Églantine Rayer Girault : « Je repars apaisée »

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Églantine Rayer Girault est repartie de La Tour-du-Pin (Isère) avec deux médailles de bronze autour du cou. Après la breloque obtenue sur le chrono, elle est allée chercher la 3e place samedi, sur la course en ligne du Championnat de France, en prenant le meilleur sur Clémence Latimier (Auvergne-Rhône-Alpes), avec qui elle aura ferraillé dans la seconde partie de la course. Ce double podium national la rassure après un début de saison terni par des soucis de santé. La Normande, membre de la FDJ-Suez, s'est confiée à DirectVelo après un Championnat de France qui va lui faire beaucoup de bien.


DirectVelo : Tu es allée chercher une belle nouvelle 3e place...

Églantine Rayer Girault : On ramène le maillot en Normandie (avec Marion Bunel, NDLR). Au-delà de ça, je dirais que peu importe le résultat, j'ai une médaille autour du cou. J’en suis vraiment très contente. Et par-dessus tout, je suis satisfaite de mes sensations. C'est la preuve encore une fois que rien n'est jamais terminé. J’ai quand même un regret, comme je suis une éternelle insatisfaite, c'est d’être mal placée au pied de la première bosse et de louper la bonne échappée. Derrière, c'était un peu un enterrement de première classe. Franchement, je me suis demandé si on allait s'ennuyer toute la course. J'étais vraiment ici pour prendre du plaisir, il était hors de question que la course se fasse comme ça tout du long. Quand il y a eu cinq minutes d'écart, une deuxième course a commencé. 

La bonne échappée est partie très tôt. As-tu été surprise par le scénario ?
L’attaque de Marion était plus ou moins prévue, je m'y attendais. Je pensais qu'être placée dans les 15 premières, ça suffirait. J’étais bloquée derrière deux ou trois filles, c'était impossible de passer. Je ne voulais pas leur rouler dessus non plus, on n’était pas en train de jouer le titre mondial. Je n'aurais pas dû me contenter de ce placement parce que je savais qu'on allait monter la première bosse rapidement. On voulait écrémer dès le début pour ne pas subir le surnombre des autres comités parce qu’on était seulement quatre.

« J'ÉTAIS LÀ POUR ME FAIRE PLAISIR »

Comment as-tu décidé de sortir avec Clémence Latimier ?
Dès le deuxième tour, je suis allée voir Clémence parce que je la connais bien. Je lui ai dit que c’était dommage pour les autres comités, mais que le scénario était plié. Je suis aussi allée voir le Grand Est parce que je savais que Solène (Muller) était à deux ou trois minutes de la tête. Je leur ai dit que si elles ne faisaient rien, ça allait être compliqué pour elles. Avec Auvergne-Rhône-Alpes, on a pris la course en main. Une fois que les filles de tête avaient du champ et qu’on avait récupéré Solène, on a commencé à embrayer avec Clémence. Ça a pété sur le plat. On a continué à rouler toutes les deux. On savait qu'il fallait qu'on appuie bien dans les bosses et sur le plat pour ne pas perdre de temps.

Comment as-tu manoeuvré dans le final pour aller chercher ce podium ?
Dans le dernier tour, on s'est un peu plus regardées. Je savais qu’elle voulait m'attaquer dans la bosse. Ça ne me dérangeait pas si ça terminait au sprint ou même si le groupe de poursuivantes nous rattrapait. J'ai quand même continué à rouler parce que j'étais là pour me faire plaisir. Dès le pied de la bosse, elle a attaqué. Je me suis accrochée et je me suis même sentie super bien. Je me suis dit que si elle n'insistait pas, moi, j’allais le faire. J’ai pris le risque de ne pas attendre le sprint. Je me suis envolée et j’ai fait la descente à fond. J'avais l'impression d'avoir un meilleur braquet que sur le chrono où il m'a manqué des dents. Je me sentais vraiment bien dans la descente. J'ai pris des virages propres, j'ai essayé de ne pas prendre trop de risques. Quand je me suis retournée et qu'elle n'était pas là, j’ai compris que j’allais faire 3e. Dans ma tête, j'avais l'impression d'avoir gagné. C'était vraiment une victoire personnelle : j'en suis plus que satisfaite !

« JE CONFIRME MA BONNE FORME DU MOMENT »

C’est plutôt une semaine réussie pour toi…
Je ne pensais pas en venant ici que j'allais être abonnée à la 3e place. C'est un bel abonnement quand même, j'aurais signé direct. Je l’ai dit sur mes réseaux sociaux, j'espère que c'est le début d'un cercle vertueux. Aujourd'hui, je pense que je confirme ma bonne forme du moment. J'aime profondément ce sport et c'est pour ça que j'ai envie de bien faire. C'est aussi la raison pour laquelle je me mets un peu la pression. Je remercie encore une fois Jean-Phi (Yon), avec qui ça a toujours marché. Hier soir, il est venu me voir dans la chambre et il a eu des mots très forts. J’ai une chance énorme d'être aussi bien entourée par mes proches et mon équipe qui fait un travail énorme.

En début de semaine, tu nous disais être stressée. Cette semaine te rassure-t-elle ?
Je repars apaisée. J'ai vraiment eu un début de saison galère avec une fracture à l’hiver puis une commotion cérébrale sur le Tour du Pays Basque. Ça a été dur de s’en remettre donc une grosse perte de confiance en moi a suivi. Il y a toujours des passages à vide dans une carrière. Cette année, j'ai eu pas mal de pépins physiques, les années précédentes aussi. À chaque fois, je me relève et cette fois-ci, je ne voyais pas trop comment j'allais faire. Je me rassure vraiment avec les sensations du jour. Mon entraîneur me fait toujours des retours super positifs, et de manière très sincère. Ça m'aide beaucoup quand on est direct avec moi. Si ça ne va pas, j'aime bien qu'on me dise “merde”. Si ça va, j'aime bien être rassurée. Sur le chrono, mon entraîneur a eu des mots exceptionnels. Il m'a montré que j'avais progressé par rapport au chrono que j’avais fait au Giro. Je suis sur une pente ascendante et je vais courir au Tour de Pologne avec un bon état d’esprit. J'ai toujours à cœur de courir avec mon équipe. C'est là-bas que je me sens le mieux, quand je suis entourée de mes coéquipières et du staff de la FDJ-Suez. Je sens que je peux m’exprimer parce qu'ils me font confiance et ça m'aide beaucoup. On va essayer de ne pas tomber. Les chutes font partie de notre sport, mais quand elles ont des conséquences comme la commotion que j'ai eue, ce n’est pas simple. Aujourd'hui, j'ai trouvé la clé d'un cercle vertueux, en tout cas, je l'espère.

« FAIRE CHAMBRE AVEC DES MINIMES-CADETTES NOUS RAMÈNE AUX BASES ! »

1ère et 3e, c’est un bon bilan pour la Normandie, vous qui n’étiez que quatre au départ.
Il ne fallait pas qu'on subisse la course. Au final, on s'en sort bien, on gagne quand même. C’est drôle, devant, c'était mes deux coéquipières. Célia est ma coéquipière tout le reste de l'année, donc je n'avais pas forcément envie de rouler dessus. C'est assez particulier, le Championnat de France, parce qu'avec Célia, on était habillées pareil, il y avait juste le maillot qui changeait. J'avais mes deux coéquipières à l'avant, il ne me restait plus qu’à m'amuser derrière.

Qu’est-ce que ça fait de courir avec le maillot du comité de Normandie ?
Je n’avais pas eu l’occasion de faire le Championnat de France de l’Avenir l’année dernière. Comme j’ai fait le contre-la-montre, j’ai passé la semaine au gîte avec le comité. J’adore parce que ça me rappelle mes années minimes-cadettes. J’ai fait chambre avec des filles plus jeunes que moi. Elles me posent des questions, elles sont super contentes que des pros soient là. Ça m’a fait du bien de les avoir croisées, elles ont des étoiles plein les yeux. Partager ce que je fais et leur montrer que vivre du cyclisme est possible me réjouit. J’espère y participer l’année prochaine, pas forcément pour la course, mais pour l’ambiance. J'avais oublié mon sac de couchage et ma serviette de bain, parce que je n'avais pas pensé qu'on allait être dans un gîte. Ça nous ramène vraiment aux bases !

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Portrait de Eglantine RAYER GIRAULT