Yoann Offredo : « Je manquais de confiance en moi »

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

A 30 ans, Yoann Offredo aura donc attendu sa douzième saison professionnelle pour participer à son premier Tour de France. Le sociétaire de la formation belge Wanty Groupe-Gobert devrait entamer cette "Grande Boucle" en très bonne condition le week-end prochain, en témoigne sa 9e place, ce dimanche, sur le Championnat de France de Saint-Omer (Pas-de-Calais). Mais comment a-t-il vécu son transfert vers la Belgique après onze années passées à la FDJ ? De quoi rêve-t-il aujourd'hui ? Yoann Offredo fait le point avec DirectVelo.

DirectVelo : Penses-tu qu'il y avait la possibilité d'aller faire un gros coup sur ce Championnat de France ?
Yoann Offredo : C'est une course de vélo. C'est déjà pas mal car nous avons un peu contrecarré les plans de la FDJ. Ce n'est pas évident puisqu'ils sont costauds et qu'ils savent faire. Ils n'ont jamais paniqué et ils avaient tous confiance en Démare. J'ai vécu toute cette bagarre (entre la FDJ, la Cofidis et Direct Energie, NDLR) complètement de l'extérieur. Pendant onze ans, j'avais un rôle précis à tenir à la FDJ. Aujourd'hui, je n'en avais pas. Quand on regarde de l'extérieur le travail de la FDJ, on se dit que c'est compliqué de faire tomber une équipe comme ça. Ils avaient tous les cartes en main. De mon côté, j'ai cassé ma selle sur le secteur pavé à un moment crucial. J'avais entendu deux-trois chuchotements dans le peloton... Je sentais que c'était le moment où ça allait faire la course. C'est parti au pire moment, lorsque j'ai changé de vélo. J'ai fait un gros effort pour rentrer. C'est ce qui m'a coûté une meilleure place mais de toute façon, ça arrive au sprint alors je ne sais pas s'il y avait vraiment moyen de faire mieux sur ce Championnat.

« CE N'EST JAMAIS FACILE »

Tu as été très offensif dans le final...
J'étais revenu devant au prix d'un gros effort. Puis j'ai senti que c'était le bon moment pour attaquer, puis retenter. Il ne m'a pas manqué grand-chose pour basculer devant. Je pense qu'avec 15-20 secondes d'avance en haut de la bosse, c'était jouable. Il y avait énormément de vent mais avec une partie vent de face et une autre qui poussait dans la descente. J'aurais préféré une partie latérale, ça aurait changé la course. Mais c'était quand même 250 kilomètres. Ce n'est jamais facile.

Plus généralement, tu disputes actuellement ta première année du côté de la formation Wanty Groupe Gobert après pas moins de onze saisons à la FDJ. Comment s'est passée cette première moitié de saison pour toi ?
C'est beaucoup de changements. Quand tu es habitué à une structure comme la FDJ qui est très rodée et où tout fonctionne très bien depuis de nombreuses années, tout roule. Là, c'est un peu différent avec une équipe qui, mine de rien, est jeune. Ce n'est pas parfait sur plein de points mais justement, c'est un challenge intéressant. J'ai découvert une approche des courses différentes, un côté flamand qui m'a toujours fasciné dans le vélo. J'ai voulu voir, et j'ai vu.

« ON NE ME DEMANDE RIEN »

Tu avais besoin de ce nouveau challenge ?
Dans la vie, on a tous besoin de se remettre en question à un moment donné. C'était certainement le moment de le faire. J'avais envie de goûter à quelque chose de différent et être dans une équipe belge était intéressant.

Quel rôle te demande-t-on de tenir au sein de l'équipe ?
On ne me demande rien du tout. Ça se fait tout naturellement car j'ai quand même un peu d'expérience, même si je me suis souvent mis au service des autres. Tu as des coureurs comme Guillaume Martin ou Fabien Doubey qui sont très jeunes et ont beaucoup de talent mais qui ont encore beaucoup de choses à apprendre. Sur la première partie de saison, je me suis concentré un peu plus sur ma personne sur des courses que j'aime bien. Depuis, après les événements du printemps, je me suis tourné vers un autre registre que je ne connaissais pas avec les courses par étapes. Je manquais certainement de confiance en moi par le passé et maintenant, je me plais dans ce rôle-là en donnant des conseils à des mecs comme Guillaume (Martin). J'essaie de prendre du plaisir sur le vélo.

« JE NE SUIS PAS UN GRAND CHAMPION »

As-tu des libertés en terme de calendrier ?
Tout ça a été défini dès le début de saison. J'avais deux gros objectifs au printemps avec le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. Puis bien sûr, je visais le Tour de France. Ce sera mon premier (et son deuxième Grand Tour après le Tour d'Espagne 2010, NDLR). Il y a un échange mutuel : j'essaie d'apporter mon expérience et eux m'apportent des libertés.

Quelle relation entretiens-tu avec le front belge de l'équipe ?
Un Français qui arrive et qui essaie de prendre le leadership sur les classiques, ce n'est pas toujours évident. Mais j'ai su trouver ma place assez facilement. Au delà de l'expérience sportive, c'est une superbe expérience humaine. On a des coureurs qui viennent d'horizons différents, comme Frederik Backaert qui est agriculteur, qui parle plusieurs langues. Il y a aussi des Flamands qui se mettent à l'anglais et avec qui on peut communiquer. On a le personnage Hilaire Van Der Schueren (directeur sportif, NDLR) qui est très atypique et quelqu'un d'entier. Dès le début de saison, il a su me mettre à l'aise et j'ai trouvé ça sympa. Pour le reste, je me doute que je ne suis pas un grand champion et qu'à moins de courir "très très juste" ce sera compliqué de gagner un Tour des Flandres ou Paris-Roubaix un jour.

« JE SUIS ÉPICURIEN »

De quoi rêves-tu aujourd'hui ?
Je suis arrivé à un âge où j'ai envie de me faire plaisir sur le vélo, faire ce que j'aime et partager ma passion avec les jeunes. Et c'est ce que je fais. Je me rends compte aussi que le métier d'équipier, c'est quelque chose de sympa. Tu as moins de pression. Pour moi, le vélo est un sport populaire et qui doit faire rêver. Encore une fois, je n'ai pas la prétention d'être un champion mais par contre, j'essaie de bien faire mon métier et de partager tout ça. J'ai trouvé ma place.

Tu t'imagines repartir pour de longues années ?
Je ne me pose pas trop la question. Je suis épicurien : Qui vivra verra. Je pense que dans le vélo, la tête joue pour beaucoup. Si tu te fais plaisir sur le vélo, si tu n'es pas fatigué de tous les à-côtés, tu peux continuer longtemps.

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