Mathis Le Berre : « Je n’aurais jamais imaginé ça »

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

“C’est la plus belle course à laquelle j’ai participé”. Ces mots, Mathis Le Berre les a prononcés le 25 février dernier, après avoir passé 182 kilomètres à l’avant sur les routes du Circuit Het Nieuwsblad, sa première grande Flandrienne chez les pros (lire ici). Dimanche, il a découvert quelque chose d’encore plus grand, d’encore plus fort, d’encore plus fou à l’occasion de son premier Tour des Flandres, lui qui a été aligné par sa formation Arkéa-Samsic sur pratiquement toutes les Classiques belges de ce début de saison (voir sa fiche DirectVelo). “C’était un autre niveau, avec les trois fantastiques !”. L’occasion de faire un point avec le néo-pro breton - 21 ans -, lauréat des deux derniers Challenge Morphologics-DirectVelo Espoirs.

DirectVelo : Il y a un peu plus d’un mois, tu t’étais régalé en passant plus de 180 km à l’avant lors de ta première Flandrienne, au Nieuwsblad. Dimanche, c’est le Tour des Flandres que tu as découvert !
Mathis Le Berre : Physiquement, c’était encore plus dur. Mentalement aussi. Sur ces courses-là, ça se joue bien sûr beaucoup sur le physique mais aussi sur le placement. Il faut être concentré toute la journée. C’était assez chaotique. Je ne suis pas tombé mais je crois m’en être bien sorti, vu le nombre de coureurs qui sont allés au sol ou qui ont au moins dû poser pied à terre à un moment ou un autre. Les autres Classiques, c’était déjà quelque chose mais là, c’était un autre niveau, avec les trois fantastiques. (Tadej) Pogacar, (Mathieu) Van der Poel, (Wout) van Aert… Ce sont de grands coureurs, des champions. Le scénario était un peu écrit d’avance avec ces gars-là.

« C’EST SUPER POUR LE FUTUR »

Tu as disputé pas moins de sept courses d’un jour en Belgique depuis le début de saison, parmi lesquelles les plus prestigieuses : le Nieuwsblad, la Panne, l’E3 et donc le Tour des Flandres. Était-il prévu d’emblée que tu enchaînes toutes ces épreuves pour ta première saison chez les pros ?
Pas du tout ! Au départ, il était prévu que j’en fasse quelques-unes, mais pas les plus grosses. Initialement, on avait imaginé un calendrier avec pas mal de manches de Coupe de France, des courses d’un niveau inférieur, plus jouables pour moi. Mais ils ont vu que je me débrouillais bien sur les premières Classiques, et que ça me plaisait bien. Alors on a enchaîné.

On imagine que tu as énormément appris sur chacune de ces courses !
Bien sûr, c’est super pour le futur. Le fait d’avoir pu enchaîner m’a déjà donné beaucoup d’expérience. J’espère pouvoir y revenir et y performer dans les années à venir. Forcément, il me faudra du temps, mais c’est déjà ça de pris. L’équipe ne m’a jamais mis de pression. Au contraire, on fait confiance aux jeunes et on m’a fait confiance sur chacune de ces courses. C’est très plaisant.

« TOUTES LES PLANÈTES S’ALIGNENT »

Après ta très longue fugue au Nieuwsblad, tu as remis ça à La Panne et à l’E3, pour cumuler près de 400 bornes à l’avant de la course sur ces Classiques. Tu n’as pas froid aux yeux !
J’ai sans doute fait quelques erreurs parfois, notamment sur le placement. Mais c’est comme ça que l’on apprend. Au plus je vais courir là-bas et au mieux j’arriverai à lire la course. Je suis encore jeune, j’ai beaucoup à découvrir. Mentalement, au départ de ces courses, il faut vraiment en vouloir. On sait que ça va être la guerre toute la journée et c’est le cas.

T’es-tu surpris depuis le début de la saison ?
Oui, franchement, je me suis surpris. Normalement, je n’aime pas spécialement le début de saison. Je suis un coureur qui marche l’été, j’ai toujours besoin de temps pour mettre en route et je préfère la chaleur. Alors marcher comme ça, face à ce niveau et dans ces conditions… Je n’aurais jamais imaginé ça. J’ai réussi à faire la course d’emblée au Nieuwsblad et ça m’a mis en confiance. J’espère que ça va continuer comme ça. Pour l’instant, toutes les planètes s’alignent.

Tu ne t’étais pas non plus particulièrement distingué sur les pavés chez les amateurs !
Non, pas du tout. En fait, sur le papier je ne suis pas trop fait pour ça, physiquement. Je suis léger, je dois faire dix kilos de moins que la plupart des mecs qui sont devant sur ces courses-là. En revanche, l’avantage, c’est que ce sont des courses qui se lancent très tôt, où ça ne débranche jamais, et c’est plutôt à mon avantage car j’aime ce type d’efforts.

« LA SEULE CHOSE QUI A CHANGÉ, C’EST LE FAIT DE NE PLUS JOUER LA GAGNE »

Ces dernières semaines, en découvrant toutes ces Classiques, tu as aussi pris l’habitude d’enchaîner les courses de plus de 200 kilomètres…
J’aime bien les longues distances, à l’entraînement comme en course. Là aussi, ça me convient. Forcément, ça change des courses amateurs mais par contre, il y a des similitudes dans la façon de courir. Sur toutes ces courses en Belgique, ça attaque de partout, ça met longtemps à sortir… On l’a vu sur ce Tour des Flandres. Je n’ai pas vécu de courses où ça part directement avec un peloton qui fait rideau, qui roule au tempo avant de revenir dans le final pour préparer un sprint. Jusqu’à maintenant, je n’ai connu que des courses super mouvementées. Mais c’est bien, ça me plaît. Pour l’instant, tout se passe bien. Si ça pouvait continuer de cette façon toute l’année… Je signe direct ! La seule chose qui a changé, c’est le fait de ne plus jouer la gagne… Mais il faut passer par là. Et j’aime beaucoup travailler pour les copains aussi.

Ce dimanche, au « Ronde », tu as découvert ce que c’était de souffrir sur le vélo pendant près de 6h30 d’affilée !
C’était quelque chose ! Mais en fait, pour l’anecdote, ça m’était déjà arrivé une fois, récemment. L’an dernier, je m’étais lancé dans un truc un peu fou : j’avais décidé de finir ma saison sur une énorme sortie, j’avais fait 310 bornes. Comme quoi, avec le recul, c’est que je n’avais pas fini la saison si cramé que ça (rires). Mon père m’avait accompagné sur la seconde partie, j’avais terminé la sortie avec du derrière scooter. Mais là au Tour des Flandres, c’était bien sûr encore autre chose.

Si tu devais retenir une image du Tour des Flandres, laquelle serait-elle ?
La foule, partout… Les encouragements de ce public belge. J’étais dans le gruppetto et je me suis battu pour finir. Ce n’était pas simple, mais j’avais le plaisir d’entendre mon nom sur le bord de la route. Les gens me reconnaissaient alors que franchement, je ne suis personne. Qui me connaît, franchement ? Et encore moins en Belgique… Alors ça fait toujours plaisir. C’était beau. 

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