On a retrouvé : Anthony Saux

Crédit photo Régis Garnier - www.velofotopro.com

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Hasard du calendrier, Anthony Saux fête ses 27 ans ce jeudi, au moment même où DirectVelo a décidé de prendre de ses nouvelles. L’ancien sociétaire de l’UC Nantes Atlantique et de Côtes d’Armor-Marie Morin a pris sa retraite sportive il y a maintenant quatre ans, après sa dernière année chez les Espoirs, comme il l’avait toujours imaginé. “C’était déjà clair pour moi en sortant des Juniors : je me donnais quatre ans pour faire carrière, ou pour passer à autre chose”. Anthony Saux, qui est désormais installé à Vannes (Morbihan), nous parle de sa nouvelle vie et des liens qu’il a toujours conservés avec le monde du cyclisme.

DirectVelo : Que deviens-tu, quatre ans après l’arrêt de ta carrière cycliste ?
Anthony Saux : C’est marrant que vous m’appeliez aujourd’hui (jeudi) et que vous décidiez de me consacrer un papier car c’est le jour de mon anniversaire (sourires). Tout va bien pour moi. Je travaille avec mon père depuis trois ans, dans une entreprise de constructions de piscines. Il y a pas mal de choses à gérer, sur le terrain comme à côté, avec le suivi des dossiers, les différentes réunions etc. Il faut aussi se coordonner avec les différentes entreprises qui sont sur les chantiers. A l’origine, je ne connaissais rien à ce secteur, mais j’ai passé un brevet professionnel des métiers de la piscine et j’ai vite accroché. Je n’ai pas le temps de m’ennuyer et je suis heureux de ce que je fais. Et puis, j’ai également d’autres activités.

C’est-à-dire ?
Je place mes billes dans l’immobilier. J’achète, je rénove et je revends. C’est de la création, quelque part, du développement... Et ça me plaît. J’ai besoin d’avoir des projets. Je suis épanoui dans ces deux domaines-là, alors vivement la suite.

« IL Y A PEU D'ÉLUS »

Lorsque tu étais coureur, tu avais déjà fait le choix de privilégier tes études et l’obtention de ton BTS, notamment…
J’ai passé mon diplôme en Espoirs 3, de mémoire. Les études ont toujours été une priorité pour moi. Le cyclisme reste un milieu précaire et même si l’on marche plutôt bien, on est loin d’avoir la garantie de passer professionnel, et encore moins la garantie de faire véritablement carrière par la suite. Dans ces conditions, j’ai toujours trouvé plus raisonnable de me consacrer aux études. Cela dit, j’étais très impliqué et appliqué dans ma pratique du cyclisme en parallèle. Je n’ai pas non plus sacrifié le vélo pour les études.

Comprends-tu ceux qui, à l’inverse, sacrifient leurs études pour le cyclisme ?
Au-delà de ce seul sujet, je dois déjà préciser que je suis de nature à comprendre tout le monde. Pour moi, tout est défendable s’il y a des explications rationnelles derrière. Nous sommes tous différents et heureusement. Ce que je dis simplement, c’est qu’il y a peu d’élus dans le cyclisme et dans le sport en général. Pour faire carrière, il ne s’agit pas d’avoir des qualités et de marcher sur quelques courses. Il faut être fort tous les ans. Sinon, tu te fais sortir et c’est retour à la case départ.

Et tu trouves cela trop risqué ?
C’est difficile à dire. Je comprends ceux qui tentent le tout pour le tout pendant un certain temps. Après tout, il y en a aussi qui y arrivent, et il faut bien se donner les moyens et prendre le risque de réussir. Mais pour mon cas personnel, je me suis toujours dit qu’il valait mieux avoir une roue de secours. Même si j’étais passé pro, je ne sais pas si j’aurais été heureux.

« J’AI TOUJOURS AIMÉ AVOIR UNE VISION À COURT, MOYEN ET LONG TERME »

Vraiment ?
Je me pose la question, et je me la posais déjà à l’époque. Même si tu es en Conti Pro, ça reste précaire. En étant réaliste, tu peux faire une mauvaise saison et te retrouver sans contrat l’année suivante. Il y a encore une semaine à peine, un ami cycliste m’a dit qu’il venait tout juste d’apprendre qu’il était reconduit chez les pros. Mi-novembre, ça fait tard. J’ai toujours aimé avoir une vision à court, moyen et long terme. Je peux le faire aujourd’hui dans mon nouveau métier et j’en suis très satisfait. Je ne crois pas que ça aurait été le cas dans le cyclisme.

As-tu eu le temps, à un moment donné dans ta carrière, de t’imaginer coureur professionnel ?
Oui, quand même. Une fois que j’ai terminé mon BTS, je me suis donné un an pour réussir, en ne faisant que du vélo. Enfin, je crois que c’était pendant quasi un an (sourires). Mais ça n’a pas duré longtemps. J’ai vite compris que ça ne le ferait pas. J’ai toujours eu la même optique, en réalité. C’était déjà clair pour moi en sortant des Juniors. Je me donnais quatre ans pour faire carrière, ou pour passer à autre chose. Et puis, j’insiste, mais je n’ai aucun regret car je préfère avoir la vie que j’ai aujourd’hui, tranquillement dans mon coin, que d’être éventuellement en “dépression”, avec une situation instable. Car la situation peut même être émotionnellement instable. Ne pas savoir de quoi demain sera fait, ce n’est pas une vie, pour moi.

Car tu avais besoin de certitudes ?
J’ai toujours su ce que je voulais : simplement réussir, que ce soit à travers le sport ou ailleurs. Je veux juste faire ce que je veux, où je veux, avec qui je veux, et quand je veux. C’était mon seul objectif. Être libre ! Au moins à long terme.

« LE SPORT M’A APPORTÉ BEAUCOUP DE CHOSES, ET NOTAMMENT DES RENCONTRES »

Tu sentais-tu libre sur le vélo ?
Il y avait un côté “liberté” lorsque je partais à l’entraînement, en pleine nature, en empruntant les routes que je voulais. Il faut avouer que tu peux être dans un superbe environnement. Mais à côté de ça, il y a quand même des contraintes. Tu ne peux pas sortir, il faut que tu fasses très attention à ton hygiène de vie… Tout est millimétré et réglé en fonction de ta pratique du cyclisme. Tu ne maîtrises pas ta vie, en quelque sorte. Sauf si tu ne vis que pour le vélo ! Alors là, c’est possible, bien sûr. Personnellement, je ne voulais pas de cette vie-là. Il y a un aspect social important, à côté. Je ne voulais pas que ma vie s’arrête et se résume au cyclisme.

Suis-tu toujours le cyclisme aujourd’hui ?
C’est marrant de me poser la question car je me la suis posée lorsque j’ai arrêté. J’ai commencé le vélo en Cadets 2 et finalement, j’ai toujours baigné là-dedans depuis. Mais après ma carrière, je me suis dit que j’allais voir si j’aimais vraiment le vélo, ou si j’allais simplement passer à autre chose. Finalement, c’est bel et bien toujours une passion. D’ailleurs, je vais encore sur les courses quand je le peux, notamment sur les Classiques bretonnes. Je fais le déplacement. Je prends aussi beaucoup de plaisir à regarder les courses pros à la télé. Pour ce qui est de la pratique, je roule encore une à deux fois par semaine, mais plutôt en VTT. C’est moins risqué que sur la route.

Tu évoquais tout à l’heure un “aspect social important” à tes yeux. Tu ne l’as pas eu sur le vélo ?
Si, quand même. Le sport m’a apporté beaucoup de choses, et notamment des rencontres. L’humain, la notion de partage… Ce sont des choses primordiales pour moi. Je me suis fait de bons amis sur le vélo et je garde toujours contact avec pas mal de monde. Ça me manquerait de ne plus avoir ces liens aujourd’hui. On a vécu de belles choses ensemble, pendant des années. On marchait ensemble, on souffrait ensemble, on a gagné ensemble… Ce sont de beaux souvenirs.


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