Des Espoirs français « increvables » à Bessans

Crédit photo Nicolas Gachet et Aurélien Regnoult - DirectVelo

Crédit photo Nicolas Gachet et Aurélien Regnoult - DirectVelo

Julien Jamot a retrouvé en début de semaine la Haute-Maurienne. Le coureur du VC Rouen 76 était déjà venu lors d’un stage de l'Équipe de France Espoirs en septembre dernier. “On est quasiment à côté de l’endroit où on était la dernière fois. Ce n’est pas le même décor avec la neige mais ça reste très sympa !”, savoure le Normand. Venus sans leur vélo, les tricolores ont pris leur quartier lundi soir à la Bessannaise, un grand bâtiment construit sur la route du col de l’Iseran. Covid oblige, l’endroit a rouvert ses portes… lundi. À cette période de l’année, la Bessannaise devrait faire le plein. Mais la clientèle est rare. La majeure partie des lieux est occupée par les Équipes de France, VTT et Espoirs Hommes.

« PAS UNE SÉLECTION AU RABAIS »

Pierre-Yves Chatelon a choisi de faire tourner l’effectif pour découvrir de nouveaux coureurs. Théo Nonnez et Jacques Lebreton, présents au stage de pré-saison l’an passé, n’ont par exemple pas été convoqués. Parmi les douze coureurs retenus, neuf garçons portent pour la première fois le maillot des tricolores chez les Espoirs. “J’ai pris des coureurs qui ont pu s’exprimer un peu en 2020, indique à DirectVelo le sélectionneur national. Thomas Delphis est Champion de France Espoirs, ça vaut quand même une sélection”. Privé de courses en 2020 excepté pour le Tour du Doubs, il savoure de retrouver deux kinés habitués à travailler avec lui, Simon Beaufils et Antoine Relave. “Ça fait du bien de se retrouver. Tu n'as pas le même contact humain lors des visio”. Le coach n’a eu aucun mal à faire venir les coureurs pour ce rendez-vous devenu rare dans le cyclisme. “Je n’ai pas rencontré de clubs réfractaires. Ce rassemblement à la neige est bien accueilli. Les coureurs ne la prennent pas comme une sélection au rabais”.

La semaine a commencé lundi soir par un briefing du sélectionneur. Pour l’une des rares fois de la semaine -excepté lors des entretiens individuels-, il leur a parlé de vélo. “Je leur ai dit qu’ils ne doivent rien s’interdire. Un grimpeur, s’il veut faire le Tour des Flandres, il peut le faire savoir. J’ai cité le cas d’Aurélien Paret-Peintre qui avait fait le Tour des Flandres alors que ce n’était pas son registre. On est aussi là pour ça. On doit permettre aux coureurs d’arriver chez les pros avec un vécu, un bagage… ”. Pour lancer la semaine, il leur donne également le programme, bien chargé, des jours à venir. À Bessans, les Bleus ne sont pas en vacances.

« ILS COMPENSENT PAR LEUR PHYSIQUE »

Mardi et mercredi, ski de fond et un peu de biathlon étaient au menu en bi-quotidien. La moitié du groupe a découvert le ski de fond à cette occasion. Alors forcément, le niveau était très hétérogène en raison de la présence d’un pratiquant assidu, Alex Baudin. “L’hiver, j’en fais deux fois par semaine, ça permet de changer du vélo”, indique le Savoyard. Malgré la différence de niveau avec ses collègues, il ne s’ennuie pas. “Je fais des allers-retours. J’essaie de donner des conseils mais ce n’est pas facile de transmettre. Les moniteurs doivent avoir des méthodes !”. Les tricolores sont accompagnés jusqu’à leur départ ce vendredi après-midi par Mickaël, moniteur diplômé de la Bessanaise. “En ski de fond, le fait de bosser avec un moniteur, c’est surtout pour éviter une blessure sur une chute un peu bête. Il leur a expliqué les fondamentaux”, fait savoir Pierre-Yves Chatelon.

Les chutes ont été inévitables, les galères pour mettre les skis également. “Il y en a un gauche et un droit ou c'est pareil ?”, s'interroge Hugo Toumire le premier jour, l’un des coureurs qui découvrait l’exercice. L'entraîneur national, présent sur les skis avec les coureurs, scrute les progressions de chacun. “Florian Dauphin est parti de loin mais on voit qu’il progresse”. Le coureur du VC Pays de Loudéac est conscient de ses limites. “Je vais peut-être déjà y aller moi pour prendre un peu d’avance”, se marre-t-il en sortant le premier de la Bessannaise, alors que les Bleus doivent rejoindre à ski le stade international de Bessans, situé un peu plus bas. Autre néophyte, Julien Jamot. “Une fois que tu as compris la technique, c’est sympa. Au début, on ne se fait pas plaisir puis à la fin oui. On ne peut pas rivaliser avec Alex (Baudin), mais on s'amuse bien, notamment avec Valentin (Paret-Peintre) qui est dans mes cordes”. Bien que né au pied des Alpes, le coureur du Chambéry CF ne se montre pas toujours à l’aise sur les pistes mauriennaises. “Quand j’étais petit, il fallait que mes parents emmènent mon frère (Aurélien) sur les cyclo-cross au lieu d’aller au ski le week-end. C’est pour ça...”, sourit-il. Pierre-Yves Chatelon reconnaît être chaque année bluffé par la volonté des garçons qui débutent pourtant sur les pistes. “L’avantage, c’est qu’ils ont la caisse. Ils compensent par leur physique. Ils sont increvables les mecs”, observe-t-il.

« AVIDES DE CONSEILS EXTÉRIEURS »

Même sur les skis, ils restent des compétiteurs. Avant de partir sur les pistes, certains organisent des départs en mode compétition pour voir le plus explosif du lot. Et n’oublient pas de se chambrer sur les performances des copains, notamment quand l’un d’eux tape le toit du stade de Biathlon plutôt que la cible située plus d’un mètre plus bas. Pendant l’exercice, “avec les mêmes carabines qu’en compétition”, leur guide les abreuve de conseils et d’informations sur la discipline que chacun ne connaissait qu’à travers les écrans de télévision. Malgré le froid (-9°C mercredi après-midi) et la fatigue, les Bleus savourent chaque moment, n’hésitant pas à faire du rab sur les skis.

Changement de discipline ce jeudi avec une randonnée en raquettes de cinq heures, avec un pique-nique près des sources de l’Arc. Entre les activités, les tricolores ont également travaillé en intérieur. Mercredi, ils ont fait un réveil musculaire à jeun, “typé yoga avec un peu d’équilibre”, pendant une grosse demi-heure. “Le but est de montrer aux coureurs des exercices qu’ils peuvent intégrer facilement avant une séance”, fait savoir le kiné Antoine Relave. Ce jeudi soir, c’était yoga avec des étirements de la chaîne musculaire. “C’est nouveau pour les coureurs. Cela peut leur apporter pas mal de choses. Ils pourront reproduire les exercices chez eux”. Ils ont également travaillé en individuel avec les kinés. “L’idée est d’avoir une base de données assez générale et aussi spécifique en kiné. On la complète au fil des années, ça permet de voir l’évolution des coureurs. On fait avec eux des bilans articulaires, musculaires, de résistance, de force, et de saut pour voir comment leur corps réagit. Et derrière, l’idée est de leur donner deux-trois pistes pour travailler chez eux pendant la saison”. Les coureurs se montrent très demandeurs, notamment au niveau nutritionnel. “On va essayer de se pencher sur le sujet avec les personnes adéquates. Ils sont avides de conseils extérieurs”, apprécie Antoine Relave. Staff et coureurs espèrent se retrouver un peu plus tard, cette fois-ci, sur les compétitions. “On fait comme si la saison allait se dérouler normalement. Je suis de nature optimiste”, reconnaît Pierre-Yves Chatelon.



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