Une victoire au goût amer pour Louis Rouland

Crédit photo Elise Chauveau - DirectVelo

Crédit photo Elise Chauveau - DirectVelo

Louis Rouland se souviendra longtemps de son premier succès en Élite Nationale. De son côté, Thomas Devaux n’est lui pas près d’oublier l’édition 2022 d’Arbent-Bourg-Arbent. Premier coureur à avoir franchi la ligne, le coureur de Charvieu-Chavagneux IC a été mis hors course ce dimanche par le jury des commissaires. “C'est un peu écœurant. Je me sentais fort, je savais que j'étais le plus fort, clairement”, peste-t-il au micro de DirectVelo. “Je suis un peu amer pour ma première victoire. Selon moi, c’est lui qui a gagné. Il était vraiment plus fort”, reconnaît le Sarthois de Bourg-en-Bresse Ain Cyclisme.

Tout le monde est unanime, Thomas Devaux était bien le plus costaud ce dimanche. “On se retrouve à cinq avec trois de Bourg et Valentin (Retailleau). Je tente d'abord une fois dans l'avant dernière bosse. Je me retrouve seul, je prends un rond-point à gauche, comme tous les ronds-points de la course quasiment, et comme tout le monde l'a fait. Et on me dit que derrière j'avais deux poursuivants. Un a pris à gauche, un a pris à droite”. Selon Thomas Devaux, il lui a été demandé d’attendre les deux premiers poursuivants, Jacques Lebreton (Bourg-en-Bresse Ain Cyclisme) et Thibaud Saint-Guilhem (AVC Aix-en-Provence). “J'avais déjà beaucoup d'avance. J'ai accepté”.

« UNE MISE HORS COURSE IMMÉDIATE »

Il restait alors une petite dizaine de kilomètres. “Je pense que je partais pour gagner. On m'a mis un bâton dans les roues. D'autres coureurs sont revenus. Je devais refaire la différence”. Alors il en a remis une à cinq bornes du but et personne n’a été en mesure de le suivre, une nouvelle fois. “Il restait un dernier rond-point, je me suis dit on a pris à gauche toute la course. Peut-être que ma décision était irrationnelle en ayant le cœur à 200, à 1500 mètres de la ligne, mais j'avais course gagnée. Je me disais que si je prenais à droite, et tous les mecs derrière à gauche, ça me faisait chier”.

Dans le dernier kilomètre, une moto commissaire l’informe de sa mise hors course. "Ça lui a été signifié et l’arbitre lui a dit qu’il était mis hors course, rapporte le président du Jury, Guy Perrusset. Il a essayé de l’arrêter mais il a quand même été jusqu’à la ligne. On n’allait pas le faire tomber pour qu’il s’arrête immédiatement… Mais c’était bien une mise hors course immédiate”. Thomas Devaux passe la ligne en levant les bras, avec 22 secondes d’avance sur Louis Rouland. Ce dernier a été informé de la situation à la flamme rouge. “Une moto est venue nous dire qu’il était déclassé. Sur le vélo, dans le feu de l’action, je n’ai pas forcément prêté attention. Je suis sorti à la flamme rouge dans l’optique de finir 2e”.

Dans l’aire d’arrivée, l’ambiance est un brin irréelle. Alors que les commissaires sont réunis dans le camion situé sur la ligne, ils reçoivent la visite du directeur sportif isérois Antoine Bravard, désireux de connaître une décision qu’il redoute, puis de Louis Rouland. Le coureur de 19 ans semble le plus embêté par la situation. “Franchement, ne me mettez pas vainqueur. Je ne veux pas gagner comme ça”, répète-t-il deux fois à qui veut l’entendre. “Le rond-point n’a rien changé. Sportivement, il était le plus fort. Je suis déçu pour lui. Ce n’est pas moi qui ai décidé”, confie-t-il plus tard à DirectVelo. La décision est en effet tombée une bonne trentaine de minutes après l’arrivée : Thomas Devaux, 1er, et Jacques Lebreton, 4e, sont mis hors course.

BOURG-EN BRESSE NE VOULAIT PAS GAGNER DE CETTE FAÇON

Cette décision permet au club organisateur de gagner à domicile. Le raccourci est facile, et a été entendu près de la ligne d’arrivée. Thomas Devaux a-t-il été déclassé pour favoriser un sociétaire de Bourg-en-Bresse Ain Cyclisme ? “J’ai demandé au jury des commissaires comme on faisait 2e de ne pas le déclasser. Le jury a fait autrement”, constate le président du BAC, Stéphane Marion. “Le président n’y était pas très favorable, confirme Guy Perrusset. J’ai pris note de son avis. Ceci dit, ma réputation était aussi engagée. Dans un cas comme dans l’autre, la décision était vouée à la polémique. Si on ne l’avait pas déclassé après ce qu’on avait dit, ça aurait voulu dire qu’on n'aurait pas respecté la réglementation. De l’autre côté, on peut parler de favoritisme car le 2e est un gars du club…”. Il l’assure, la décision était "extrêmement délicate” à prendre. “Je m’imagine la déception du coureur. C’est horrible. Malheureusement, au-delà de cet aspect sentimental, car on est tous des humains, on est là pour valider un résultat, sans idée de sanctionner. Je sais que c’est une décision grave”.

Thomas Devaux parle d’une injustice. “Je tiens à m'excuser envers mes adversaires d'avoir profité de ces choses-là mais je ne pense pas y être pour grand-chose…". Il devra patienter pour s’offrir une cinquième victoire en 2022. “Je sais que je suis en forme, j'étais le plus fort aujourd'hui, personne ne pourra me l'enlever”. Le président bressan est bien d’accord. “J’espère que ça n’entachera rien à sa carrière et je lui souhaite de passer au niveau supérieur assez vite parce que je pense qu’il en a le potentiel. Sportivement, Thomas a gagné. Il était l’homme de la course. Je lui souhaite de gagner très vite dès sa prochaine course à l’Alpes Isère Tour. J’aime bien cette phrase de Nelson Mandela : « Je ne perds jamais, j’apprends ». Elle s’applique là”.

S’il avait bien du mal à se réjouir de son succès, Louis Rouland a aussi de quoi positiver. “Si on fait abstraction du classement, les sensations étaient bonnes. C’était une bonne journée”. L’histoire retiendra qu’il y a quatre ans, sur le Tour de l’Ain, Nicolas Edet avait été déclassé au profit de Javier Moreno pour avoir pris à gauche sur ce même dernier rond-point. Une anecdote qui a fait sourire un Louis Rouland bien gêné par la situation, lui qui partage des sorties d'entraînement en Sarthe avec le coureur d’Arkéa-Samsic.



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