La France titrée : Les hommes dans le match, les femmes en remontée fantastique
Crédit photo Patrick Pichon - FFC
Les Bleus étaient restés sur leur faim au dernier Championnat du Monde, battus de cinq petites secondes par l'Australie. Mais cette fois, au Championnat d'Europe, c'est avec l'Italie que la France a croisé le fer jusqu'aux derniers mètres, avant de les devancer de... six secondes. "On en a rêvé. En plus, la moitié de l'équipe avait déjà fait Kigali la semaine dernière. Ils étaient vachement revanchards. On est vraiment contents de venir décrocher ce maillot", se réjouit Marion Borras, qui n'était pas de l'aventure au Rwanda, contrairement à Bruno Armirail notamment, qui repense au maillot arc-en-ciel échappé de peu. "Ce serait bien que ça nous sourie aussi au Mondial. Un maillot de champion d’Europe, c’est cool, mais un maillot de champion du monde, ce serait encore mieux".
Titrée au Championnat d'Europe il y a deux ans, aux Pays-Bas, la France avait déjà Juliette Labous dans ses rangs. "Il y a deux ans, c’était déjà beaucoup de satisfaction avec l’équipe, c’était le premier titre. On voulait vraiment retrouver cette médaille d’or, vu qu’on n’avait pas participé l’année dernière". Pour Thibault Guernalec, c'est "un sentiment fort, on y pense le matin avant de prendre le départ. Mais c'est surtout une belle sensation en attendant que les filles arrivent et le dernier temps, franchement c’est une belle expérience". Car il y a eu du suspense, ce jeudi après-midi. Les hommes ont ouvert le bal. "Le but était de rester ensemble le plus longtemps possible, même si un coureur ne passait pas ses relais et restait simplement dans les roues. À trois, on est plus aérodynamiques qu’à deux", explique Bruno Armirail.
« ON Y CROYAIT DE PLUS EN PLUS »
Mais lorsque le final approche, il n'est plus très intéressant de passer la ligne à trois. C'est donc Thibault Guernalec qui a été désigné pour donner un dernier gros relais, avant de s'écarter au pied de la bosse finale. "Il fallait que quelqu’un se sacrifie, ça ne sert à rien de finir à trois dans la dernière montée. J’étais un peu limite sur les derniers kilomètres, je pense qu’ils allaient beaucoup plus vite que moi". Au final, les Français ont concédé 23 secondes à l'Italie. "C’était bien, on avait pour objectif de faire un bon chrono pour ne pas mettre les filles trop loin. On s’est bien débrouillé malgré le retard sur l’Italie", pense Rémi Cavagna. Assis tous les trois en zone mixte, à tenter de capter quelques images sur un écran qui faisait des siennes, les Bleus ont senti la pression monter au fur et à mesure que l'écart se réduisait.
Petit à petit, il y avait motif à y croire. "On y croyait de plus en plus pendant le relais des filles, mais on avait quand même un beau retard", confie Thibault Guernalec. "On savait que les garçons étaient un peu en retard sur l'Italie, mais on savait que c'était kiff-kiff avec la Suisse. En fait, on n'a pas vraiment eu les temps des Italiennes. On nous a surtout donné l'avance par rapport à la Suisse", révèle Marion Borras, qui était la seule absente du trio au dernier Championnat du Monde. "J'ai eu une prépa un peu piste pour pouvoir préparer les Championnats du Monde. Le chrono et les courses en ligne, ce n'est pas du tout la même chose. Ce qui me manque sur les courses en ligne, c'est le volume, que je n'ai pas pu faire du tout l'hiver dernier parce que je bossais pour valider mon diplôme de kiné".
« JE VOYAIS SON OMBRE DERRIÈRE MON VÉLO »
C'est logiquement elle qui s'est écartée pour laisser finir le travail à ses coéquipières. "Au départ, je trouvais qu’on partait un peu fort. Je me disais que c’était peut-être moi qui n’étais pas bien, mais non, on allait vraiment vite. Sur le parcours, j’ai entendu qu’on avait encore six secondes de retard sur les Italiennes", explique Juliette Labous. La médaille d'argent semblait au moins assurée. Mais au pied de la bosse, les hommes reçoivent une information qui commence à faire accélérer les battements cardiaques. "On nous a dit qu'on était dans la même seconde au pied de la bosse", révèle Thibault Guernalec. "On a une équipe très forte et très homogène chez les filles. Ce sont surtout elles qui font la différence", ajoute Bruno Armirail.
L'équipe de France peut compter sur une Cédrine Kerbaol qui a retrouvé des sensations, même si la bosse lui a fait tirer la langue. "Aujourd’hui les jambes étaient au rendez-vous, c’était le cas pour toute notre équipe, c’était le bon jour pour avoir les bonnes jambes. Juliette m’a bien traînée jusqu’en haut, le but était de s’accrocher, rester dans son rythme, et à fond jusqu’au sommet", sourit la Bretonne. Juliette Labous fait attention à sa coéquipière. "Dans la montée, je savais que j’étais peut-être un peu plus forte que Cédrine, donc j’espérais juste qu’elle arrive à s’accrocher. Je voyais son ombre derrière mon vélo et je savais qu’elle n’allait rien lâcher". Mission accomplie en attendant l'arrivée de l'Italie.
« C'EST COMME MARQUER UN BUT »
À quelques mètres de la ligne, le chrono des Italiens passe au rouge, et c'est tout le clan français qui exulte, parqué devant les écrans installés en zone mixte. "On croyait en nos filles et on a bien fait", se réjouit Rémi Cavagna. "Les filles ont fait une course magnifique pour revenir sur l'Italie. On gagne pour vraiment rien. C'est comme marquer un but quand elles arrivent", plaisante Thibault Guernalec. Le coureur d'Arkéa-B&B Hôtels espère débloquer sa situation personnelle après une journée comme celle-là. "Je n'ai encore rien signé pour l'année prochaine. J'espère que ça ne va pas tarder, parce que c'est une situation qui n'est quand même pas facile".
Malgré cette situation, Thibault Guernalec ne s'empêchera pas de profiter, même si le temps est parfois long en dehors des courses. "Aujourd'hui, on est concentré sur ce qu'on a à faire. Mais il y a des jours à la maison où c'est un peu long, où on attend des coups de fil de l'agent, des bilans. Parfois, il y a plus de portes qui se ferment que de portes qui s'ouvrent". Juliette Labous attend une revanche. "Il faut peut-être le vivre pour le comprendre, mais c’est vraiment spécial et génial. On reviendra au Championnat du Monde l’année prochaine pour aller chercher le maillot. Ce sera vraiment le plus gros objectif pour nous".
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