AG2R La Mondiale veut « des jeunes qui bousculent la hiérarchie »

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Ce week-end, sur les routes du Tour de l’Ain, la formation AG2R La Mondiale comptait en ses rangs plusieurs jeunes grimpeurs amenés à incarner le futur de l’équipe WorldTour dans les grandes courses par étapes du calendrier international à partir de 2021, alors que Pierre Latour va quitter l’équipe et que Romain Bardet pourrait bien suivre le même chemin. Lors de cette course de trois jours, Clément Champoussin, Jaakko Hänninen ou encore Aurélien Paret-Peintre étaient aiguillés par Julien Jurdie, directeur sportif du groupe pour l’occasion. Après avoir pris la température avec ces coureurs censés représenter la nouvelle génération des “terre-et-ciel” (lire ici), DirectVelo a demandé à Julien Jurdie ce que le staff technique d’AG2R La Mondiale, future AG2R-Citroën, attendait de ces différents coureurs à court, moyen et long terme. Entretien.

DirectVelo : L’équipe AG2R La Mondiale avait fait le choix d’emmener un groupe relativement jeune sur ce Tour de l’Ain. Quel bilan tires-tu de ces trois jours de course ?
Julien Jurdie : C’était très moyen. Pour être honnête, on s’attendait à mieux que ça, même si Jaakko (Hänninen) a défendu crânement ses chances jusqu’au bout. C’est la seule petite satisfaction de ce séjour dans l’Ain, même si on savait que ce serait difficile face à une concurrence très relevée.

Clément Champoussin et Aurélien Paret-Peintre ne sont pas allés au bout de l’épreuve ce dimanche...
La chaleur a mis ces deux coureurs en difficulté. Ils en avaient déjà souffert la veille et ça a été encore plus vrai ce dimanche. Cela dit, la chaleur était la même pour tout le monde. Désormais, c’est à nous d’analyser pourquoi ça les a perturbés à ce point. La seule chose de sûre à l’instant-T, c’est qu’ils n’avaient aucune sensation parce qu’ils ont pris un coup de chaud.

Ces deux coureurs, au même titre que Jaakko Hänninen, représentent l’avenir de l’équipe. Qu’attendez-vous d’eux dans les mois et les années à venir ?
C’est une bonne question car on voit bien que depuis quelques années, de jeunes talents explosent très jeunes. Je pense à un Remco Evenepoel qui crève l’écran ou à un Tadej Pogacar. Mais il y en a d’autres que j’oublie, bien sûr. Les coureurs sont devenus très performants très jeunes, ils sont plus précoces qu’avant. Pour ce qui est de nos trois coureurs cités ici, malgré tout, on reste dans une phase de découverte, même si on essaie d’accentuer l’aspect performance petit à petit. On sait qu’ils ont les capacités pour faire des résultats à terme. Disons quand même qu’en 2020, ça reste de l’apprentissage et de la découverte. C’était le cas ce week-end sur le Tour de l’Ain. Je pense que c’était une bonne expérience pour chacun des trois, même si ça ne restera pas dans leur mémoire en terme de résultat et de sensations. Ils savent que ça fait partie de l’apprentissage. Ce qui est sûr, c’est qu’à terme, on attend beaucoup d’eux.

« LES ANNÉES PASSENT TRÈS VITE »

Le cheminement, en terme de progression et d’attentes, est-il toujours le même pour ce type de grimpeurs, spécialistes de courses par étapes ?
Non, c’est du cas par cas. On ne veut surtout pas rester les deux pieds dans le même sabot. Comme je le disais précédemment, les jeunes sont précoces et on sent que la nouvelle génération prend de plus en plus de place dans le peloton international. Dans ces conditions, nos jeunes se doivent d’être performants, eux aussi. La progression doit être linéaire mais également rapide. C’est la raison pour laquelle un garçon comme Aurélien (Paret-Peintre) va disputer le prochain Critérium du Dauphiné et qu’il fait partie des coureurs susceptibles de disputer le Tour de France. Même s’il ne fait pas le Tour, il se prépare mentalement à cette possibilité et il est en train de connaître le même type de préparation que ceux qui feront le Tour, via des stages notamment. C’est un test. C’est l’occasion de lui montrer que l’équipe a déjà confiance en lui.

Que dis-tu à ces coureurs, que l’on sent à la fois ambitieux et prudents ?
Qu’on a confiance en eux mais que les années passent très vite. Il ne doivent pas hésiter à bousculer la hiérarchie établie s’ils le peuvent. On veut des jeunes avec du mordant.

Aurélien Paret-Peintre va-t-il découvrir le Tour de France cette année ?
Il a réalisé un début de saison très intéressant même s’il a été coupé dans son élan par le covid. Il avait deux courses pour se montrer afin d’espérer être sur le Tour de France : le Tour de l’Ain puis le Critérium du Dauphiné. On fera la sélection à l’issue du Dauphiné. On sent bien qu’il a des qualités. Il récupère très bien et on voulait lui faire potentiellement découvrir le Dauphiné et le Tour cette année, mais il n’a aucune garantie pour le Tour à l’instant-T.

« ON ESPÈRE QUE LA SAISON 2021 SERA DÉJÀ DE BONNE FACTURE POUR EUX »

Il est annoncé que l’équipe va s’orienter vers la chasse aux Classiques l’an prochain, et le recrutement semble aller dans ce sens. L’équipe AG2R La Mondiale continuera-t-elle malgré tout de faire des Grands Tours et des courses par étapes d’une semaine une priorité en 2021 ?
Bien sûr, c’est dans l’ADN de l’équipe. Depuis vingt ans, les courses par étapes sont très importantes pour notre collectif. On veut continuer dans cette direction. Et si Romain (Bardet) est amené à quitter le groupe, on se devra de se tourner vers la jeunesse pour former de futurs grands talents. C’est le but. On veut continuer d’être bons sur les Grands Tours et on espère que Clément, Aurélien et Jaakko, notamment, seront parmi les meilleurs du peloton à l’horizon 2021, 2022 ou 2023.

Pour que ces coureurs figurent parmi les meilleurs mondiaux à l’avenir, outre leurs qualités physiques, il doivent développer leur force mentale. Comment travaillez-vous cet aspect et combien de temps faut-il au staff de l’équipe pour savoir si le coureur a les capacités pour devenir un grand leader ?
Clément (Champoussin) est un très bon exemple pour répondre à cette question. Il est issu du VTT et il n’a pas une culture de routier, à la base. Les qualités physiques sont là, c’est évident. Mais comme je lui ai justement dit pendant ce Tour de l’Ain, le mental joue beaucoup également. Au niveau du physique, tout le monde est au top maintenant. Dans toutes les équipes, ça travaille très bien. La différence se fait donc sur le mental. On verra, au fil des courses, s’il a le mental pour performer. J’espère qu’il y arrivera. Pour l’instant, il reste du travail et on ne peut pas savoir ce qu'il en sera à l'avenir. 

L'un de ces coureurs peut-il suivre les traces d'un Romain Bardet ?
Ils ont tous les trois l'archétype pour les courses par étapes. C’est maintenant à eux de bien travailler, et à nous de suivre le bon chemin dans notre façon de les guider. On espère qu’ils répondront présent en 2021 mais on sait qu’ils atteindront sûrement un très haut niveau plus tard, en 2022 voire en 2023 pour certains. On espère que la saison 2021 sera déjà de bonne facture pour eux, mais nous n’avons pas la garantie qu’il n’y ait pas un petit trou d’air, sur les plus grosses courses, au niveau des classements généraux pour l’équipe l’an prochain.

En lien avec cet article : AG2R La Mondiale : La nouvelle génération prête à prendre le relais ? (lire ici).  

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