FDJ : « Le potentiel est énorme » avec Cecilie Uttrup Ludwig

Crédit photo Thomas Maheux

Crédit photo Thomas Maheux

Que retenir de la campagne de Classiques printanières de Cecilie Uttrup Ludwig et de la FDJ-Nouvelle Aquitaine-Futuroscope ? Sur les six épreuves qu’elle avait cochées comme étant des objectifs, la leader de la WorldTeam tricolore a toujours pris place dans le Top 10. Jamais au-delà de la 8e place, elle n’est en revanche montée qu’une fois sur le podium, en terminant 3e du Trophée Alfredo Binda (voir sa fiche DV). Alors, faut-il se satisfaire de cette régularité ou regretter l’absence d’un gros coup ? “C’est plutôt pas mal. On est sur la bonne voie même si on s’attendait quand même à un peu mieux”, répond la Danoise.

UN SOURIRE (PARFOIS) DE FAÇADE ?

Réputée pour sa joie de vivre au départ de la majeure partie des courses, elle semble tout de même en jouer de plus en plus, jusqu’à en profiter pour rester évasive lorsqu’on l’interroge sur son ressenti après un résultat plus ou moins satisfaisant. “On s’est bien amusées (...) C’était sympa, une superbe course ! J’ai adoré ! (...) On a tenté, il fallait essayer, ça n’a pas marché mais ce sera pour la prochaine fois (...) Ce n’est pas grave, vivement la suite”, sont ainsi des expressions qui reviennent très souvent dans la bouche de l’athlète de 25 ans. Comme si cette joie de vivre et ce sourire - il est vrai très souvent agréable et même communicatif - lui servait aussi (parfois ?) de protection pour ne pas vraiment dire ce qu’elle a sur le cœur. Ou pour masquer une frustration, comme lors du dernier Championnat du Monde où elle n'avait pas souhaité s'attarder en zone mixte, pas plus au départ qu'à l'arrivée.  

Après avoir tenté le coup d’assez loin lors de Liège-Bastogne-Liège, en partant à quelques 35 kilomètres de l’arrivée avec Lucinda Brand et Ashleigh Moolman, elle a pu monter la Côte des Forges en tête avant d’être revue à 19 bornes de l’arrivée puis de se faire piéger par le quinté qui s’est finalement joué la victoire. Cette fois-ci, à l’arrivée, Cecilie Uttrup Ludwig n’était pas d’humeur à plaisanter. Ni à faire de longues phrases. “J’ai fait tout ce que j’ai pu. Parfois, on a de la chance et ça fonctionne. D’autres fois, ce n’est pas le cas. Mais il faut essayer. Et je suis contente d’avoir essayé. C’était super difficile mais c’était génial quand même. On a passé une belle journée”. Une réaction brève avec des mots choisis et qui donnent un air positif à sa pensée. Comme à son habitude. Mais cette fois-ci, le ton est sobre et le cœur n’y est pas vraiment.

DANS L’ATTENTE D’UNE PREMIÈRE TRÈS GRANDE VICTOIRE

Est-elle réellement satisfaite d’avoir tenté sans être récompensée ? Peut-elle se satisfaire de terminer respectivement 7e du Tour des Flandres, 7e de l’Amstel Gold Race, 8e de la Flèche wallonne puis 8e - encore - de Liège-Bastogne-Liège ? La Scandinave n’en dira pas plus. “Cecilie n’a pas raté une seule course, elle a été dans le Top 10 à chaque fois, avec même un podium. Le travail de fond a été fait. Le potentiel est énorme et on ne peut pas nous l’enlever. Je suis hyper positif pour la suite. Il faut simplement bosser les petites lacunes techniques et organisationnelles qu’il nous reste car on ne peut pas se contenter de ça. Et oui, pour cette campagne de Classiques, on reste sur notre faim”, répond le manager général de l’équipe, Stephen Delcourt, pour DirectVelo. Comme à son habitude, le manager veut déjà avoir un voire deux coups d’avance. Ainsi, chaque analyse qu’il réalise, et chaque conclusion qu’il en déduit, doit rapidement lui servir à construire l’avenir, à moyen comme à long terme. “Il n’y aura pas de changements profonds à opérer pour 2022, mais il faudra changer des détails, et peut-être miser sur l’apport d’une voire deux filles supplémentaires”. Avec, toujours en tête, le retour du Tour de France féminin l’an prochain, avec l’espoir de le remporter d'entrée. 

Stephen Delcourt le sait et le sent : sa leader va finir par lui apporter une très grande victoire, après avoir déjà gagné le Tour d’Émilie l’an passé, face à une concurrence moins relevée. Mais où, et quand ? Telle est la question. Alors patience. “Cecilie, c’est la cinquième mondiale aujourd’hui, en matière de capacités et de régularité. Et la différence entre la première et la huitième est infime. Je vais mettre tous les moyens humains possibles pour qu’elle en claque une belle bientôt… La porte va finir par s’ouvrir, promet le manager. Il lui faut cette première grosse victoire, et tout découlera de ça. Cette victoire, elle peut être sur le général d’un Giro. Ou ça peut être l’arc-en-ciel, directement ! Tout est possible, on ne sait pas quand ça va tomber”.

SUR GAND-WEVELGEM UNIQUEMENT POUR RENDRE LA PAREILLE AUX FILLES

Pour le moment, chaque déception, chaque frustration, doivent servir d’axe de travail. Lors du dernier Tour des Flandres, Cecilie Uttrup Ludwig et l’Italienne Marta Cavalli - la recrue de l’intersaison - se sont retrouvées à deux dans un groupe de sept, pour la deuxième place. Mais elles ont été incapables de profiter de ce binôme et ont dû se contenter des 6 et 7e places. “Elles ont échangé mais c’était un dialogue de sourd. Elles ne se sont pas vraiment comprises. Cecilie a dit à Marta qu’elle allait se sacrifier sans vraiment chercher à en savoir plus sur la forme de Marta ou aux autres possibilités. Quant à Marta, elle n’a pas osé dire qu’elle n’était pas très bien”. Une situation qui a emmené à un long débriefing au soir de la course. “On continue d’apprendre de nos erreurs. On n’est pas du tout au maximum de notre potentiel, c’est motivant pour la suite. Je suis frustré mais vu le potentiel du groupe, je ne suis pas inquiet pour le futur”, insiste Stephen Delcourt. Car ce dernier souhaite avant tout voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. “Cecilie ne se rate jamais. Malheureusement, et ça peut sembler paradoxal de le dire comme ça, elle est hyper régulière. Presque trop. Elle veut tout bien faire, tout le temps. Elle ne veut pas se louper sur la moindre course”.

Problème, l’ancienne sociétaire de la Cervélo-Bigla Pro Cycling a sans doute parfois tendance à se mettre trop de pression. Le meilleur exemple des dernières semaines ? La Flèche wallonne, où elle figurait dans le groupe de neuf qui s’est joué la victoire au pied de l’ultime ascension du Mur de Huy. “C’est un personnage. Elle est hyper joyeuse mais aussi hyper stressée. Elle n’a pas su canaliser son énergie dans le Mur de Huy. Tout était bien jusque-là et elle n’a pas su transformer l’essai”. Là encore, Cecilie Uttrup Ludwig et Stephen Delcourt ont pris le temps d’échanger et de faire le point après la Classique belge. “Elle a tenu des propos qui m’ont tout de suite rassuré”. Bien qu’il attende énormément d’elle, Stephen Delcourt veut aussi protéger sa leader en la mettant dans les meilleures conditions possibles. Et en gardant toujours le positif de chaque résultat légèrement en-deçà des attentes. “À Liège, j’ai vu qu’elle a fait peur aux filles lorsqu’elle est sortie. Elle était très forte”, tient-il à souligner en rappelant que sa leader a également demandé à être alignée sur Gand-Wevelgem dans le but unique de rendre la pareille aux autres filles de l’équipe, qui avaient travaillé dur pour elle au Binda puis aux Strade Bianche. “C’est un visage que peu de gens connaissent, mais c’est une grande qualité”. Avant de conclure : “Elle a 25 ans et déjà une régularité de malade. Le collectif se construit autour d’elle. C’est ma leader et ça le sera un moment je l'espère. Je n’ai pas de doute là-dessus, ça va finir par payer !”.

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