Gaël Le Bellec : « On sait où l’on veut aller »

Crédit photo Philippe Seys

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Cofidis Femmes, acte II. Après une année d’apprentissage, de découverte et de prise de repères en 2022 pour le lancement de l’équipe, la formation Cofidis s'est récemment lancée dans sa deuxième saison au sein du peloton féminin. Avec, toujours à sa tête, Gaël Le Bellec. Le directeur sportif, qui a choisi d’élargir son groupe, revient pour DirectVelo sur les débuts de la Conti nordiste tout en se projetant vers l’avenir et en évoquant les ambitions de la structure pour 2023. Entretien.

DirectVelo : Que retiendras-tu de la première saison de l’équipe Cofidis version féminine ?
Gaël Le Bellec : C’était une découverte pour moi et une partie de mon staff. On a tout créé en partant d’une feuille blanche. C’était hyper motivant et un super challenge, mais il y avait aussi une part d’appréhension. On savait qu’on allait être observés en portant le nom d’une équipe qui a plus de 25 ans d’âge chez les hommes. Je pense pouvoir dire que l’on a répondu aux objectifs que l’on s’était fixés, donc c’est satisfaisant.

Quels étaient-ils ?
Il y en avait surtout un : on voulait gagner une course, histoire de débloquer le compteur, ce qui a été chose faite sur le Tour de Bretagne (avec une victoire d’étape pour l’Italienne Martina Alzini, NDLR). On a terminé 28e du classement mondial, ce qui n’est pas forcément représentatif de notre niveau. Contrairement à d’autres Conti, on a été capables de jouer devant sur plusieurs épreuves WorldTour, même si ça n’a pas toujours payé et que ça ne s’est pas forcément vu via des résultats bruts. On aurait pu aller faire plus d’épreuves de Classe 2 pour scorer mais on n’a pas fait ce choix-là. On voulait prendre de l’expérience sur les plus grosses courses mondiales, en faisant notamment le choix de doubler Giro et Tour.

« NOUS N’AVIONS PAS LE CHOIX »

Avec le départ très rapide de Pernille Mathiesen, qui a fait le choix d’arrêter la compétition, tu as finalement tourné avec un groupe de dix unités…
La fin de saison a été compliquée de ce point de vue là car on a aussi perdu Clara (Koppenburg) qui devait être notre leader sur le Tour de France. Sa chute sur le Tour d’Italie a été synonyme de fin de saison pour elle, c’était évidemment un gros coup dur. On voulait jouer un général avec elle sur le Tour mais on a été obligés de changer d’optique. On a eu plusieurs blessées, sans parler du fait qu’Olivia Onesti était, aussi, parfois très prise par d’autres disciplines. Et à un moment donné, on n’avait plus que sept filles disponibles. Il a fallu faire des choix. On a dû renoncer à plusieurs épreuves comme le Tour des Pyrénées, le Tour de l’Ardèche, la RideLondon Classic ou encore le Tour de Burgos. Ce n’était pas fait avec plaisir car on respecte beaucoup le travail des organisateurs et on a besoin d’eux, mais nous n’avions pas le choix.

Les bases sont désormais posées pour l’avenir à moyen et long terme…
On a appris dans la difficulté. Maintenant, on est plus sereins pour cette deuxième saison, que l’on a abordée avec moins de stress. On sait où l’on veut aller. L’équipe masculine est garantie de faire les trois prochaines saisons au niveau WorldTour. C’est aussi une bonne chose pour nous, ça apporte également une sérénité supplémentaire car l’air de rien, en 2022, c’était tendu pour eux et donc pour nous aussi. On suivait l’évolution du classement mondial avec attention. 

Y'a-t-il eu des modifications au niveau du staff technique ?
Le staff de l’équipe a évolué et s'est étoffé. C’est la suite logique des choses, avec un groupe d’athlètes qui sera lui aussi plus important. On avait un mécano et un assistant en 2022 et on a doublé les effectifs en 2023. 

« ON VOULAIT AVOIR DEUX PÔLES BIEN DISTINCTS »

Évoquons la composition de l’effectif 2023, avec cinq nouvelles venues. Avais-tu une idée précise en tête, des profils en vue, au moment de concocter ce groupe ?
On souhaitait tout d’abord augmenter le nombre de jours de course de l’équipe. On passe à douze filles avec la volonté de pouvoir faire deux fronts et de se rapprocher, idéalement, des 80 jours de compétition dans l’année. On aimerait que chaque fille arrive à une moyenne de, grosso modo, 40 jours de course. En 2022, on était un peu en-dessous. On voulait avoir deux pôles bien distincts : celui des grimpeuses d'un côté, celui des sprinteuses et chasseuses de Classiques de l'autre. On a peu de filles qui sont entre ces deux profils, chacune ou presque a un profil bien défini. Dès décembre, les filles ont eu leur programme détaillé jusqu’en juin et on essaiera d’apporter le moins de modifications possible désormais. Nous avons trois pistardes dans l’équipe (Martina Alzini, Victoire Berteau et Valentine Fortin, NDLR), des filles qui nous apportent beaucoup mais il faudra composer avec leurs absences. C'est surtout le cas sur le début de saison, jusqu’en avril. Elles arrivent dans une période très importante, en pré-année Olympique. On va les laisser gérer au mieux tout ça. Pour le reste, on tenait à pouvoir mieux épauler Clara en montagne.

D’où l’arrivée de puncheuses-grimpeuses…
Morgane (Coston) a ce profil-là. Elle pourra aussi jouer sa carte de temps en temps mais l’idée principale, pour elle, sera d’épauler Clara le plus longtemps possible sur les épreuves montagneuses. Sur les Classiques, on manquait d’expérience et c’est la raison pour laquelle on a fait venir Josie Talbot. Elle développe des valeurs de puissance très intéressantes et peut faire de très belles choses.

En fin d'année 2022, tu as fait signer la pistarde britannique Megan Barker mais elle ne fait finalement pas partie de l'effectif. Que s'est-il passé ?
On se faisait une joie d'accueillir Megan dans le groupe. Au-delà de ses qualités indéniables sur la piste, elle sait frotter sur la route et l’air de rien, elle a montré de belles choses sur des courses difficiles en Grande-Bretagne. Mais elle nous a expliqué être usée psychologiquement et n'avait pas forcément l'envie de partir sur une saison complète sur la route à ce niveau. Elle a besoin de souffler. Elle a eu l'honnêteté de nous le dire très vite, avant que la saison ne commence, alors que nous devons initialement avoir un effectif de treize filles. 

« AVOIR ENTRE QUATRE ET SIX FRANÇAISES, C'EST BIEN »

Le départ de Cédrine Kerbaol a immédiatement été compensé par l’arrivée de Séverine Eraud, au lendemain de la présentation du parcours du Tour de France.
Était-il primordial d’avoir un nombre minimum de représentantes françaises au sein du groupe ?
Quand on arrive sur un Championnat de France en tant qu’équipe française, on ne peut pas venir avec deux ou trois filles. On en avait cinq en 2022, on en aura toujours cinq en 2023. Ce n’est pas encore la moitié mais je considère qu’avoir entre quatre et six Françaises, c’est bien. Séverine, je l’ai connue au Stade Rochelais et c’est la fille qui m’a fait la plus forte impression depuis que je travaille avec les équipes féminines. Elle sort de deux années difficiles, avec des problèmes de santé, mais je suis persuadé qu’elle est capable de retrouver le haut des classements. Quant à Flavie (Boulais), on l’a testée toute l’année 2022, avec un premier stage avec nous dès le mois de février, et elle a répondu présent. Elle a été irréprochable et on est heureux de l’ajouter au collectif.

Comment se sont déroulées les premières épreuves de l'année ?
Rachel (Neylan) a été performante en Australie. Ce n'était pas sous les couleurs de l'équipe mais ça l'a mise en confiance pour la suite. Clara (Koppenburg) a vite été intéressante alors qu'elle n'avait pas couru depuis sa chute sur le Tour d'Italie. Malheureusement, elle est diminuée après être tombée malade mais on va vite compter sur elle. Notre Slovène Spela Kern a bien débuté la saison sur les premières courses. Initialement, elle devait être équipière mais elle prend des responsabilités et ce sera encore le cas certainement sur les courses à venir. Les premières épreuves belges ne se sont pas très bien passées mais on a au moins posé les bases pour la suite. Il reste beaucoup de très belles choses à faire. 

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