Entre “critérium” et prestige, la Course by le Tour divise

Crédit photo Thomas Maheux

Crédit photo Thomas Maheux

C’est ce que l’on appelle mettre un véritable coup de pied dans la fourmilière. Annemiek Van Vleuten n’a pas mâché ses mots. La toute nouvelle Championne du Monde sur route, sacrée dans le Yorkshire après un numéro en solitaire de cent kilomètres le mois dernier (lire ici), s’est dite très déçue d’apprendre que la 7e édition de la Course by le Tour retrouverait les rues parisiennes et la célèbre avenue des Champs-Elysées en 2020, pour une arrivée identique à celle des hommes, lesquels boucleront le même jour leur Tour de France. “C’est un pas en arrière. On retrouve une version de la Course by le Tour qui n’est rien de plus qu’un critérium, déclare l’ancienne double lauréate de l’épreuve. C’est considéré comme une course WorldTour, mais chez les hommes, je ne crois pas qu’il y ait de critérium dans le calendrier WorldTour”, a-t-elle lâché auprès du média néerlandais NOS.

Qu’en pense-t-on du côté des Françaises ? “Je suis plutôt contente. Pour moi, disputer cette course sur les Champs-Elysées est quelque chose de mythique, sur la plus belle avenue du Monde. On peut vraiment profiter de la médiatisation de l’événement. Lorsque c’était au coeur du Tour de France, toute la lumière était sur les hommes, et on ne parlait pas beaucoup de nous, résume Audrey Cordon-Ragot pour DirectVelo. La sociétaire de la Trek-Segafredo garde de très bons souvenirs des éditions qu’elle a disputées dans la capitale française. "C’est plus détendu que les autres étapes du Tour pour les hommes et du coup, ça l’est même pour nous. Il y a plus de monde sur ce circuit. C’est plus condensé, et j'adore ! C’est une superbe image du cyclisme féminin, et une superbe image de la France”.

« IL EN FAUT POUR TOUT LE MONDE »

Aude Biannic, qui évoque elle aussi “un lieu mythique” en citant les Champs-Elysées, partage l’avis de sa compatriote. “J’avais disputé les premières éditions à Paris, et ça m’avait plu. Il y a plus de spectateurs, l’ambiance est meilleure que sur n’importe quelle autre étape du Tour. C’est aussi plus symbolique. On va beaucoup plus parler de nous, en comparaison avec les éditions de la Course by le Tour en semaine”. Les deux compétitrices sont donc heureuses de ce retour sur les pavés des Champs-Elysées, et ce n’est certainement pas la sprinteuse francilienne Roxane Fournier qui va les contredire. Lors des trois premières éditions disputées à Paris, celle qui portera en 2020 le maillot de la nouvelle formation Casa Dorada WC avait respectivement terminé 10e, 11e et 5e. Avant de faire l’impasse sur les trois versions montagneuses des années suivantes. “C’est bien d’y retourner, après trois ans en montagne. Et puis, rouler sur les Champs, c’est quelque chose de marquant dans une carrière ! Je vois des gens dire que c’est un retour en arrière, une régression, et une formule version critérium. Mais il en faut pour les grimpeuses comme pour les autres, c’est le jeu”

Fait-elle ici référence aux propos d’Annemiek Van Vleuten ? “Pas du tout, je ne savais même pas qu’elle avait dit ça, mais j’ai lu pas mal de commentaires de ce type sur les réseaux sociaux”, tient-elle à préciser auprès de DirectVelo lorsqu’on lui rapporte les dires de la Néerlandaise. “Je comprends qu’elle ne soit pas contente, car elle préfère la montagne. Mais il en faut pour tout le monde. On a le droit d’avoir notre chance, nous aussi”. Aude Biannic tient à appuyer les propos de son ancienne coéquipière. “Il y a eu trois éditions pour les grimpeuses. Elles ont eu plusieurs chances de gagner. Il faut que ça tourne, comme sur les Championnats du Monde. Tout cela me semble juste et normal. Toutes les filles doivent pouvoir espérer jouer la victoire une année ou une autre”.

« ON NE DEMANDE PAS QUELQUE CHOSE DE MONSTRUEUX »

Roxane Fournier tient d’ailleurs à rappeler que, selon elle, le nombre de filles qui peuvent espérer l’emporter à Paris est bien plus important que lorsque la Course by le Tour se terminait en haut de l’Izoard, ou au Grand-Bornand. Deux éditions d’ailleurs remportées par… Annemiek Van Vleuten. “Les premières éditions sur les Champs étaient animées. Il peut se passer pas mal de choses, même si le sprint est fortement envisagé. Dans une étape de montagne, tout se joue dans la dernière montée et il n’y a que cinq ou six filles qui peuvent espérer gagner. C’est plus ouvert à Paris”.

Audrey Cordon-Ragot conclut avec son franc-parler habituel, et propose d’aller plus loin à l’avenir, histoire de satisfaire l’ensemble du peloton féminin. “Le vrai problème, c’est de n’avoir qu’un seul jour de course. Sur deux-trois jours, il y en aurait pour tout le monde. Quand je vois le parcours du Tour de France 2020, je me dis qu’on aurait pu faire les trois dernières étapes. Il y avait une étape de montagne, un chrono, et les Champs-Elysées pour les sprinteuses". Une sorte de version féminine du disparu Critérium International, en quelque sorte ? "Exactement ! On ne demande pas quelque chose de monstrueux à ASO, c’est largement faisable”. Les débats ne font peut-être que commencer.

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