Ahmad Wais, de la guerre à Damas au Mondial

Crédit photo DR

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Nom : Ahmad Badreddin Wais. Âge : 26 ans. Nationalité ? Syrienne. Mercredi dernier, l'homme au maillot blanc, noir et rouge, flanqué de deux étoiles vertes, n'est pas passé inaperçu. Non pas grâce à sa performance sur le circuit de Bergen (Norvège), évidemment. Anecdotique 60e du Championnat du Monde contre-la-montre Élites Hommes, à une éternité (10'57" précisément) de Tom Dumoulin, le jeune homme a surtout intrigué de par l'inscription gravée sur sa combinaison : "Syria".

« PEUT-ÊTRE QU'UN JOUR, JE RETOURNERAI EN SYRIE »

Incrédules, de nombreux supporters norvégiens se disaient surpris de voir la nation du Proche-Orient représentée sur les Mondiaux. "Ca peut intriguer, je m'en doute. En tout cas, moi, je suis content d'être là !", rigole Ahmad Wais pour DirectVelo. Ce dernier s'est rendu en Norvège avec un autre rouleur syrien Élite, Nazir Jaser, le Junior Mohamed Rayes et son père Amin, qui servait pour l'occasion de manager. Cette petite délégation syrienne s'est installée en ville, dans une location, l'hôtel ayant été jugé trop coûteux pour tout ce petit monde. Qu'importe le contexte et les conditions : Ahmad Wais a pris son pied sur les 31 kilomètres de ce Mondial chrono, du centre ville jusqu'au sommet du terrible Mont Floyen. "Peu importe d'où tu viens. Sur une course comme celle-là, tu peux venir de n'importe quel endroit du Monde... L'effort que tu dois accomplir sera le même", explique celui qui vivait à Damas jusqu'en 2014, avant de rejoindre la Suisse et la région de Zurich pour essayer d'y construire une nouvelle vie. 

"Ce chrono, c'était vraiment un grand moment. Il y avait un monde fou, c'était super sympa ! Je ne m'occupais pas trop de tout ce monde autour de moi car j'étais tellement concentré sur mon effort... J'avais mal aux jambes. J'étais bien occupé à appuyer sur les pédales mais quand même... Tout ce monde partout dans l'ascension, Wahou !", appréciait-il après la ligne. Curieux de recueillir les impressions de ce coureur syrien, plusieurs journalistes venants du Monde entier ont pris le temps de s'interresser au personnage en zone mixte. Tout le monde veut savoir : "Ahmad, avez-vous toujours des contacts en Syrie ? Envisagez-vous d'y retourner un jour ?". Tout juste descendu de vélo, le garçon peine à rentrer dans les détails, mais il fait l'effort de répondre. "Peut-être qu'un jour, je retournerai en Syrie mais pour le moment, c'est vraiment dangereux". 

« CONTINUER DE TRAVAILLER ET D'AVANCER »

Finalement, le voilà qui développe. Et souhaite relativiser : "Vous savez, il y a plein d'endroits et plein de pays dans le Monde où l'on retrouve des problèmes. Ce n'est pas propre à la Syrie. Je pense même qu'il y a des endroits dans le Monde où la situation est pire qu'en Syrie. Il y a eu deux Guerres Mondiales il n'y a pas si longtemps sur cette planète, alors... Bien sûr, c'est difficile de savoir ce qu'il se passe là-bas mais tu dois te concentrer sur ce que tu fais. Il faut continuer de travailler et d'avancer".

Installé en Suisse depuis trois ans après avoir quitté la Syrie en passant par la Turquie et la Grèce, Ahmad Wais se dit heureux, et ambitieux. "J'ai refait ma vie ici pour le moment puisque c'est ici que j'étudie et que je pratique ma passion du cyclisme. J'ai d'abord appris l'Allemand à l'école. Maintenant, j'essaie de travailler un petit peu aussi en attendant d'intégrer l'Université à la rentrée". Il travaille ainsi dans un supermarché, pour vivre et mettre un peu d'argent de côté. "J'étais dans une Académie du Sport en Syrie et je vais continuer dans cette voie-là en Suisse désormais". Le reverra-t-on un jour sur un Mondial ? "Pourquoi pas. En tout cas, j'ai bien profité de celui-là au cas où ça n'arrive plus", plaisante-t-il pour conclure.

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