Guillaume Gerbaud appelle à rester unis

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

Crédit photo Zoé Soullard - DirectVelo

Coureur de l’UV Limoges-Team U 87, mais médecin du sport dans la vie, Guillaume Gerbaud a de fait un rôle particulier en pleine crise sanitaire. Bien que son activité ait été suspendue, il apporte son aide à la clinique de Limoges, pour de la médecine de base et en traumatologie. Mais aussi auprès des coureurs qui lui demandent conseil. L’ancien champion du Limousin du contre-la-montre souhaite surtout passer un message essentiel dans la période actuelle : la solidarité entre tous, et une union nationale.

DirectVelo : A quoi ressemble ton quotidien ?
Guillaume Gerbaud : Il est zéro, aujourd'hui je ne fais plus du tout de médecine du sport. On est obligé de fermer avec le confinement. Je suis dans une clinique et le Plan Blanc a été déclenché. L’après pose aussi question. Il va falloir faire passer des gens en priorité avec les délais de consultation. L’arrêt pose des problèmes, mais c’est évidemment normal. Me concernant, je travaille un jour et demi par semaine. La clinique est en deuxième ligne, on préfère s’entraider en restant autant que possible chacun dans nos domaines de compétence. Le travail est essentiellement le matin. L'après-midi, je m'occupe chez moi, je roule sur des plateformes en ligne. Je fais comme tout le monde. Mon temps de travail est pour l’instant limité par rapport à d’autres régions plus sinistrées.

Tu n’es donc pas encore débordé...
A Limoges, on a des soins continus et on n’est pas du tout en saturation pour le moment, ils hospitalisent tout le monde à l’heure actuelle. Il y a encore de la marge. Comme mon activité est fermée, on a tous été redirigé sur la base du volontariat à la clinique. Je suis jeune médecin, donc je ne peux pas faire de soins continus ou de réanimation, mais je donne un coup de main en traumatologie, quand il y a de la casse. On alterne entre tout le monde, j'y vais quand il y a besoin, je vais donner un coup de main. Si ça venait à déborder, je suis responsable de la traumatologie. Je fais un peu de médecine de base avec des patients covid, avec une petite exposition au virus, mais on est équipé pour ne pas être contaminé. Je me suis porté volontaire tant qu'il y a besoin dans mon corps de métier. Le Limousin est plutôt épargné pour le moment, mais on est organisé si ça devient bouché.

« DU BON SENS, DU CIVISME »

Est-ce que des coureurs t’ont demandé des conseils ?
Première phase, les coureurs se posaient des questions. Est-ce qu'il fallait rouler ? Ne plus rien faire ? Beaucoup disaient qu'ils n’allaient pas transmettre le virus tout seul sur leur vélo. Mais je ne m’imagine pas me faire une clavicule, aller aux urgences, et dire aux collègues : ‘’j'ai fait le con’’. Au début il a fallu faire de la pédagogie. Faire du sport c'est bon pour la santé, mais là c'est la loi. Ce n’est pas parce qu'on est sportif qu'on est exonéré de respecter la loi. C'est du bon sens, du civisme. Surtout qu’en vélo, la traumatologie est importante, ça nécessite des interventions. La deuxième phase était de gérer la crise. Beaucoup se sont arrêtés dès le début, alors je rassure les mecs en leur disant que ceux qui étaient en forme avant le seront après. C'est plus sur la gestion de l'entrainement, ce qui est bien ou pas. Certains demandent les dates de fin de crise. On ne peut pas se projeter sur un entrainement sans connaitre la reprise. Aujourd’hui, l’important, c’est conserver de l’intensité sous toutes ses formes car c’est ce qui se perd le plus vite.

Tu sens que tu as un rôle à jouer dans cette période ?
On a un rôle majoritairement d'information. Je travaille aussi avec le club de basket de Limoges. J'interviens auprès des sportifs et staff pour rassurer un peu. Faire de la pédagogie, expliquer les gestes barrières, expliquer la propagation du virus. Certains sportifs m'écrivaient car ils avaient besoin d’être rassurés. Maintenant, c'est plus pour se tenir informés. La clinique tient au courant de ce qui se passe. Mais mon vrai rôle de médecin du sport, il est arrêté. Le sport est à la fois secondaire et important, ça a un impact positif. C'est ni tout blanc ni tout noir dans un sens ou dans l'autre. J’insiste surtout sur le fait que ce n’est pas le moment de faire des querelles et des comparaisons, savoir qui a bien fait ou pas. On doit juste rester unis.

« REFAIRE DU LIEN SOCIAL »

Tu comprends que certains coureurs souhaitaient rouler au début du confinement ?
Les mesures laissaient place à l'interprétation, donc chacun a interprété. Je comprends que les gens veuillent aller rouler. Mais une fois qu'on a eu l'explication après la prise de parole du Président le lundi, il n’y avait plus de place au doute. Avant, je peux comprendre. Après, non. Dans le sport, on s'occupe essentiellement de nous, notre carrière etc. Là, on peut refaire du lien social, c'est dans ces moments que c'est le plus important. Il faut garder une relation avec les gens qu'on apprécie. On s'appelle, on ne reste pas isolé, on discute... C'est important. C’est le mot d’ordre que je donne, il faut être solidaire et garder le lien avec ses collègues, le bout du tunnel n’est pas si loin que ça. Ce qui compte aujourd’hui, c'est de se faire plaisir. Et quand on aura une date on s'y tiendra, mais pour le moment la santé compte avant tout.

Tu arrives encore à penser au vélo ?
Ce n’est pas facile de monter sur le vélo tous les jours, sur les plateformes en ligne. J'ai quand même envie d'en faire, je reste un compétiteur. J'ai d’ailleurs gagné une course en ligne et fait quelques podiums. J'aime le vélo donc j'en ferai toujours. Mais il ne faut pas dire et faire trop de bêtises, car il y aura un après. Il y aura une sortie de crise, le mieux va arriver vite. Il faut garder les objectifs, manger normalement, et garder tout ça à l'esprit. Nous en sport, il ne faut pas compter avant juin pour les courses, à voir si on peut ressortir en mai. De toute façon, il est presque sûr qu’on aura le temps de reprendre l’entraînement sur route au moins un mois avant la compétition. Donc en attendant, ce n’est que de l’entretien.

Mots-clés

En savoir plus

Portrait de Guillaume GERBAUD