Kern Pharma, la jeunesse ambitieuse

Crédit photo Nicolas MABYLE / DirectVelo

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Lors du Grand Prix La Marseillaise (1.1) puis durant l’Etoile de Bessèges (2.1), ce n’est pas nécessairement une formation qui a attiré les regards. Pourtant, petit à petit, l’équipe Kern Pharma se fait une place dans le peloton professionnel et se veut particulièrement ambitieuse pour les années à venir. Fondé en 1993, le club espagnol de l'A.D. Galibier, baptisé Equipo Lizarte depuis 2006, avait décidé de lancer son équipe Continentale en 2020 après la venue d’un nouveau partenaire d’importance, Kern Pharma. Très vite, le financement - et qui pourrait encore augmenter - de cette société de laboratoires pharmaceutiques a permis de voir plus loin, et plus haut. Un an seulement après sa naissance, le collectif espagnol implanté à Pampelune, dans la région de Navarre, est (déjà) passé de la troisième à la deuxième division mondiale, alors que Lizarte est devenue sa réserve. Parmi les 38 équipes des deux premières divisions, Kern Pharma affiche la moyenne d’âge la plus basse : 22,5 ans. Sur les vingt coureurs de l’équipe, quinze ont 22 ans ou moins. Parmi eux, quelques-uns des talents les plus prometteurs de la péninsule ibérique comme Raul Garcia, le Champion d’Espagne Espoirs du chrono en 2020.
DirectVelo a profité de la présence du manager général de l’équipe, Juan-José Oroz - ancien coureur professionnel qui a notamment passé sept saisons chez Euskaltel-Euskadi - sur les routes de l’Etoile de Bessèges pour faire le point sur cette équipe Kern Pharma qui pourrait faire de plus en plus parler d’elle à l’avenir.

DirectVelo : L’équipe Kern Pharma a récemment participé au Grand Prix de la Marseillaise - 4e place pour Francisco Galvan - puis à l’Etoile de Bessèges, et il ne s’agit là que du début d’une longue série de courses en France…
Juan-José Oroz : Le calendrier français est très riche et particulièrement intéressant pour nos jeunes coureurs. Il y a plein de courses qui ne sont pas loin de la maison et dont les profils nous plaisent beaucoup, comme la Route d’Occitanie. On va accumuler les expériences en France tout au long de la saison avec plaisir. Pour façonner des Champions, il faut que les coureurs enchaînent les courses et se construisent un maximum d’expérience. C’est possible en France avec un grand nombre de courses organisées chaque année, alors on en profite.

« IL ÉTAIT LOGIQUE DE PASSER AU-DESSUS »

Parlons du projet de l’équipe Kern Pharma. L’équipe est née l’an passé et après une saison en Continentale, la voilà déjà parmi les ProTeams. Pourquoi cette évolution si rapide ?
Passer rapidement des échelons était le plan initial. On a tout de suite eu la volonté de travailler avec de jeunes talents espagnols qui sont encore, pour beaucoup, des coureurs Espoirs, en espérant vite grandir avec eux. L’idée était de construire sur les bases de ce qu’a fait l’équipe Lizarte pendant des années et finalement, on s’est vite rendu compte que les coureurs avaient le niveau pour passer au-dessus, en ProTeam, comme on l’espérait. Nous avons été l’une des toutes meilleures Conti du Monde en 2020 et il était logique de passer au-dessus. 

L’équipe Kern Pharma doit-elle servir de tremplin à certains futurs grands coureurs ou espérez-vous conserver vos meilleurs éléments sur la durée ?
On veut travailler sur la durée avec nos coureurs, en les accompagnant le plus loin possible. Le but n’est pas de les propulser ailleurs. On veut grandir avec nos coureurs et passer des paliers ensemble, c’est clair et net. On est ambitieux. Passer en ProTeam, c’est bien, mais on ne veut pas s’arrêter là. On veut continuer de s’améliorer, avec le souhait d’évoluer chaque année. On ne veut pas être un Plan B pour les coureurs. Il faut que les mecs aient envie de venir chez nous parce qu’ils sont séduits par le projet. 

Quelles sont vos ambitions à plus long terme ?
On veut devenir l’une des meilleures ProTeams du Monde. Pour cela, il va falloir que l’on obtienne des invitations et que l’on affronte les meilleurs sur quelques-unes des plus grosses courses du calendrier dès cette année (au niveau du calendrier WorldTour, l’équipe est d’ores-et-déjà invitée pour le Tour de Catalogne et espère disputer le Tour du Pays basque, la Clasica San Sebastian et le Tour d’Espagne, NDLR). Je suis persuadé que l’on va y arriver, petit à petit. Mais il va falloir faire preuve de patience, tout ça ne se fera pas en un jour. Mais si on continue comme ça, et si tout se déroule comme on l’espère, l’idée est de mettre un coureur sur le podium d’un Grand Tour d’ici quatre ans. Si on veut y arriver, il faut que l’équipe progresse et évolue en même temps que nos coureurs. Sinon, ce ne sera pas possible et ils partiront. On veut conserver nos méthodes actuelles en donnant encore et toujours une chance aux jeunes coureurs et en les accompagnant le plus longtemps possible dans leur progression. 

« ON DONNE ÉNORMÉMENT D’IMPORTANCE AUX ANNÉES ESPOIRS »

L’idée est donc avant tout de former des coureurs plutôt que de s’offrir les services de coureurs déjà expérimentés ?
Oui, même s’il faut toujours quelques coureurs d’expérience dans un groupe. Ce travail de formation et de développement commence dès les jeunes catégories, avec la Lizarte. On veut privilégier le rendement sur la longue durée, plutôt qu’un résultat brut sur une course précise. Il y a toute une phase de construction dans l’évolution de l’athlète, et c’est ce qui nous intéresse. Les résultats ne doivent être qu’une conséquence du travail de fond effectué avec les athlètes. C’est ce que l’on est déjà en train de faire avec des garçons comme Roger Adria, Urko Berrade, Jaime Castrillo et plein d’autres. On espère garder ces garçons-là le plus longtemps possible et les voir atteindre le plus haut niveau possible avec nous, c’est un rêve. 

Ce travail sur les jeunes prometteurs est poussé à l’extrême puisque les trois quarts des coureurs de l’équipe n’ont pas plus de 22 ans !
Ici à Bessèges, on a emmené un garçon comme Raul Garcia, qui n’a encore que 19 ans. L’équipe a 22 ans et demi de moyenne d’âge, c’est l’équipe la plus jeune des deux premières divisions mondiales. On donne énormément d’importance aux années Espoirs. C’est un passage clé dans la carrière d’un coureur, pour son développement personnel et pour tout le reste de sa carrière tout court. C’est un travail qui nous plaît avec Pablo (Urtasun, directeur sportif de l’équipe à Bessèges et qui fut son coéquipier chez Kaiku puis chez Euskaltel, NDLR). 

L’équipe réserve, Lizarte, devient-elle une sorte de passage obligé avant d’espérer rejoindre Kern Pharma, pour ces jeunes coureurs ?
Pas toujours. Bien sûr, on surveille de très près les coureurs de Lizarte, mais on ne ferme pas la porte aux autres, certainement pas. Cet hiver, on a par exemple fait venir un jeune russe de 21 ans, Savva Novikov (en provenance de la CCC Development Team, NDLR). On garde les yeux grands ouverts sur tous les talents, d’où qu’ils viennent. Pas que chez Lizarte, et pas qu’Espagnols. L’idéal est quand même d’avoir des coureurs qui passent d’abord par Lizarte, on en aura sûrement un bon nombre à terme. Mais ce n’est pas une obligation, il ne faut pas s’imposer ce genre de normes.

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