Raphaël Taïeb : « Ça mettra le temps qu’il faudra »

Crédit photo Guy Dagot - www.sudgirondecyclisme.fr

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Coureur, partenaire principal via son entreprise lelivrescolaire.fr et nouveau président de Corbas Lyon Métropole, Raphaël Taïeb arrive à l’heure du bilan. Vainqueur de la Coupe de France N2 et donc prétendant à la montée au plus haut niveau amateur, la formation lyonnaise place ses pions un à un, pour devenir une équipe importante du paysage cycliste français. Avant d’aborder ce nouveau tournant, Raphaël Taïeb a fait le point avec DirectVelo sur cette année faste, les projets encore à venir et son rôle à jouer dans cette logique de développement.

DirectVelo : Quel bilan fais-tu de cette saison en tant que président de Corbas Lyon Métropole ?
Raphaël Taïeb : C’est une saison incroyable. En début d’année, on se lançait dans ce nouveau projet et cette nouvelle ambition où j’arrivais en tant que sponsor principal. On a augmenté le budget du club, Denis Repérant est arrivé. À cette époque-là, on disait que notre objectif était de monter en N1 et de gagner la Coupe de France. Tous ceux qui connaissent le vélo savent qu’il y a énormément d’aléas et d’incertitudes. Gagner, ce n’était pas du tout évident. C’est comme dans un rêve, dès la première année. Jusqu’au dernier moment, il y a eu du suspense. De ce point de vue-là, c’est une saison incroyable. L’état d’esprit du groupe est exceptionnel, il y a une très bonne entente.

« ON EST EN MODE ENTREPRENEUR »

Et il n’y a pas que ce succès en N2…
Par ailleurs, on avance sur plein d’autres sujets. Cette année, on a construit ce qui va devenir une N2 Féminine. On arrive aussi en N3 en VTT. On est le premier club à lancer une section Zwift avec un vrai projet sportif. Les choses s’emboîtent comme il faut. 2023 se prépare bien. On a de nouveaux partenaires qui nous rejoignent cet hiver et qui vont nous permettre de faire encore davantage. Il y a aussi de nouveaux coureurs, ils nous ont quasiment tous contactés spontanément. On a fait très peu de démarchage. Ils sont probablement intéressés par la dynamique du club, sur le double projet des sportifs, l’insertion professionnelle, les études… On essaye d’être actif là-dessus et je pense que ça attire.

Mais Corbas ne veut-il peut-être pas trop en faire ? Pourquoi déjà se diversifier autant ?
Le vélo n’est pas uniquement la route et pour les hommes. C’est plein de choses. On en fait beaucoup mais il y a aussi des choses qu’on diffère, qu’on ne peut pas faire tout de suite. Quand on a un staff impliqué et passionné, avec des bénévoles et salariés, on peut faire plein de choses. Aujourd’hui, je n’ai pas la sensation qu’on en fait trop. Ce qui étonne, c’est qu’on a un peu une ambition de start-up dans ce club. Ça fait bizarre car la plupart des clubs sont gérés plus tranquillement en mode association. On est en mode entrepreneur. On lance plein trucs, ça va dans tous les sens, on communique… C’est un peu différent, ça pose des questions… Quand j’ai lancé mon entreprise, plein de gens se demandaient ce que je foutais. Ça a mis du temps, mais ça a marché. Je ne dis pas qu’on va tout réaliser en deux ans. Mon entreprise a mis 10-15 ans à marcher. Ça mettra le temps qu’il faudra.

« CE N’EST PAS PRÉTENTIEUX, C’EST RAISONNÉ »

Qu’attends-tu pour l’an prochain en N1 ?
Plus on monte, plus le niveau se densifie. Nous aussi, de notre côté, avec nos coureurs. Je pense à Samuel Paslier. Il a fait une saison hyper ascendante, il finit en pleine forme. Certains sont encore jeunes et ont des paliers de progression devant eux. Il y a également des recrues de très grande qualité : Sébastien Havot, Julien Marin, les frères Arhie… Ça va être dur, mais on a des armes pour se battre. On rentre sur un projet sur deux ans. L’objectif qu’on se fixe en première année de Coupe de France N1 est d’être dans le match, autour de la dix ou douzième équipe. À 18 mois, on va essayer de viser la gagne. C’est un projet qui motive tout le monde. Ça ne va pas être simple, mais si on ne fixe pas des objectifs ambitieux, on n’avance pas. Ce n’est pas prétentieux, c’est raisonné. On sait qu’on peut y arriver parce qu’on met en place des choses qui font que ça se passe bien.

Es-tu dans les temps par rapport à ce que tu imaginais ?
On est complètement dans les temps. On est en N1 dès l’année 1. Je suis toujours le sponsor principal du club, mais je suis entouré d’une trentaine d’entreprises qui nous soutiennent. On a aussi la métropole et la ville. On a notre modèle même si on n’est pas les seuls. On s’appuie beaucoup sur les partenariats privés, alors que d’autres équipes sont essentiellement soutenues par la ville, le département et la région. Plus de 70 % de notre budget vient du privé. On en est fiers.

« QUELQUE CHOSE D’UN PEU PLUS STABLE »

Certains entrepreneurs veulent parfois tout tout de suite en arrivant dans le vélo, qu’en est-il de toi ?
Je veux construire quelque chose de pérenne. Je ne veux pas que ça disparaisse au bout de deux-trois-quatre ans. Je trouverais ça triste. Je veux que ça existe toujours dans 30 ans. Il faut des fondations solides. Il ne faut pas être trop pressé, mais il faut quand même que ça avance et être ambitieux sans se dire qu’on va tout faire en deux ans car ce n’est pas réaliste. C’est un équilibre.

As-tu toujours l’idée d’une équipe pro ?
Bien sûr. Pour moi, une équipe pro est une entreprise. Je ne vois pas ce qu’il y a d’insurmontable. C’est toujours l’objectif. Par contre, je veux le faire avec une vision et un projet fort et singulier. Je ne veux pas tomber dans les écueils du modèle du vélo qui amène à des histoires comme ce qu’on entend. Ça fait un, deux, trois ans et après, « boom, ça tombe ». Je veux quelque chose qui soit pérenne. Je pense que des choses vont bouger dans le vélo au niveau du modèle économique. Le modèle du tout publicitaire va s’essouffler. Je pense qu’il faut plus aller vers des modèles de communautés et d’influenceurs. Ça me fait beaucoup réfléchir. En tant qu’entrepreneur, quitte à créer une équipe, je veux essayer de réfléchir à un modèle qui soit différent plutôt que juste aller chercher un autre sponsor, mettre 10 millions et on fait une équipe… Et dès que le sponsor se retire, il n’y a plus rien. J’aimerais bien trouver quelque chose d’un peu plus stable. Ce n’est pas facile.

Et tu seras coureur dans la N1 en 2023…
Je ne force pas ma place. J’essaye de la conquérir de façon légitime en travaillant. Quand je fais le Grand Prix de Saint-Étienne ou Annemasse-Bellegarde, je suis déjà avec des N1 autour de moi. C’est quand même un calendrier qui y ressemble. Je vais essayer d’apporter ma pierre et de toujours progresser en chrono qui est toujours ma grande passion. Je veux tenter d’obtenir une meilleure place au Championnat de France Élites (Il a fini 41e cette année, NDLR). Si je peux me présenter… car je crois qu’ils vont modifier les règles de qualification. S’il y a de la place, j’aimerais bien y retourner et faire quelque chose. Je suis de retour à l’entraînement.

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