Le cyclisme amateur veut être raisonnable

Crédit photo Nicolas Gachet - DirectVelo

Crédit photo Nicolas Gachet - DirectVelo

C’était une annonce forte de Michel Callot, président de la Fédération Française de Cyclisme, alors que débutait le confinement. La prolongation de la saison jusqu’au 29 novembre avait pour but de favoriser les “reports de course pour proposer le plus d'activités possible aux licenciés” (lire ici). Depuis, les annulations se sont accumulées et les candidats à un report sont peu nombreux. Selon nos informations, personne ne postule aujourd’hui pour organiser sa course en novembre. La saison devrait donc se terminer fin octobre avec les Championnats régionaux. La non-prolongation de la saison en novembre n'attristera pas les acteurs du cyclisme amateur interrogés par DirectVelo quand elle sera confirmée. 

« IL Y AURA UNE COUPURE À RESPECTER »

“Il faudrait faire une fin de saison comme les autres années, sans aller plus loin dans les dates, lance Dylan Kowalski, actuel 2e du Challenge BBB-DirectVelo. Je n’ai pas envie de compenser en allant courir en novembre ou en décembre. Et pourtant, je serais le premier à y trouver un intérêt pour espérer repasser pro. J’ai envie de courir, de gagner des courses, de me montrer… Bien sûr, mais il faut aussi savoir rester raisonnable. L’air de rien, on est prêt depuis novembre dernier. Et maintenant, on continue de dépenser de l’énergie et de l'influx nerveux à la maison, ou sur le home trainer. On ne peut pas pousser la saison jusqu’à fin novembre”.

La peur de beaucoup est de fausser la préparation de la saison 2021. “Il y aura une coupure à respecter, ce ne serait pas très raisonnable. Il faut un temps pour tout”, estime Jean-Philippe Yon. Le directeur sportif du VC Rouen 76 met également en avant d’autres arguments. “Chez nous, en Normandie, la météo n’est pas clémente pour courir en novembre. Puis c’est la période des cyclo-crossmen. Il faut leur laisser la place”.

« ON NE POURRA PAS TOUT SAUVER »

Comme tous, il comprend que “la fédération souhaite pallier au mieux l’absence actuelle de courses”. Une instance qui subit un manque à gagner financier à chaque nouvelle annulation. “Personnellement, j’ai toujours fait des saisons complètes, jusqu’au bout, rappelle Clément Carisey. Mais il ne faudra pas forcément chercher à aller le plus loin possible pour dire de sauver la saison. De toute façon, une partie de cette saison est définitivement perdue. Il faut aussi penser à l’après, à 2021”. 

Pour l’actuel leader du Challenge BBB-DirectVelo, il faudrait reporter “les plus belles courses, les plus importantes, mais pas forcément d’autres. Reporter, oui, mais sans abuser”. Un discours que tient également Dylan Kowalski. “On prendra ce qu’il y a à prendre, tant que les dates sont raisonnables, reconnaît le coureur de Côtes d’Armor-Marie Morin-Véranda Rideau. Je suis le premier à me satisfaire du report de certaines grosses courses. Je pense que c’est une bonne chose, mais limitons-nous peut-être aux plus grosses courses. On ne pourra pas tout sauver et rattraper, il faut l’accepter, même si ce n’est pas facile”.

Quelle importance faudra-t-il donner aux courses alors que la saison aura été largement tronquée ? “Si ça reprend, il y aura un très fort engouement, estime Jean-Philippe Yon. Les courses seront très disputées. Habituellement, les pelotons maigrissent l’été mais ça ne sera pas le cas cette saison. Les victoires auront de la valeur”. Pour Clément Carisey, une course décalée n’aura pas forcément la même saveur. “Je me demande à quoi ressemblerait un GP de Vougy sans le week-end de Pâques qui va avec. Ce ne sera pas la même chose, pense le coureur du Team Pro Immo Nicolas Roux. D’un autre côté, une course reste une course et il y aura toujours des coureurs motivés pour les gagner. Je me demande quand même quelle saveur et quelle valeur auraient certaines victoires à une autre période de l’année. Ce sera particulier”. 

« SI ON REPREND, JE CRAINS QUE ÇA NE RESSEMBLE À RIEN »

Certains s’interrogent sur l'intérêt de reprendre coûte que coûte alors que les interrogations sont encore nombreuses et que des structures vont souffrir financièrement. “Si on reprend, je crains que ça ne ressemble à rien, lâche Jean-Michel Bourgouin. Il n’y a pas de vaccin. Il y aura des problèmes de transports. Est-ce que les gens auront envie d’aller faire signaleurs ? Aura-t-on des secouristes ? On va reprendre pour combien de temps ? Les questions sont multiples et la situation ne reviendra pas à la normale en quelques mois. C’est juste du réalisme. Parfois, je me dis qu’il vaudrait mieux ne repartir qu’en 2021. Il y a trop d'incertitudes. J’imagine mal qu’on ait une fin de saison”.

Depuis le début du confinement, le manager de l’AVC Aix-en-Provence a surtout tenu à rassurer ses coureurs. “On souhaite garder le groupe dans sa totalité l'an prochain. Nous maintenons les conditions de chacun de nos coureurs pour la saison, c'est aussi important pour les garçons que pour le club”. Imaginant mal une reprise, il a notamment dit à ses garçons de penser à 2021 et de se trouver un “petit job” d’ici-là. “Ils doivent se sentir bien et se projeter dès à présent sur la saison prochaine et cela, même si nous reprenons les courses en août ou en septembre”. Un discours tenu par plusieurs acteurs du cyclisme mais souvent hors micro. “Il n’est pas évident de s’exprimer sur un sujet si délicat, reconnaît Dylan Kowalski. On vit une situation folle”. 

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