Paula Blasi : « Tous les moments difficiles me sont revenus en tête »
Crédit photo Philippe Pradier - DirectVelo
Elle devait finir par en claquer une pour conclure son cursus Espoirs parfaitement, c'est chose faite. Paula Blasi est devenue Championne d'Europe de la catégorie, ce vendredi matin, à Guilherand-Granges, grâce à une attaque dans le final de la course face à trois concurrentes. L'Espagnole avait une émotion particulière en franchissant la ligne. Déçue au Tour de l'Avenir, sur sa faim au chrono du Championnat du Monde avant de monter sur le podium de la course en ligne, voilà les petites frustrations oubliées pour la sociétaire d'UAE Team ADQ. Avant de passer au gravel et au cyclo-cross pour le plaisir, Paula Blasi a confirmé les attentes placées en elle, une fois de plus, alors qu'elle découvre encore l'univers du cyclisme. Tout sourire, elle est revenue avec DirectVelo sur cette journée rêvée, le Mondial rwandais, et la pression qui l'entoure parfois dans ce type de rendez-vous.
DirectVelo : Comment te sens-tu avec ce maillot sur les épaules ?
Paula Blasi : C’est incroyable, je me disais que si quelqu’un m’avait dit il y a deux jours que je porterais ce maillot de Championne d’Europe, je ne l’aurais pas cru. Donc je vais juste essayer de prendre le temps d’y croire et d'encaisser ce qui s’est passé parce que c’est fou.
Qu’as-tu pensé dans les derniers mètres quand tu as vu que tu allais gagner ?
Je cherchais ma mère du regard, parce que c’est l’une des premières courses où elle venait me voir, donc c’était vraiment spécial pour moi. Et puis tous les moments difficiles me sont revenus en tête. Comme le Tour de l’Avenir, peut-être Kigali aussi à l'occasion du contre-la-montre… J’étais juste fière d’avoir surmonté ces difficultés et aussi fière du travail de l’équipe. Je suis vraiment très reconnaissante.
« IL Y EN A UNE QUI N'AURA PAS DE MÉDAILLE, JE NE VEUX PAS QUE CE SOIT MOI »
Quel était ton plan aujourd’hui ?
C'est une bonne question (rires). Je savais que c’était un parcours très difficile, ce n’était pas à moi de faire la course. Il y avait des équipes très fortes, donc je voulais juste suivre un peu les mouvements jusqu’au dernier tour. Et quand j’ai vu que ça montait très fort à chaque tour, je savais que je ne devais pas gaspiller mes watts. J’ai vraiment essayé d’économiser de l’énergie, d’être intelligente. Et quand on s’est retrouvées à quatre au dernier tour, je me suis dit : « Il y en a une qui n’aura pas de médaille, je ne veux pas que ce soit moi » (rires). Alors j’ai tenté d’attaquer un peu avant le sprint, et ça a marché.
Que s'est-il passé dans ta tête au moment de cette attaque ?
J’ai attaqué à environ 2,5 km de l’arrivée. On était quatre, on commençait à se regarder, et je me suis dit : « Je dois prendre de l'élan ». J’étais en dernière position, j’ai freiné un peu et ensuite j’ai attaqué à bloc. Je voulais passer avec beaucoup de vitesse, plus vite qu’elles. Quand je les ai dépassées, je les ai vues se regarder entre elles, alors je me suis dit : « Maintenant, c’est un contre-la-montre de 2 km jusqu’à l’arrivée. »
C’est une fin parfaite pour tes années en moins de 23 ans...
Complètement. J’étais triste parce que c’est ma dernière année U23, mais je pense qu’il n’y avait pas grand-chose de plus à faire, je suis vraiment très heureuse.
« EN ARRIVANT ICI, JE ME SUIS SENTIE SUPER BIEN »
Comment t’es-tu sentie après le Rwanda ?
En fait j’avais un peu peur, mais je savais qu’au niveau des meilleures coureuses, on venait toutes de Kigali, donc tout le monde était dans le même état. Heureusement, je n’ai pas eu de maladie, pas de problème avec la nourriture ou autre, donc je me sentais vraiment bien. À Kigali, on sentait que l’air était plus lourd, plus difficile à respirer, donc en arrivant ici en France, je me suis sentie super bien, super forte. Je savais que j’avais de bonnes chances de jouer le podium.
Tu n’étais pas déçue de la médaille de bronze à Kigali ?
Ah non, pas du tout. Parce qu’après le contre-la-montre du premier jour, j’étais vraiment déçue. Pas tellement du résultat même si on veut toujours le meilleur, mais surtout de mes sensations. Je ne me sentais pas bien sur le chrono, je n’arrivais pas à sortir ma puissance, donc j’étais déçue de ma performance. Pour la course en ligne, j’ai juste essayé d’être maline, de faire une bonne course, d’être la plus intelligente possible.
« JE NE RESSENS PAS VRAIMENT DE PRESSION EXTÉRIEURE »
Tu t’imaginais tout ça quand tu as commencé le cyclisme ?
Ah non, non, non, sûrement pas (sourire) ! Si quelqu’un m’avait dit que je jouerais un podium aux Championnats du Monde et aux Championnats d’Europe, je lui aurais dit qu’il plaisantait. Donc là, j’ai encore besoin de temps pour réaliser ce qui s’est passé à Kigali, et maintenant ce qui s’est passé aujourd’hui. Je pense que c’est la meilleure façon de terminer ma saison sur route, maintenant je vais me concentrer sur l’année prochaine.
Tu es donc satisfaite de ta saison ?
Oh oui. Bien sûr, il y a toujours des choses qui pourraient être meilleures. Au Tour de l’Avenir, j’espérais un meilleur résultat. À Kigali aussi, je visais mieux au chrono. Mais parfois, les choses ne se passent pas comme prévu. Et je pense que ça fait aussi partie de la magie du cyclisme : il faut surmonter ces moments, et ensuite ça paie.
Beaucoup de gens te voient comme un grand talent, comment tu gères la pression ?
Pour être honnête, je ne ressens pas vraiment de pression extérieure. Ma famille est super avec moi, ils ne me mettent aucune pression. Je dis toujours que je suis la même Paula qu’il y a un an. Donc je ne ressens pas de grands changements dans mon entourage proche, à savoir ma famille et mes amis. Ils me traitent toujours pareil, et j’en suis reconnaissante. Et puis, quand les gens attendent quelque chose de toi, c’est même motivant. Tu te dis : « Ok, je suis sur la bonne voie », donc ça me motive, et c’est agréable.
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