Les Juniors français doublement dans le doute

Crédit photo Hervé Dancerelle / DirectVelo

Crédit photo Hervé Dancerelle / DirectVelo

Il est souvent dit que les deux saisons passées dans les rangs Juniors sont les plus belles d’une carrière. Celles d’une jeunesse aussi fougueuse qu’ambitieuse. Celle d’une période durant laquelle on fait du vélo pour s’amuser et se tirer la bourre avec les copains, tout en ayant des rêves plein la tête. Meilleur Junior 1ère année du Challenge Morphologics-DirectVelo l’an passé, Clément Lecerf abordait l’exercice 2020 plein d’ambitions. Mais, comme tous les autres coureurs du peloton, il a vite dû ranger son vélo au garage pour une période indéterminée, la faute à l’actuelle épidémie de coronavirus qui touche très durement la France et de très nombreux autres pays. On ne pourra jamais savoir ce que le début de saison aurait donné. C’est frustrant de se préparer tout l’hiver pour ensuite se retrouver coincé. Il faudra pratiquement tout reprendre à zéro lors de la reprise des courses même si avoir quatre jours de course dans les jambes, ça peut toujours servir un minimum. Mais bon… C’est comme ça, on ne va pas se plaindre”, synthétise l’Aquitain. Il est rejoint dans ses propos par son dauphin au Challenge Morphologics-DirectVelo J1 2019 ; Bastien Tronchon. “Je ne panique pas trop en me disant que c’est pareil pour tout le monde. De toute façon, on ne peut rien y faire. Je laisse couler et on verra bien pour la suite”.

« NE PAS TROP EN FAIRE SINON, ON PEUT VITE S'ÉNERVER »

Le quotidien de ces lycéens est nettement perturbé puisqu’outre l’impossibilité de rouler en extérieur, ils ne se rendent également plus à l’école. Alors, à quoi ressemblent les journées d’un athlète de 18 ans à l’heure actuelle ?Les profs nous ont envoyé des exercices à faire. Pour le reste, avec Van Rysel, on a mis pas mal de choses en place comme des conférences vidéo. J’ai par exemple pu échanger avec l’ancien pro Thomas Damuseau et lui poser des questions, notamment sur son expérience professionnelle dans une équipe étrangère. C’était intéressant. On nous a aussi envoyé des circuits d’entraînements sans trop de matériel, pour le gainage par exemple ou pour le réveil musculaire avant le petit-déjeuner. Et pour le reste, il y a Netflix !”, se marre Baptiste Vadic. Le résident de Guéret (Creuse), adepte de cyclo-cross, tente de relativiser la situation actuelle. “On devrait passer beaucoup de temps sans compétition, ça fait bizarre. Mais je suis vraiment content d’avoir pu faire la saison de cyclo-cross… Au moins, j’ai pu courir durant l’hiver, c’est déjà ça de pris”.

Clément Lecerf essaie lui aussi de s’adapter, pour le sport comme pour les études. “Le matin, je bosse mes cours. On est régulièrement en contacts avec les profs. Côté sport, je fais principalement du renforcement musculaire. Mon entraîneur me dit quoi faire”, confirme celui qui habite à Agen (Lot-et-Garonne) et précise avoir coupé une semaine au début du confinement. Il faut dire que le garçon n’est pas spécialement fan du home-trainer. “Durant la saison, j’ai l’habitude d’en faire une heure de temps en temps, en rentrant des cours. Mais là, ne faire que ça… Ce n’est pas évident. Il ne faut pas trop en faire sinon, on peut vite s’énerver et se lasser. Ou alors via des séances très courtes avec du spécifique”. Son de cloche relativement identique pour Bastien Tronchon. “Tant que j’ai pu le faire, j’ai roulé en extérieur puis j’ai décidé de couper dix jours. Je me suis concentré sur de la course à pied et j’ai pu faire deux-trois séances de VTT. Maintenant, je me concentre sur du renforcement musculaire. Le home-trainer, c’est super light : trente minutes tous les deux jours. Ce n’est pas ce qui me passionne. Le bloc foncier est déjà fait. Je préfère garder du jus et de la motivation pour la fin de saison”.

« IL Y AURA UNE GROSSE PRESSION POUR CHAQUE COUREUR »

De son côté, Baptiste Vadic essaie de s’organiser à distance avec des amis pour se faire un minimum plaisir sur rouleau. “On peut faire des courses sur les différentes plateformes : il y a de quoi bien transpirer. C’est quand même compliqué de trouver la motivation alors faire des courses virtuelles, ça aide un peu”. La motivation, il faut aussi la chercher au niveau scolaire, alors que nul ne sait quand aura lieu le retour sur les bancs de l’école, ni si les épreuves du Baccalauréat pourront se tenir convenablement. “On ne sait pas s’il y aura un report des épreuves ou autre… C’est flou. Peut-être que les notes obtenues toute l’année vont compter seules, comme si on était en contrôle continu. J’essaie quand même de bosser mes cours trois-quatre heures par jour en ce moment, quoi qu’il arrive. On a un programme à tenir, ce ne sont pas des vacances”, souligne Bastien Tronchon, le licencié de la Motte-Servolex Cyclisme.

Bien qu’il soit difficile de se projeter sur les semaines et les mois à venir, les Juniors français se demandent tout de même à quoi ressemblera la suite de l’année et de leur saison cycliste. “Forcément, c’est une année importante pour se montrer et intégrer une bonne DN l’an prochain, donc c’est compliqué de vivre ça. Ce sera bizarre en Équipe de France aussi, je pense. Il n’y aura pas beaucoup de courses pour aller gagner une sélection”, tient à rappeler Baptiste Vadic. “La fin de saison sera spéciale. Il y aura une grosse pression pour chaque coureur ; pour les sélections nationales, pour trouver une N1 pour l’an prochain… Le niveau sera très homogène, tout le monde sera en forme en même temps. Ce sera tendu”, imagine Bastien Tronchon. Difficile en revanche d'imaginer une fin de saison décalée pour Clément Lecerf. “Je n’ai pas spécialement envie de courir jusqu’en novembre. Il y aura aussi une saison 2021 et un passage en Élites à préparer. Ce ne serait pas raisonnable”.

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