L'Armée de Terre continue son apprentissage

La formation de l'Armée de Terre a fait ses débuts chez les professionnels en janvier dernier, après avoir dominé les épreuves amateurs durant plusieurs saisons. Au terme des six premiers mois de compétition, il est l'heure pour David Lima Da Costa de faire un premier bilan sur cette ''période d'apprentissage'' qu'il juge ''satisfaisante et encourageante''. Pour DirectVelo.com, le manager général de l'équipe Continentale en profite pour annoncer le stage de formation militaire de quatre semaines auquel l'ensemble de l'équipe participera, en septembre.

DirectVelo.com : Comment résumerais-tu les six premiers mois de l’équipe dans le monde professionnel ?
David Lima Da Costa : Nous découvrons toujours le milieu professionnel. C’est tout d’abord une découverte des différentes courses du calendrier, après des années de participation aux mêmes épreuves amateurs. Il a fallu un temps d’adaptation à tout le monde pour découvrir la façon de courir chez les pros. Les deux dernières heures de courses sont très rapides, et il faut pouvoir encaisser les accélérations des fins de course. Il a également fallu s’adapter à des distances plus longues, particulièrement lors des courses par étapes où il faut enchainer les efforts. Au niveau du comportement, nous n’avons pas de complexes. On a pris nos marques et on arrive à se faire respecter. Le bilan est positif, d’autant que nous avons dû composer avec plusieurs blessés. L’équipe progresse. J’ai bien conscience qu’il y a encore beaucoup de travail et de choses à perfectionner pour aller gagner des courses importantes.

« ON A PROGRESSE DANS BEAUCOUP DE DOMAINES »

Qu’en est-il des résultats bruts ?

J’en suis très satisfait. Quentin Pacher a terminé 4e d’étape sur la Route du Sud au milieu des Contador et Quintana. Romain Combaud a pris une 3e place d’étape sur les Boucles de la Mayenne. Malgré ce temps d’observation et d’apprentissage, certains coureurs ont rapidement pris confiance en eux. En plus, on a marché d’entrée ou presque. Quentin Pacher nous a fait un numéro sur le Tour du Haut-Var. On a également placé deux coureurs dans le Top 10 de la Classic Sud-Ardèche et de la Drôme Classic : des résultats exceptionnels pour nous ! Je n’oublie pas non plus la 7e place de Fabien Canal au Tro Bro Leon. On a progressé dans beaucoup de domaines. Les coureurs ont appris à adapter leurs plannings d’entrainement, à cibler certains objectifs précis sur leur calendrier. Tout cela favorise l’arrivée de bons résultats. On a progressé au sprint aussi, et c’est encourageant pour l’avenir. Je suis très content de notre train qui est tout nouveau.

As-tu un exemple précis en tête ?
Il y a eu un gros déclic sur la dernière étape de la Route du Sud, où l’on a fait un vrai travail pour emmener le sprint parfaitement à Julien Duval. Regardez la vidéo du final, et vous verrez le travail qui a été réalisé. J’en suis très satisfait. Alors certes, aujourd’hui nous n’avons pas encore un grand sprinter, mais j’espère que ce sera le cas bientôt, pourquoi pas dès l’année prochaine avec Bryan Alaphilippe qui est encore en apprentissage. Il ne faut pas oublier que c’est le plus jeune coureur professionnel français à l’heure actuelle, à 19 ans.

« INUTILE D’ENVOYER LES JEUNES DANS DES GALERES »

Comptes-tu préserver les jeunes comme Bryan Alaphilippe jusqu’à la fin de la saison, ou y aura-t-il un roulement d’ici au mois d’octobre ?

J’essaie de préserver des jeunes comme Bryan Alaphilippe en les alignant sur pas mal d’Elites Nationales ou de Classe 2, même si Bryan a participé à l'Etoile de Bessèges ou au Tour de Picardie (5e d'étape, NDLR). Je pense également à Jordan Levasseur, David Cherbonnet ou Benjamin Thomas. Ces coureurs sont encore très jeunes et un poil tendre pour les grandes courses du plus haut niveau. Ils ont encore le temps d’apprendre. Inutile de les envoyer dans des galères. Actuellement chez les pros, nous tournons avec un groupe de 12-13 coureurs qui ont la caisse pour passer les 200 bornes.

Es-tu satisfait du rendement de ceux que l’on pouvait présenter comme les « capitaines de route », les coureurs expérimentés de l’équipe ?
Tous n’ont pas été épargnés pour l’instant. Benoit Sinner a été blessé et il commence tout juste à retrouver une bonne condition. Je compte sur lui pour la fin de saison. Yann Guyot espérait mieux de ses débuts professionnels. Il a eu du mal à s’adapter mais il reste présent et peut faire un coup à tout moment. Jérôme Mainard a du mal quand ça frotte. Lui aussi doit s’adapter mais il a fait un très beau Championnat de France et maintenant que les beaux jours arrivent, il peut faire de belles choses. Romain Combaud s’est bien adapté, Quentin Pacher a très bien marché. Julien Duval est une valeur sûre. Ces coureurs-là représentent le noyau dur de l’équipe actuellement.

« IL A FALLU S’HABITUER A NE PLUS GAGNER »

Malgré quelques victoires en Elites Nationales et en Classe 2, l’équipe gagne beaucoup moins que les années précédentes. Est-ce difficile à vivre pour les coureurs ?

Il faut bien réaliser que l’an dernier, nous avions terminé l’année avec pratiquement 70 victoires. C’est énorme. Depuis trois ans, on gagnait presque tous les week-ends. Cette saison, il a fallu s’habituer à ne plus gagner, à se contenter de Top 10. Certains ont pris une claque dès l’Etoile de Bessèges, en réalisant que c’était un autre monde. Mais au fond, nous savions tous très bien que l’on n’allait pas arriver et tout gagner de suite ! Cela aurait été trop facile.

Cette année, les trois autres formations Continentales françaises jouent les premiers rôles sur de nombreuses courses françaises : trouves-tu cela encourageant pour ta propre formation ?
C’est un point très important et très intéressant à signaler ! Pour moi, le Team Marseille 13-KTM a été la meilleure équipe française du début de saison ! Ils ont notamment pu gagner les Quatre jours de Dunkerque (2.HC). Roubaix-Lille Métropole a été en tête de la Coupe de France et a longtemps joué les premiers rôles sur différentes manches, puis Auber 93 en a remis une couche avec notamment un doublé en Coupe de France, une victoire sur la Route du Sud, le titre de Champion de France. Les résultats des Continentales sont exceptionnels. Cela nous encourage à avancer.

« ASSURER LA RECONVERSION DE CHAQUE COUREUR »

Comment s’annonce la fin de saison de l’équipe de l’Armée de Terre ?

Il y a deux choses essentielles à noter. La première, c’est que j’ai décidé d’alléger le calendrier de l’équipe au mois de juillet. Après le Tour Alsace, le mois d’août sera beaucoup plus chargé avec la Polynormande, le Tour de l’Ain, le Tour du Limousin et le Tour du Poitou-Charentes notamment. Deuxièmement, tous les membres de l’équipe vont partir en formation militaire durant quatre semaines, du 6 septembre au 2 octobre. Cette formation sera un tout petit peu allégée pour permettre aux coureurs de continuer de rouler. Mais ce sera la priorité en septembre, d’où l’obligation de renoncer au Tour du Gévaudan. Je veux absolument préparer et assurer la reconversion de chaque coureur de l’équipe. Le vélo, ça peut s’arrêter du jour au lendemain, certains ne feront pas de carrière. De toute façon, les coureurs ont signé dans l’équipe de l’Armée en ayant bien conscience de ce à quoi ils s’engageaient. Cette formation militaire est essentielle.

Crédit photo : Mathilde L'Azou - Mathilde L'Azou Photographies
 

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