Danemark : « 3'44" ? Pas suffisant pour l'or olympique »

Crédit photo Francis Spruyt - DirectVelo

Crédit photo Francis Spruyt - DirectVelo

"Je n'avais jamais vu cela, c'est exceptionnel". Ce sont les mots lâchés par Jos Smets, membre de la commission piste de l'Union Européenne de Cyclisme, après la prestation du Danemark qui a amélioré à trois reprises en deux jours le record du monde de poursuite par équipes (lire ici)"Hier (mercredi), c'était une surprise. Aujourd'hui (jeudi), c'était plus attendu", lâche l'entraineur-assistant danois Martin Lollesgaard à DirectVelo au milieu de la piste berlinoise où il fête le sacre mondial de son quatuor. Selon lui, c'est grâce à la haute lutte en finale avec la Nouvelle-Zélande que la différence s'est faite. "Ce duel serré les a stimulés. Au fur et à mesure des tours, nous nous rapprochions d'eux et du coup, tu commences à avoir un point de repère au loin. Mais je dois surtout dire que techniquement, ils ont été parfaits."

RASMUS PEDERSEN ROULE COMME UN FOU JUSQU'AUX 2250 METRES

Dans ce quatuor, Rasmus Pedersen, le seul coureur Conti de la bande, a un schéma précis et doit s'écarter aux 2250 mètres. "Je dois m'assurer qu'ils puissent embrayer à la vitesse la plus élevée possible. Les autres doivent garder cette allure. C'est moi qui dicte le tempo. Si nous roulons trop lentement au début, nous prenons du retard et c'est difficile d'accélérer après le départ. Je joue donc un rôle crucial. Mais je l'apprécie car il correspond à mes qualités. Je roule comme un fou jusqu'aux 2250 mètres."

Ce titre mondial est la confirmation du bon choix de Rasmus Pedersen. En effet, le coureur de 21 ans avait arrêté sa carrière en 2017 avant de revenir en 2019. "Je n'avais plus la movitation. Je voulais connaitre autre chose. Par exemple, la vie d'un étudiant." Mais le coup de fil du sélectionneur Casper Jorgensens, membre du quatuor danois Champion du Monde en 2009, a réussi à le convaincre à remonter sur le vélo. "C'est fou car sans son appel, rien ne serait arrivé."

LASSE NORMAN HANSEN CRIE SUR SON PARTENAIRE

Le deuxième wagon de la fusée, Lasse Norman Hansen, roule sur route dans l'équipe ProTeam Alpecin-Fenix. A 27 ans, il obtient enfin le maillot érisé qu'il cherchait depuis dix ans. "C'est un soulagement. C'est dingue d'être au top de ce sport depuis plusieurs années sans être une seule fois Champion du Monde. Et en plus, c'est génial de le faire avec mes potes avec lesquels je travaille depuis des années." Pour conclure cet exercice, Frederik Rodenberg a remis une couche, forçant Julius Johansen (20 ans, Uno-X Norwegian Development Team) et Lasse Norman Hansen à s'accrocher dans sa roue. Toutefois, Lasse Norman Hansen a averti son coéquipier de pas en faire trop. "En étant derrière lui, j'ai pu jeter un coup d'oeil furtif sur l'écran du coach et je voyais bien qu'on était en avance sur la Nouvelle-Zélande. Je lui ai crié trois fois de tempérer l'allure. Ce n'était pas parce que je ne pouvais pas suivre, mais je savais qu'il péterait avant la fin s'il maintenait cette cadence. Le but est de garder l'homogénéité jusqu'au bout, mais il a gardé un rythme parfait."

« J'ETAIS SUR QUE NOUS ETIONS EN TRAIN DE PERDRE »

Si Lasse Norman Hansen pensait que son équipe était en avance, Frederik Rodenberg (22 ans, Uno-X Norwegian Development Team) ne l'a pas compris de suite. "Quand je prends le relais, je suis dans mon monde. Je regarde le sol et uniquement le sol. C'est à peine si j'entends mes coéquipiers. A un tour et demi de l'arrivée, j'ai quand même jeté un coup d'oeil furtif vers l'autre côté de la piste et je ne voyais pas la Nouvelle-Zélande. J'étais sûr que nous étions en train de perdre. Mais quand nous avons passé la ligne d'arrivée, j'ai vu qu'ils étaient dans le virage. C'est là que j'ai compris que la victoire était pour nous."

Pour Frederik Rodenberg Madsen, c'était la course "parfaite". "Hier, j'étais en colère car j'avais commis quelques erreurs, alors que nous avions battu le record du monde. Aujourd'hui (jeudi), je ne voulais rien laisser au hasard. Le rythme n'a jamais baissé. Tout le monde a été au sommet de son art." Une fois la ligne d'arrivée franchie, un autre challenge commençait : descendre de sa machine sans s'évanouir. "J'ai lutté de toutes mes forces. Je ne voulais pas tomber dans les pommes devant la télévision. Dès que la caméra m'a lâché, je me suis écroulé."

UN STAGE EN AFRIQUE DU SUD EN JANVIER

Pour Martin Lollesgaard, "il n'y a pas de limite. C'est toujours le même débat. Est-il possible d'aller plus loin ? Je pense que tant qu'il y aura des progrès en matière d'entrainement et de matériel, il y aura de la place pour faire mieux. Au niveau des sportifs, je pense qu'on a atteint un certain degré de perfection, tant physiquement que mentalement." Cette performance est également le résultat d'un trajet entamé avant les Jeux Olympiques de Rio. "Nous avons un schéma en place depuis des années et nous le suivons à la lettre. Les coureurs changent mais la stratégie reste la même". Un plan qui est basé entre autres sur un stage d'un mois en Afrique du Sud au mois de janvier. Ensuite, les athlètes rentrent au pays prendre quelques jours de repos et enchainent avec de l'entrainement à Copenhague. "Ce n'est pas que cela, il y a un suivi au niveau des plannings d'entrainement, de la diététique, mais c'est vrai que le stage en Afrique du Sud nous fait beaucoup de bien."

3'42" POUR L'OR OLYMPIQUE

Bien que cette prestation exceptionnelle laisse présager un bon résultat aux Jeux Olympiques de Tokyo, Frederik Rodenberg s'attend à une bataille plus serrée cet été. "Certaines nations vont s'améliorer. Je pense que nous pouvons encore faire mieux, mais il n'y aura plus une telle différence. Rasmus Pedersen va plus loin : "Ce 3'44" ne sera pas suffisant. Pour aller chercher l'or, il faudra taper dans le 3:42." En tout cas, la Nouvelle-Zélande, battue ce jeudi en finale, ne s'avoue pas vaincue et donne d'ores et déjà rendez-vous au Danemark dans cinq mois. "Aujourd'hui, ils étaient imbattables. Mais nous n'avions pas encore notre meilleur matériel ici, nous y travaillons toujours, puis franchirons un nouveau cap à Tokyo", avertit Aaron Gate, membre expérimenté du quatuor néo-zélandais.

 

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