Un collectif rôdé, un litige et surtout un triplé pour la Bretagne

Crédit photo Freddy Guérin - DirectVelo

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Cette fois, pas de quadruplé derrière Eglantine Rayer. Contrairement à la course de l’année passée, à Lorrez-Le Bocage-Préaux, les Bretonnes ont réussi à battre la Normande. Leur supériorité numérique s’est traduite par un triplé (voir classement). "Cette médaille d’argent, c’est sûr qu’elle est très belle mais ce que je retiens c’est surtout le triplé. On l’a fait, les trois Bretonnes sur le podium, c’est incroyable. L’année dernière, on l’avait un petit peu amer. Cette année, on a su apprendre de nos erreurs et mener la course de A à Z", se réjouit Lise Ménage, médaillée d’argent, et directement suivie par Alizée Rigaux, médaille de bronze. "C’est le scénario de rêve, on voulait vraiment le titre, on savait que ça allait être compliqué. On a un peu de mal à réaliser. On a fait une course parfaite parce qu’il y avait toujours une fille devant et il fallait juste contrôler".

La journée du comité de Bretagne s’est parfaitement achevée pour Aurélien Vauléon, conseiller technique régional (CTR). "C’est exceptionnel. On en oublie presque la difficulté de la journée, avec trois courses sous une chaleur écrasante pour tout le monde, les filles, les garçons et le staff. C’est une fin en apothéose". Ce succès valait bien de chaudes larmes, mélangées aux cris des coureuses au maillot noir à hermines. La vainqueure, Titia Ryo, a jonglé de bras en bras. Coéquipières, famille, staff, l’émotion était sur tous les visages. "C’est le résultat d’un collectif. Ce sont les huit filles, dont sept qui sont à la Breizh Ladies et seulement Louane Beret qui est en N2 à Lanester. À la différence de notre collectif chez les garçons, ce sont des filles qui travaillent toute la saison ensemble, avec le même staff. Des automatismes se créent et ça se voit sur le vélo. Ça paie automatiquement et ça rend toujours heureux, les filles comme le staff", synthétise Aurélien Vauléon.

« TOUTES LES ÉQUIPES AVAIENT IDENTIFIÉ LE DANGER »

Au briefing, la consigne était de faire valoir le collectif rodé des Bretonnes. "On avait mis une stratégie en place mais pas anti-Eglantine (Rayer). Il y avait plusieurs têtes à surveiller. C’est vrai qu’elle est très forte, on l’a encore vu aujourd'hui, mais on savait qu’en roulant de manière collective, on pouvait y arriver", estime Lise Ménage. À chaque kilomètre, une Bretonne occupait la tête de course. "Le briefing n’était pas forcément contre Eglantine, on voulait mettre certaines filles avec un coup d’avance dans les trois premiers tours et après sur les trois derniers, certaines devaient prendre à chaque fois les bons coups", ajoute Alizée Rigaux. Lise Ménage détaille davantage. "Dans les trois premiers tours, quatres filles étaient désignées pour attaquer, pour durcir la course. Elles l’ont très bien fait, elles ont pris de l’avance. On a même cru qu’elles pouvaient gagner. Finalement, ça n’a pas été le cas mais Titia (Ryo) a très bien pris le relais".

Aurélien Vauléon est plus tranché sur le plan « anti-Rayer ». "Clairement, on ne va pas se le cacher. Toutes les équipes avaient identifié le danger. On savait que ce serait la fille à ne pas laisser partir, pour laquelle il fallait durcir la course pour qu’elle soit la moins fraîche possible à l’arrivée. On avait des cartes qui allaient vite au sprint, peut-être même plus vite qu’elle, mais pour la battre il fallait arriver en même temps sur la ligne d’arrivée". Ou alors, avant elle. Comme Titia Ryo. Le CTR breton précise la tactique mise en place. "J’étais assez serein dans le dernier tour car on a vu que c’était terminé. On avait une tactique en place pour contrer l’ultra favorite. L’objectif était de ne pas la laisser respirer, de la laisser attaquer et la faire rouler toute la course pour se donner une chance dans le final de gagner le titre. On savait que ce serait compliqué, mais de là à penser faire 1, 2 et 3… c’était inimaginable".

« JE NE VOULAIS VRAIMENT PAS ÇA »

Pourtant, l’élimination d’Eglantine Rayer a bien failli se faire autrement qu’à la pédale. Avant la Pigeonnière, dans le dernier tour, la Normande et Alizée Rigaux s'accrochent. "En haut de la bosse, j’étais en train de boire et elle m’a doublée par la droite, du coup elle a accroché mon guidon, ça l’a fait partir dans le champ et j’ai voulu l’attendre, donc je me suis mise dans sa roue et elle a encore beaucoup roulé pour revenir sur Lise Ménage". Car la future médaillée d’argent avait pris une petite longueur d’avance après cet incident. "Je n’ai pas vu ce qu’il s’est passé, je me suis retournée. J’ai attendu un petit peu par fair-play mais j’ai vu qu'elle ne ressortait pas. J’avais peur que ça revienne derrière donc j’ai continué à rouler mais heureusement pour elle, ce n’était rien de grave et elle est revenue". Alizée Rigaux regrette forcément ce moment de confusion. "Je ne l’ai vraiment pas sentie. Je ne l'ai vraiment pas vue", insiste-t-elle.

Elle tente encore d’expliquer. "Je me suis dit elle s’est accrochée, c’est con, je ne voulais vraiment pas ça, ce n’était pas mon but, en plus elle a roulé toute la course donc elle méritait autant que nous. Elle a fait une super course, c’est dommage pour elle". La décision s’est faite au sprint pour la médaille d’argent. "Elle me rattrape avec Alizée à 1 km de l’arrivée et elle lance le sprint de très loin, à 500 mètres. Vu qu’elle avait roulé toute la course, nous on était dans un fauteuil". Faute, pas faute, intentionnel, pas intentionnel… L’histoire retiendra en tout cas que la nouvelle Championne de France s’appelle Titia Ryo. "Elle n’est que J1 mais c’est une fille déjà très mature pour son âge. Elle est très réfléchie sur le vélo, toujours motivée mais aussi motivante. Elle est joyeuse et toujours là pour mettre l’ambiance et la bonne humeur dans le groupe, sourit Aurélien Vauléon, en montrant du doigt Titia Ryo en train de plaisanter sur le parking. Ça aurait pu être une autre aujourd’hui, mais elle le mérite". Et sa victoire ne peut souffrir d’aucune contestation.

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