Mondial - Un manque de communication chez les Françaises ?

Crédit photo Freddy GUÉRIN / DirectVelo

Crédit photo Freddy GUÉRIN / DirectVelo

Le debriefing a dû être intense au sein du bus de l’équipe de France féminines. C’est en tout cas ce que laissent deviner les mots d’Audrey Cordon-Ragot - qui, on le sait, n’hésite jamais à partager de façon transparente et honnête le fond de ses pensées - en zone mixte, à chaud, peu après l’arrivée. “Le problème, c’est qu’on ne peut pas changer de plan si proche de l’arrivée… On change de plan quand on sent que ça ne va vraiment pas et non pas lorsque j’ai déjà été chercher des coups et que je me suis mise dans le rouge à plusieurs reprises. J’avais de super jambes et j’ai été honnête sur mes sensations du jour. Mais là, on n’a clairement pas bien géré notre course. On n’a pas souvent l’occasion de courir ensemble. Je pense qu’il y a un travail de fond à faire pour savoir reconnaître quand ça va ou pas, et pouvoir aider jusqu’au bout la fille qui se sent le mieux”.

AUDREY CORDON-RAGOT S’EST SENTIE ESSEULÉE

Visiblement, la Bretonne reproche à Juliette Labous - laquelle avait été désignée fille protégée de l’équipe sur ce Championnat du Monde en Flandres - d’avoir trop tardé avant d’indiquer qu’elle n’était pas dans une bonne journée. Sans doute aurait-elle également souhaité, par conséquence, que la Franc-comtoise se sacrifie pour elle. “Sur le final, je me suis un peu sentie esseulée. J’ai fait des efforts que je n’aurais pas dû faire, du moins que j’aurais dû faire accompagnée de certaines de mes coéquipières. Le petit mètre qui me manque pour basculer avec le premier groupe dans le final se trouve là. Il ne faut pas chercher plus loin... Sur un circuit comme ça, au bout de 160 bornes, tous les efforts comptent. Il ne m’a pas manqué grand-chose, mais voilà…”.

La communication aurait donc été mauvaise au sein du groupe. Mais Audrey Cordon-Ragot tient quand même vite à relativiser et n’accable pas sa jeune compatriote. “Ce n’est pas simple, on n’a pas d’oreillettes. On n’a pas forcément l’occasion de beaucoup courir ensemble. C’est une équipe de France qui progresse d’année en année, qui se construit avec des anciennes comme moi et des plus jeunes qui arrivent et sont très talentueuses. On espère vraiment dans les prochaines années faire au mieux pour avoir une course plus solide et plus homogène”.

JULIETTE LABOUS A PRÉVENU SES COÉQUIPIÈRES

De son côté, Juliette Labous confirme qu’elle n’était effectivement pas dans une grande journée. Du moins, sur la fin de la course. Et là est peut-être toute la nuance. “J’étais plutôt bien toute une partie de la course, dans les monts. Mais j’ai senti que je n’étais vraiment pas explosive or, ce n’était que des efforts intenses de 30 secondes. Je n’arrivais pas à maintenir l’effort au-dessus de ma PMA (Puissance Maximale Aérobie, NDLR), peut-être à cause de la chaleur. Je suis déçue, ça m’a lâchée dans le final. Quand on est bien toute l’année et que ça nous lâche au Mondial, c’est forcément dur mais c’est comme ça…”. Surtout, elle ajoute avoir mis ses coéquipières au courant de ses sensations. “On avait dit qu’on verrait au fur et à mesure… J’ai dit aux filles que je n’étais pas bien. Je l’ai dit à Aude (Biannic) et à Audrey (Cordon-Ragot). C’est pour ça qu’Aude a attaqué”.

Plus que le manque de communication, c’est d’ailleurs sans doute la panne de jambes de certaines tricolores qui a posé problème lors de cette course à l’arc-en-ciel. Car outre Juliette Labous, sa compère franc-comtoise Evita Muzic n’était, elle non plus, pas dans une grande journée. “C’est sûr qu’à la fin de la course, il en manquait un peu dans les jambes... On a fait ce qu’on a pu. C’était un circuit très difficile malgré ce qu’on croyait. C’était usant. Au final, après les monts, ça ne faisait qu’attaquer. C’était vraiment dur mais cela dit, je n’avais aucune ambition personnelle”, affirme la Championne de France auprès de DirectVelo.

AUDE BIANNIC A TENTÉ SA CHANCE

Finalement, ce sont avant-tout les athlètes expérimentées qui se sont mises en évidence ce samedi. Car en plus d’Audrey Cordon-Ragot, c’est Aude Biannic qui a fait la course, s’offrant même un court mais intense baroud seule en tête sur le circuit final, avant d’être imitée par l’Espagnole Mavi Garcia. “J’ai essayé d’anticiper, je me sentais encore plutôt pas mal. Je n’étais pas non plus exceptionnelle vu que j’avais fait des efforts avant. Mais je me suis dit que sur un circuit comme ça, c’était peut-être pas mal d’anticiper si jamais il y avait une Néerlandaise qui attaquait en costaud dans une bosse. Je n’aurais pas pu suivre à la pédale donc autant avoir un coup d’avance”. C’était sans compter sur la vigilance du peloton, qui ne lui a laissé aucune marge de manœuvre, ni le temps d’espérer quoi que ce soit. “Quand je suis partie, c’était plutôt au feeling. J’ai vu que le peloton avait envie de se poser un peu. Je me suis dit que c’était le moment de tenter le tout pour le tout. Il restait encore pas mal de kilomètres mais on ne sait jamais ce qu'il peut se passer.... Le peloton aurait pu faire rideau. Et si j’avais pu avoir une Néerlandaise, une Italienne ou une Allemande avec moi, ça aurait été tout bénéfique et ça aurait pu aller plus loin. Malheureusement, ce sont les faits de course. J’ai tenté et je n’ai rien à regretter”.

Comme Audrey Cordon-Ragot, Aude Biannic considère elle aussi qu’une meilleure gestion de la course aurait été profitable aux Bleues. “J’avais plutôt un rôle de coéquipière à la base pour replacer Juliette et Audrey au pied des monts. J’avais fait quand même pas mal d’efforts au milieu de course sur le circuit flandrien. Je pense que c’est ce qui m’a coûté le fait de ne pas être là sur le circuit final et au sprint pour aider Audrey. C’est dommage qu’elle se soit retrouvée seule”. Et à Audrey Cordon-Ragot de conclure : “On a été actrices de la course. On n’a pas de regrets même si j’aurais dû basculer en tête dans le dernier tour. Le vélo n’est jamais une science exacte”.

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