Nicolas Debeaumarché : « Je n’ai pas 1000 options »

Crédit photo Nicolas Mabyle / DirectVelo

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En ce mois de février, Nicolas Debeaumarché a lancé sa deuxième saison professionnelle sous les couleurs de St-Michel-Mavic-Auber 93. Après une première année de découvertes et de prise de marques, l’athlète de 25 ans espère désormais s’affirmer dans la peau d’un solide équipier modèle, dans le but de convaincre une WorldTeam ou une ProTeam de s’attacher ses services à l’horizon 2024. DirectVelo s’est entretenu avec l’ancien sociétaire du SCO Dijon en marge des Boucles Drôme-Ardèche.

DirectVelo : Comment s’est déroulé ton week-end en Drôme-Ardèche ?
Nicolas Debeaumarché : C’était une course dont je vais me rappeler un moment. C’était hyper tendu et les conditions étaient vraiment spéciales, surtout le dimanche. J’ai passé une sacrée journée ! Pour une équipe comme la nôtre, c’est dur d’exister dans ces conditions, surtout dans la Drôme avec la distance de la course… Ce genre de courses, on y va en faisant ce qu’on peut. Le niveau était très solide. 

« IL Y A PRESQUE DEUX COURSES DANS LA COURSE »

C’est un week-end qui pouvait faire penser aux Classiques (lire ici)...
C’est complètement ça ! Dès le kilomètre 0, c’est sous tension et ça n’arrête jamais. Le vent a beaucoup amplifié la difficulté de la course et le placement est devenu encore plus primordial, comme sur les Classiques. Il faut passer par là, c’est le type de courses qui fait progresser, mais c’est dur. Au-delà de ce week-end, j’ai trouvé le niveau des courses de février très élevé. J’étais déjà content d’avoir passé Bessèges sans trop de difficultés et sans encombres, sans chute… Je termine ce mois de février avec une anecdotique 25e place sur la Drôme Classic mais vu le plateau et les conditions, je considère que c’est correct. Je peux en être satisfait.

Comme on le rappelle tous les ans, et bien qu’il y avait une course en moins cette année sans le Tour de la Provence, ce mois de février est peut-être le plus difficile de l’année pour l’équipe !
On le sait avant de prendre le départ, vu le plateau à chaque fois, on va prendre des coups sur la tête. Samedi en Ardèche, on a six abandons pour sept coureurs au départ… Physiquement, on est déjà en-dessous des WorldTeams ou des ProTeams. Et en plus, il y a plein d’autres facteurs qui viennent creuser l’écart entre nous. Je parlais à l’instant du placement qui est primordial. Or, quand tu as le maillot d’Auber, tu ne vas pas venir faire le malin et jouer des coudes en tête de peloton comme quand tu as le maillot de Trek-Segafredo ou de Soudal Quick-Step. Donc tu restes en queue de paquet et tu prends tous les coups d’élastique. Tu fais plus d’efforts que les autres et tu finis par le payer. Il y a clairement une hiérarchie dans le peloton et j’y suis assez sensible. Les mecs de WorldTeams ont de meilleures conditions de travail à tous les points de vue. C’est normal, ça fait partie du jeu. Mais à la fin, ça compte. Sur un week-end comme celui-ci (les Boucles Drôme-Ardèche, NDLR), on ne coche aucune case. La préparation n’est pas la même… C’est pour ça que je peux être satisfait de faire 25e.

Tu évoques la hiérarchie au sein du peloton. Tu as toi-même porté le maillot de la Trek-Segafredo lors d’un stage estival en 2019…
Franchement, c’est là qu’on se rend compte à quel point c’est différent. Tu ne fais limite pas la même course. Quand je suis arrivé chez Trek, on m’a dit : “tu vois petit, ici t’as un petit logo sur le maillot où il y a écrit WorldTour et ça se respecte”. Tout était dit. Avec le maillot de St-Michel, tu ne peux pas venir jouer des coudes avec les Trek… Déjà, il faut être capable de le faire, soyons honnêtes. Mais quand bien même… Alors on prend les cassures dans la gueule, c’est comme ça. Il y a presque deux courses dans la course sur ces épreuves-là.

« MON OBJECTIF N’EST PAS DE PASSER DIX ANS DANS CETTE ÉQUIPE »

D’autant que si l’on reprend l’exemple de la course de dimanche, tu t’es donc retrouvé isolé durant toute la seconde partie de course !
Comme l’était Thomas Gachignard sur le Tour des Alpes-Maritimes et du Var, oui. Ce n’est pas l’idéal, c’est sûr, mais on fait avec nos moyens. Je suis très copain avec Julien Bernard (également un ancien du SCO Dijon et qu’il a côtoyé chez Trek-Segafredo, NDLR) et quand il me raconte ses courses, je me rends compte que c’est un autre monde. Il a un rôle précis d’équipier et il fait bien son taff. Je m’imagine tellement dans ce même rôle, au milieu d’un groupe qui impose le respect dans le peloton. Ça fait rêver. Avec Auber, ça nous arrive aussi de se faire respecter, malgré tout. Je pense aux Classe 2 ou même à des épreuves plus relevées, l’an dernier, quand Jason (Tesson) nous faisait des gros trucs. L’an passé à Dunkerque, on s’est fait respecter. On faisait le job et personne ne nous a dit quoi que ce soit. Donc c’est possible, mais on part avec un voire plusieurs handicaps au départ. Faire 25e, ce n’est pas l’eldorado, mais c’est toujours ça de pris. J’ai mis ce que j’avais à mettre sur la table, même si on peut toujours faire mieux. Maintenant, ce qui me motive et me stimule, c’est de me mettre à la planche pour un leader. C’est ce qui doit me permettre de passer au-dessus.

C’est-à-dire ?
Je ne suis pas fataliste. Je suis bien ici à Auber. Avec le staff et les coureurs, nous faisons notre maximum tous ensemble. Mais mon objectif n’est pas de passer dix ans dans cette équipe. Je veux passer en ProTeam ou pourquoi pas en WorldTeam. Si je suis mis dans les meilleures conditions, je me dis que j’ai les capacités pour faire un bon équipier au plus haut-niveau. Il y a moyen d’aller chercher cette place. Je ne vais jamais être le genre de coureur qui va gagner énormément de courses. D’ailleurs, déjà chez les amateurs, je ne gagnais pas beaucoup. Au sprint, je suis battu et en bosses, on va plus vite que moi aussi. Je n’ai pas 1000 options. Moi, je veux montrer que je suis un garçon solide et que je peux aider des leaders en moyenne montagne, sur le plat, sur des Classiques… Bien sûr, si l’occasion de performer se présente sur une course, il va falloir y aller. Mais j’espère surtout que certains dirigeants seront sensibles à mon profil. Je me vois bien faire une carrière d’équipier dans une grosse structure.

Comment faire valoir ces qualités-là cette saison ?
C’est toute la problématique de ce cheminement… Ce travail de l’ombre n’est pas toujours apprécié à sa juste valeur. Tu ne passes pas forcément à la télé, c’est délicat. Mais j’ai un agent qui est aussi là pour m’aider à mettre ces qualités en avant et j’espère qu’un manager remarquera ce dont je suis capable. Avec le staff d’Auber, on met tout en œuvre pour réussir car leur but n’est pas non plus de me garder éternellement dans l’équipe. Mais c’est surtout entre mes mains, c’est à moi de prouver.



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