tranquille. Il est épatant.

Que t’es-tu dis lorsque Romain Bardet a terminé 2e du Tour de France ?
Ca fait drôle, et ça fait plaisir. Il est venu rouler chez moi un hiver. Il s’entraînait dans la région stéphanoise et on s’était contacté. On a fait une sortie ensemble mais je me souviens que j’avais bien galéré… Même si pour lui, il était à l’arrêt, ça roulait beaucoup trop vite pour moi (rires). En tout cas, ça avait été l’occasion de se remémorer certaines anecdotes. C’était sympa.

Il ne t’arrive jamais de te dire que tu pourrais, toi aussi, être dans le même peloton que Romain Bardet en ce moment ?
Non car j’ai la lucidité de me dire que je n’avais simplement pas le niveau nécessaire. Même lorsque j’étais très jeune, passer pro n'a jamais été une fixation, même si c'était dans un coin de ma tête. 

Quand avais-tu compris que ça n’allait pas le faire ?
En 2010, à Aix. J’ai encore connu un gros collectif là-bas, avec du Giraud, du Rostollan, du Ligthart… Je me suis mis à très souvent bosser pour le collectif, naturellement, et j’ai moins pensé à moi. Après ça, c’était fini. Si tu n’as pas ton nom sur DirectVelo tous les week-ends, tu ne peux pas espérer passer pro. Mais encore une fois, ce n’est pas un regret. Je me plaisais dans l’équipe et j’ai sûrement fait ce que j’avais à faire.





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