David Gaudu : « Emerveillé en passant la ligne »

Dimanche 10 août, La Gleize. Il est 15h46. Le groupe de tête d'Aubel-Thimister-La Gleize entame l'ascension du Col du Rosier. Une côte classée hors-catégorie et qui faisait office de septième et dernier GPM du jour. David Gaudu, deuxième le premier jour, choisit ce moment pour placer son attaque. Il prend un mètre, deux mètres, trois mètres,... Au passage sur la ligne, le coup de pédale de l'homme de tête impressionne. Le breton, 1m72 pour 50,7 kilos, affiche un gabarit de pur grimpeur. Le suspense persiste tout de même. Les rescapés du peloton le reprendront-ils ? A 16h32, le suspense est terminé. Le coureur du Club Bretagne remporte la dernière étape et le classement final de cet Aubel-Thimister-La Gleize (UCI MJ 2.1). L'occasion pour DirectVelo de recueillir les propos du Junior deuxième année.

« C'est ma plus belle victoire. J'étais émerveillé quand j'ai passé la ligne. J'étais en pleurs. J'ai pensé à mes proches, au staff, à tous mes copains au bord de la route. Tous ceux qui me soutiennent tout au long de l'année. Je savais que j'étais costaud sur ces deux jours, que j'avais une super forme. Aujourd'hui, quand j'ai vu que dans les taquets ça montait très très fort mais que j'étais facile, j'ai décidé d'accélérer au train. Ils étaient tous à bloc et j'ai remis un coup par derrière et c'est sorti. Le peloton roulait fort, notamment avec les Hollandais. Et Alan Riou était devant. Je me suis pas posé de questions, j'ai roulé, j'ai appuyé sur les pédales le plus fort possible. Je suis revenu sur le groupe de tête où j'ai rejoint Alan. J'ai causé avec lui et il m'a dit qu'il était pas mal. Du coup, il a fait les descentes pour moi car j'ai tendance à faire attention dans les virages avec la pluie car quatre bretons étaient tombés hier. Il n'a pas pris de risques du tout. J'ai attaqué dans le Rosier, l'avant dernier GPM, classé hors-catégorie.

« APRES LES PAVES, JE ME SUIS SENTI LIBERE »

En haut, la moto m'annonçait quarante secondes et je repensais un peu à la Classique des Alpes de l'an passé où j'étais seul en tête. Je me suis dit "Putain, j'suis en train de refaire un numéro" mais ce coup-ci, ça a marché (il avait chuté à cause d'un chat alors qu'il était seul en tête, NDLR). Quand je suis arrivé sur le circuit, je savais que j'avais tous les copains le long de la route. C'était magnifique. J'ai compris que j'allais gagner à deux kilomètres de l'arrivée, quand j'ai passé les pavés. Avant cela, je savais qu'une seule chose pouvait m'arrêter : une crevaison sur les pavés. Quand j'ai passé les pavés, je me suis senti libéré. J'ai retrouvé de la force pour la dernière bosse. Et finir par aller gagner. Putain c'est ... Notre DS Gaël Le Bellec qui nous a préparé un très beau séjour en Belgique avec tout le staff, avait dit qu'il y avait ma carte à jouer, mais aussi Alan Riou et Romain Pommelet qui n'étaient pas loin, à 22 secondes. On savait qu'on pouvait jouer sur plusieurs tableaux : le général et l'étape. Finalement, j'arrive à remporter le général et l'étape.

« PAS PREPARE A GAGNER »

Au chrono par équipes, c'est sûr que j'ai pris un petit coup à la casquette (sic.) quand on s'est retrouvé à trois après le premier tour. Finalement, Romain et Alan ont été supers. Ils ont joué le jeu à fond. Finalement, on limite la casse. On est à 13 secondes, au général, je ne suis qu'à 13 secondes. J'avais bien fait de prendre des secondes la veille. Sur les étapes, ils ont été autour de moi. Ils ont été costauds. Hier, j'ai dû boucher un trou d'une minute dix. J'avais un peu les cannes dures au départ mais finalement ça s'est bien débloqué. On avait aussi un bon masseur, qui m'a massé deux fois. Je ne m'étais pas forcément préparé à gagner ici. Mon entraineur, Denis Le Cam, savait qu'il y avait beaucoup de chutes donc je pense que derrière son écran d'ordinateur, il a du être un peu stressé. Ce matin, il m'a envoyé un message pour me dire que c'était très dur mais qu'avec ce que j'avais démontré, j'étais capable d'aller gagner. C'est des semaines et des semaines d'efforts pour arriver en forme en préparation des Championnats de France et puis gagner ici... L'année dernière, j'avais déjà remporté une Première Catégorie à cette époque-ci de l'année. Je savais que je récupérais très bien, que j'étais vraiment très bien.

LE MAILLOT TRICOLORE

Cette semaine, je serai en stage avec l'Equipe de Bretagne, j'enchaîne avec une autre UCI, la Ronde des Vallées où les Russes seront également présents. Puis il y aura les Championnats de France et peut-être que si je fais un bon Championnat et que le sélectionneur veut bien de moi, aller aux Championnats du Monde. Je ferai tout pour ramener le maillot tricolore. Ce serait unique, inoubliable. Si je peux participer aux Mondiaux et que je suis en forme, comme au départ de toute course, j'essayerai d'aller gagner. Puis sinon, ce sera d'aider l'équipe, avec un gars comme Aurélion Paret-Peintre qui gagne. Tous ceux qui sont en Equipe de France mériteront de gagner. Faire gagner les copains, sur le vélo, c'est aussi bien.

REVENIR EN BELGIQUE

Je ne sais pas encore où j'irai. Je n'y pense pas encore. Je veux attendre après les Championnats de France pour décider si je pars ou si je reste à l'UC Briochine. On ne sait jamais. Ici, je courrais avec le Club Bretagne chapeauté par Gaël Le Bellec. Ca nous donne la possibilité de disputer des courses comme Kuurne-Bruxelles-Kuurne où on va se confronter aux meilleurs, aux Belges. C'est une belle organisation. J'y suis rentré cette année car l'an dernier, je n'y étais pas. C'est super de nous avoir emmenés ici. En plus, on revient avec le maillot jaune, c'est génial. C'était la première fois que je venais en Belgique, et je gagne ! J'espère bien y revenir !

BARGUIL, UNE SORTE D'IDOLE

Je suis vraiment un pur grimpeur. Je me suis montré sur la Classique des Alpes où j'ai fait deuxième. Cette année, j'ai réussi à confirmer. Dès que je vois une bosse, ça me plait. Aujourd'hui, vu les bosses, j'ai adoré. Mes parents m'ont emmené depuis que je suis tout petit à la montagne, été comme hiver. Je vais faire du vélo, je vais faire du ski. La montagne, c'est une pure passion. La moyenne montagne, comme aujourd'hui avec des grosses côtes, j'aime bien aussi. C'est clair que quand on voit un Breton, on pense plus à un puncheur du style Cyril Gautier qu'à un grimpeur. Mais on a aussi un garçon comme Warren Barguil qui va rivaliser sur la Vuelta avec les pros. Pour moi, c'est une sorte d'idole, un pur grimpeur breton.
Mes parents, en m'envoyant dans les Alpes, dans les cols du Télégraphe, du Galibier, ... m'ont permis de développer une énorme qualité. Je commence à peine à prendre conscience que je la possède. Une fois que j'aurai pris confiance en moi, j'espère arriver au plus haut niveau dans plusieurs années. Et si je n'y arrive pas, je veux réussir mes études. Je vais faire un BTS comptabilité à Saint-Brieuc. J'aimerais comme lui pouvoir devenir professionnel. Faire de ma passion mon métier, ce serait vraiment génial.
On verra comment ça se déroule par la suite. J'ai une année de Junior à finir, puis une année Espoir à commencer. On verra la suite avec mon entraîneur que je remercie.

PRENDRE DU PLAISIR

Mon rêve, ce serait de remporter une course typique de montagne, où c'est vraiment dur avec vraiment du dénivelé. Forcément, quand on voit le Tour de France, ça fait rêver. C'est la plus belle course chez les professionnels. Si je continue à marcher, que j'arrive à passer pro et que je marche quand je suis pro, c'est un rêve. Mais les rêves, parfois on les réalise, parfois, on ne les réalise pas. Puis il y aurait les Championnats du Monde. C'est une course hors-norme, avec un maillot arc-en-ciel à aller chercher. Il y a dix ans, on n'aurait jamais vu ça. Mais quatre Français dans le Top 10 au Tour, franchement, bravo. C'est impressionnant. Ils m'en mettaient plein les yeux dans la montagne. Avant de penser à faire aussi bien, j'ai encore une année junior à finir puis des années Espoir. Maintenant, je veux prendre un maximum de plaisir sur le vélo, continuer avec une bande de copains, que ce soit au Club Bretagne, dans mon club, en Equipe de France, à la BTWIN U19 Racing Team,... C'est franchement exceptionnel. Le vélo pour le plaisir avant tout. Que les résultats suivent ou ne suivent pas, ce n'est pas grave tant qu'on aime ce qu'on fait ». 
 

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