Simon Guglielmi : « J’attends qu’on me tende la main »

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

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C’est une nouvelle à laquelle il ne s’attendait pas du tout. Début juillet, Simon Guglielmi a appris, de la voix d’Yvon Madiot, qu’il ne figurerait plus dans l’effectif de la Groupama-FDJ en 2022. Un très gros coup dur pour le coureur de 24 ans, qui se disait particulièrement heureux dans la structure WorldTour et qui considérait accomplir le travail demandé. Ce jeudi, à l’occasion du Tour de l’Ain (2.1), le Savoyard va donc se lancer dans une dernière partie de saison durant laquelle il va falloir convaincre une équipe de lui offrir une place pour la saison prochaine. Et pour mettre toutes les chances de son côté, il s’est également offert les services de l’ancien coureur Christophe Le Mével, qui lui sert désormais d’agent dans la quête d’une nouvelle aventure chez les pros. Entretien.

DirectVelo : Dans quel état d’esprit abordes-tu le Tour de l’Ain, ta première compétition depuis l’annonce de ta non-reconduction de contrat avec la Groupama-FDJ pour la saison prochaine ?
Simon Guglielmi : Je m’entends très bien avec le staff et les coureurs, ça ne change donc rien au sein du groupe, au quotidien, dans ma relation avec ces personnes que j’apprécie. La seule différence, c’est que je sais que je ne vais pas être gardé. Je suis donc encore plus motivé car, en quelque sorte, j’ai cette rage, cette envie de leur montrer qu’ils ont eu tort de ne pas me garder. Je sens que je progresse et que je peux encore m’améliorer. Je suis capable de passer encore un cap, j’en suis convaincu. Je progresse à mon allure. Alors, certes, ce n’est peut-être pas spectaculaire, mais je trace mon chemin petit à petit. Et je ne vais rien lâcher, bien au contraire. Je ne sais pas comment je serai sur le Tour de l’Ain car je sors de stage. Mais je pense déjà à des courses comme le Tour du Limousin ou la Polynormande. J’aurai un beau calendrier en fin de saison, je n’ai pas à me plaindre. J’aurai l’occasion de m’exprimer.

Comprends-tu cette décision des dirigeants de la Groupama-FDJ ?
Je respecte totalement leur décision, ils ont forcément de très bonnes raisons d’avoir fait ce choix-là. Mais je suis quand même surpris et déçu. J’ai ma place chez les pros et j’avais ma place à la Groupama-FDJ, me semble-t-il. Les premiers jours, ça a été très dur à vivre, c’était un peu la déprime…

Comment l’as-tu appris ?
C’était dix jours après le Championnat de France. Je venais de couper une semaine et j’étais dans une bonne dynamique à cette période. Le téléphone a sonné… C’était Yvon (Madiot). Je sentais à sa voix que c’était difficile aussi pour lui de me l’annoncer… Je me souviens qu’à l’époque, c’est déjà lui qui m’avait appelé pour m’annoncer que j’étais pris à la Conti, puis c’est encore lui qui m’avait appelé pour me dire que j’allais passer dans la WorldTeam. Pour cette fois, il aurait sûrement préféré me le dire les yeux dans les yeux mais l’équipe voulait que ça se fasse dès le mois de juillet. On aurait pu se voir lors du Tour de France mais avec la bulle sanitaire, je me serais retrouvé derrière les barrières, au départ d’Albertville… Ce n’était pas l’idéal non plus. Donc ça s’est fait comme ça. Au moment de l’annonce, j’étais triste… Mais pas énervé. C’est simplement que je ne m’y attendais pas. Je me voyais continuer à la Groupama-FDJ car ça se passait très bien. Je m’imaginais continuer pour deux ans de plus avec l’équipe, honnêtement. J’avais l’impression d’avoir ma place au sein du groupe.

« SI C’EST LE CAS, ALORS JE N’AI PAS DE REGRETS, CHACUN A SES QUALITÉS »

Et tu t’y sentais bien !
Oui, je m’étais fait de bons copains dans l’équipe. C’est presque ça, le plus dur. Je suis triste de quitter un bon groupe dans lequel j’ai pris beaucoup de plaisir. Je suis dans l’équipe depuis un petit moment… Si on part du moment où la fondation a commencé à me suivre, ça fait drôle de se dire que c’est la fin de cette histoire-là. D’ailleurs, je sais que pas mal de coureurs ont également été surpris d’apprendre que je n’allais pas être conservé.

Quelle a été la tenue du discours d’Yvon Madiot pour justifier ce choix ?
Déjà, il faut savoir que lorsqu’ils m’ont recruté (fin 2019, NDLR), ils cherchaient plutôt un grimpeur, à la base. Mais ils ne l’ont pas trouvé et ils m’ont choisi moi, en tant que “coureur complet”. Ils m’ont donné ma chance en se disant qu’ils allaient voir ce que ça pourrait donner en montagne. Sauf que je passe bien les bosses, mais pas de là à accompagner un leader dans les derniers kilomètres d’une arrivée au sommet en WorldTour. Je pense que c’est la raison pour laquelle je n’ai pas été conservé et si c’est le cas, alors je n’ai pas de regrets. Chacun a ses qualités, et les miennes ne sont pas celles d’être un pur grimpeur. Or, l’équipe cherche des grimpeurs pour 2022.

As-tu vite compris que l’on allait compter sur toi en montagne au début de ton aventure dans l’équipe ?
Pas trop l’an passé. Mais cette année, ils m’ont dit qu’ils allaient me faire découvrir la haute montagne sur plusieurs courses. C’est pour ça que j’ai été aligné sur le Tour de Catalogne puis le Tour des Alpes. Mais ce n’est pas dans mes aptitudes. Au terme du Tour d’Italie, on m’a fait comprendre que l’on attendait mieux de moi en troisième semaine et que je n’avais pas forcément été à la hauteur. C’est la toute première fois que l’on me tenait ce genre de discours car jusque-là, on n’avait toujours eu que des mots positifs quant à mon travail. Ils ont dû penser que je serais capable d’avoir une grosse marge de progression en montagne mais, encore une fois, ce n’est pas dans mes aptitudes.

« J’AVOUE QUE JE SUIS QUAND MÊME STRESSÉ, JE ME DEMANDE SI UNE ÉQUIPE AURA DE LA PLACE POUR ME PRENDRE »

Es-tu inquiet pour la suite de ta carrière ?
Au fond de moi, j’essaie de rester confiant. J’ai déjà fait deux fois le Giro. J’ai bien aidé Arnaud (Démare) la première fois et je pense avoir été un élément clé, comme tous mes autres coéquipiers. Cette année, on a défendu le maillot rose (d’Attila Valter, NDLR). J’ai pris des échappées quand j’en ai eu l’opportunité et j’ai terminé 5e sur l’étape des Strade Bianche (de Pérouse à Montalcino, remportée par Mauro Schmid, NDLR). Je sens que c’est dans mes cordes, y compris au plus haut niveau. Mais oui, j’avoue que je suis quand même stressé. Je me demande si une équipe va avoir de la place pour me prendre. C’est forcément inquiétant. Je n’attends qu’une chose maintenant, c’est qu’une équipe m’appelle… J’attends qu’on me tende la main.

Crains-tu de ne pas bien vivre cette pression du résultat qui va, peut-être, s’emparer de toi dans les semaines à venir ?
Je n’ai pas besoin de cette pression-là, en tout cas. Je sais que certains coureurs ont parfois besoin de ce type de booste pour ne pas s’endormir sur leurs lauriers mais ce n’est clairement pas mon cas. Je préfère être serein pour bien faire les choses. Là, il m’arrive de cogiter le soir en allant me coucher. Ce n’est pas l’idéal, mais je vais faire avec.

Que souhaites-tu dire aux managers d’équipes à qui il resterait encore des places pour l’an prochain ?
Que je pense avoir fait du bon boulot, sérieux et appliqué, durant mes deux saisons à la Groupama-FDJ. Que si l’équipe ne me garde pas pour 2022, c’est parce qu’elle a décidé de recruter des purs grimpeurs et que je ne fais pas partie des coureurs capables d’emmener un grand leader des courses par étapes quasiment jusqu'au sommet d’une ascension finale. Mais je suis capable d’autres choses : je sais être un équipier dévoué, pour un sprinteur, par exemple. Je l’ai déjà démontré. Je sais aussi prendre ma chance quand on me la donne. Je peux très bien jouer ma carte personnelle sur des courses pour puncheur-sprinteur, tout en travaillant aussi pour l’équipe avant ou après si le scénario de la course le réclame. Récemment, j’étais devant à Paris-Camembert, dans le bon groupe, avant de crever des deux roues. Sur le Championnat de France, j’étais aussi à l’avant et j’ai aidé Rudy (Molard) à faire 2e. Je peux me montrer à l’aise sur les efforts courts en montées sèches, sur cinq minutes ou moins, quand ça se fait au lactique. Il y a plein de courses de ce type dans le calendrier. Je pense sincèrement avoir encore plein de belles choses à faire dans le peloton et je sais, sans prétention aucune, que j’en ai le niveau.

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