CC Étupes : « Avec Simon, c’est exceptionnel »

Crédit photo Nicolas Berriegts - DirectVelo

Crédit photo Nicolas Berriegts - DirectVelo

C’est une victoire de marque qui valait bien d’avoir les yeux un peu humides pour Simon Baran. Et une franche fête du côté du CC Étupes. Ce triomphe au Tour de Côte d’Or relève plutôt de la surprise (voir classement), mais c’est une victoire pleine de symbole pour tout le monde dans la N1 franc-comtoise. Pour le principal intéressé, qui gagne pour la première fois en Elite, mais aussi pour son directeur sportif, dans un département de cœur et dont il n’a jamais remporté l’épreuve par étapes. Melvin Rullière est revenu avec DirectVelo sur ce beau week-end pour son poulain, qu’il entraine depuis maintenant trois ans, et une dynamique retrouvée au CC Étupes.

DirectVelo : Quelle victoire pour Simon Baran !
Melvin Rullière : Il se met tout le temps au service de ses coéquipiers, notamment de Dillon (Corkery). Samedi matin, je lui ai dit que c'était une carte bien placée pour jouer, « tu vas devant et tu vas voir, ça va tourner à notre avantage ». Il a dit qu'il n'allait pas pouvoir parce qu'il allait être surveillé. Je lui ai dit, « toi tu ne sais même pas qui est Carisey, alors comment veux-tu que les autres sachent qui est Baran ». Il a rigolé, finalement il s'est retrouvé devant et 2e du général à 5 secondes. Aujourd'hui on partait dans l'idée de garder cette place, et si on trouve l'opportunité avec l'aide de Dillon, on essaie d'aller gagner en se servant de coureurs comme Sten. Ce n'était pas facile mais on devait se servir de ces gars.

Encore fallait-il le suivre et revenir...
Ça a été le moment charnière de la course. Sten a attaqué un peu à contretemps, quand il mangeait. Il est resté 2-3 kilomètres à 20 mètres sans réussir à rentrer. Ils se sont fait reprendre par le peloton et au même moment, Gari Lagnet qui était le deuxième coureur qu'il devait suivre, a flingué. Simon a tout mis, il s'est accroché. Gari a coincé et il a fait le saut, et il a pu rentrer. Ça s'est fait à la pédale, c'était le jeu. Il est tombé sur Dillon qui a entretenu l'échappée, pour qu'on puisse aller au bout. Et on s'est concentré sur Van Gucht.

« ON GAGNE AVEC UN SIMON BARAN QUE LES GENS NE CONNAISSENT PAS TROP »

Mais... il y avait la menace Louis Hardouin...
On se concentrait tellement sur Van Gucht... Je lui ai donné un papier avec le nom des quatre mecs à moins d'une minute. Il savait qu'il y avait Hardouin mais il ne pouvait pas se concentrer sur tout le monde. Donc d'abord Sten, et dans le final je lui ai dit à bloc. Il a roulé, ça s'est attaqué, et ça finit avec pas grand chose. Il doit gagner avec quelques secondes d'avance. Je suis content pour lui. On gagne avec un Simon Baran que les gens ne connaissent pas trop mais qui est bon. C'est un équipier habituellement, on le voit moins.

Tu avais imaginé ce scenario vendredi matin ?
Nos deux cartes étaient Henri (Renard Haquin) et Simon. Dillon est venu en avion, il a perdu son vélo dans le transport. Donc il a couru avec le mulet pas à sa taille. Mathéo (Le Fur) revient de problèmes de santé, la mononucléose, et il est tombé la semaine dernière. On savait que ça serait très limite. Et Jon (Rye-Johnsen) est sprinteur et ne pouvait pas jouer sur toutes les étapes. Après, on a laissé faire la course. Simon a d'abord perdu 5 secondes le premier jour, ce qui lui a permis d'être une carte le lendemain matin. C'était Henri dans le peloton et Simon devant avec des coureurs à surveiller, et il est remonté 2e au général. Finalement c'est la gagne au bout pour pas grand chose.

« C’EST UN CADEAU POUR LUI »

Samedi matin, il y avait une pénalité infligée à Simon, que s'est-il passé ?
C'était une erreur. Les commissaires lui ont mis 20 secondes en voyant notre soigneur donner un bidon à un coureur. C'était un coureur de l'UV Aube qui a eu l'honnêteté d'aller dire que c'était lui. Il avait très soif, il a demandé un bidon, on lui a donné. Il faisait 37 °C, c'était par bon sens. Ils n'avaient pas vu le coureur mais l'assistant. Nous, on n'avait pas pris de bidon dans ce dernier tour, donc on a appelé, et le coureur est allé le dire et les 20 secondes ont été retirées. Mais on a pris la pénalité en argent quand même (rires). Mais c'est comme ça, il n'y a pas eu de triche !

Tu connais très bien Simon que tu avais déjà à Toucy...
Je l'entraîne depuis trois ans. C'est un gros bosseur. Il n'a pas forcément le moteur comme d'autres grands talents, mais il arrive à compenser avec le travail. Je peux dire qu'il est très concentré sur l'alimentation, le repos... Il n'a jamais raté un entrainement qu'il pleuve, neige, ou vente. Il respecte tout à la lettre, c'est hyper intéressant de travailler avec lui. Il apprend beaucoup de tout le monde, il a de l'envie et souvent comme équipier. Il était régulièrement dans les fronts numéro un parce qu'il était essentiel. Aujourd'hui ça a tourné à son avantage et j'ai vu trois copains qui ont voulu lui rendre. C'est l'équipier qui se retrouve dans cette position, et c'est un cadeau pour lui. Et un cadeau pour moi aussi. La Côte d'Or, c'est la maison, je n'ai jamais pu le gagner en coureur ou en DS. C'est ma première course à étapes, je suis hyper content que ce soit avec lui. Avec Dillon, je sais qu'il a les capacités, il y aurait eu moins de surprise. Avec Simon, c'est exceptionnel. Avec sa famille, sa copine qui l'aide beaucoup, c'est un tout.

« ON NE NOUS VOIT PAS VRAIMENT MAIS ON EST BIEN LÀ »

Une performance comme celle au Tour de Côte d'Or a aussi démontré la qualité du collectif du CC Étupes...
Je suis surtout très fier que Dillon lui ait rendu ce qu'il a fait pendant trois ans. Simon c'est le genre de coureur qui a laissé Dillon en tête au dernier virage de Dijon-Auxonne-Dijon, sans jamais avoir le retour puisqu'il n'était pas dans cette position. Aujourd'hui, avec un Corkery, Renard-Haquin, Rye-Johnsen... Je ne dis pas que c'est facile mais il y avait des chevaux. Les quatre étaient solides. Il va être reconnaissant très longtemps. Son premier mot a été, « Melvin, ça va être difficile de faire mieux ». Et c'est vrai ! Le Côte d'Or, avec le niveau... Il y a eu Cabot, Bernard, Kudus... Il est de ce cran-là ! C'est une récompense, on ne gagne pas beaucoup avec nos gamins, c'est génial. Et on se bat avec un 18 ans (Antoine Hue, NDLR). En face il a aussi appris quelque chose. Il était super fort, avec une belle équipe, mais ça ne faisait pas tout. La prochaine fois il ne se fera pas avoir. Simon, avant ce week-end, il s'est fait avoir pendant deux ans. C'est le cyclisme, c'est l'apprentissage.

Une telle victoire peut relancer la dynamique du CC Étupes ?
Ça marque la saison, avec la 13e place au France, la 7e au Roannais et le meilleur jeune, le double podium au Championnat BFC... On est toujours là. On a fait 2 de la Manche, dans le Top 10 à l'Artois. On ne nous voit pas vraiment mais on est bien là. On a du mal à exister face aux très gros, mais on est toujours là avec les jeunes. Collectivement, notre groupe prend bien. Pour l'année prochaine j'espère pouvoir en garder et les faire évoluer. Garder l'ossature qui fonctionne bien. Avec des Renard Haquin, Baran, Sparfel, Bagou, Lequet... Si on arrive à poursuivre cette émulation, on ne les gardera pas dix ans mais on peut être l'une des meilleures équipes. Mais il faut pouvoir les conserver. Ceux qu'on a perdus, comme Leclainche, Huyet etc, c'est qu'ils ont besoin de plus de moyens, parce qu'ils sont forts. On aurait pu les garder, mais on ne peut pas donner des grandes sommes à un coureur. Je pense qu'on fait du bon travail de formation avec Quentin Bernier, et c'est ce qui doit être reconnu sur notre école. Tu veux apprendre le vélo, tu appelles le CC Étupes et on fera tout pour te mettre dans les meilleures conditions possibles.

Mots-clés

En savoir plus