Les 7 astuces pour redevenir coureur pro

Pari difficile, mais pari gagné pour Julien Loubet et Julien Guay : les deux coureurs vont retrouver en 2015 ce peloton professionnel qu'ils avaient quittés avec un goût d'inachevé. Statistiquement, peu d'ex-pros parviennent à regagner leurs galons. En tout, il aura fallu trois saisons chez les amateurs au premier pour rebondir, deux saisons au second. "Déçus" voire "écœurés" sur le coup, ils se sont finalement retapés à neuf en « redescendant » dans un club DN (GSC Blagnac, l'US Montauban 82 puis de nouveau au GSC Blagnac VS 31 pour Loubet, Sojasun espoir-ACNC pour Guay). Nouveaux mental, palmarès et image... Les deux ex et néo-professionnels dévoilent à DirectVelo les clefs de leur retour.

1. S'ADAPTER AUX COURSES AMATEURS

-Julien Loubet (ex-pro chez AG2R La Mondiale, de retour au Team Marseille 13-KTM) : « Pour revenir dans le peloton pro, encore faut-il réussir sa transition chez les amateurs. Je manquais de repères parce que j'étais passé pro assez jeune [en 2005, à 20 ans]. Le niveau amateur est un cran en-dessous mais on peut être surveillé par les concurrents et ne pas pouvoir bouger. J'ai dû réapprendre mes bases. »

-Julian Guay (ex-pro au Team Roubaix-Lille Métropole, de retour à Auber 93) : « Je me suis vite réadapté. La plupart du temps, les coureurs amateurs attaquent dans tous les sens. Mais on assiste aussi, de plus en plus, à des schémas tactiques dignes des pros, par exemple sur les manches de Coupe de France : échappée, tempo du peloton, bagarre dans le final... Même stratégie pro sur les épreuves UCI de classe 2 où nous étions invités. Bref, je n'étais pas vraiment perdu ! »

2. ETRE AU CLAIR AVEC SON HISTOIRE

-Julien Loubet : « Comme j'en ai parlé avec mon futur employeur, sans doute que je suis passé pro à une époque où AG2R La Mondiale mettait la pression à ses jeunes – l'ambiance a changé depuis deux ou trois ans. En retournant chez les amateurs, j'ai pris beaucoup de maturité. Maintenant, je suis encore plus utile dans une équipe pro, parce que j'ai appris à coacher les jeunes coureurs. »

-Julien Guay : « Ce que j'ai connu au Team Roubaix Lille Métropole est une injustice. Les dirigeants d'Auber 93 partagent ce point de vue. Ils ne comprennent pas pourquoi je n'ai pas été conservé. J'avais pourtant des résultats corrects. Ensuite, il y a eu la fin de l'équipe Sojasun... C'est un mauvais enchaînement des choses. J'avais ma place chez les pros et un tempérament de guerrier. Il fallait juste que je le démontre et qu'une équipe professionnelle me tende la main. »

3. PRENDRE DU RECUL

-Julien Loubet : « Je ne voyais pas mon retour dans la catégorie amateur comme un échec. C'était seulement une péripétie comme on en rencontre au boulot, dans une vie professionnelle. J'ai aussi pris du recul grâce à ma reconversion : j'en ai profité pour passer un certificat d'aéronautique, il y a un an. Maintenant, je me sens plus serein quant à mon avenir. »

-Julian Guay : « Bien sûr, j'étais déçu, mais je ne me suis pas posé de question lorsque je suis redescendu amateur. Je me suis dit : 'Fais-toi plaisir et on verra la suite !'. D'ailleurs, j'ai fait 90 jours de course en 2013 et l'équivalent en 2014 ! Cette expérience a forgé mon caractère. J'ai découvert des personnes très intéressantes autour de moi et une bonne structure sportive. »

4. GARDER CONFIANCE EN SOI

-Julien Loubet : « Je me suis accroché parce que je ne voulais pas avoir de regret. Il fallait que j'expérimente une nouvelle équipe pro, une autre fois dans ma carrière. Je me suis battu pour obtenir cette deuxième chance. J'ai toujours considéré que mon retour chez les amateurs était une pause d'un à deux ans dans ma carrière. »

-Julien Guay : « Dès l'instant où j'ai quitté le peloton pro, en octobre 2012, je voulais reprendre ma place. Immédiatement, j'ai appelé mon ami Thibaut Macé [actuellement directeur sportif au Vendée U, NDLR] et je lui ai fait part de cet objectif. Ma femme m'a toujours soutenu, de même que Sojasun. Dans ma tête, il était clair que je faisais un aller-retour chez les amateurs. »

5. DECROCHER DES VICTOIRES

-Julien Loubet : « Un ex-professionnel doit gagner souvent. La concurrence est féroce. Quand on voit de très bons jeunes comme Loïc Chetout, mon coéquipier, qui remportent des victoires et sont attractifs pour les équipes pros, on doit réagir. Il faut s'imposer dès le début de saison et se montrer régulier. Les équipes pros préfèrent un coureur souvent classé 2e ou 3e qu'un mec qui gagne mais ne fait plus rien ensuite. »

-Julien Guay : « Il faut gagner les bonnes courses au bon moment. Une victoire acquise en début de saison est vite oubliée. Par contre, c'est bien de se signaler entre juin et août, au moment où les équipes recrutent et où les directeurs sportifs pros ont le regard braqué sur les amateurs. »

6. SAVOIR « SE VENDRE »

-Julien Loubet : « Début 2014, j'ai repris ma collaboration avec Michel Gros, qui était mon agent à l'époque d'AG2R La Mondiale. Mais j'ai effectué beaucoup de démarches seul : j'ai discuté avec Vincent Lavenu et mon ami Blel Kadri a aussi insisté pour que je revienne. Or l'équipe attendait de signer de gros coups. Heureusement, j'avais des contacts avec d'autres équipes. Les discussions avec le Team Marseille 13-KTM se sont accélérées en juin, après le Championnat de France. »

-Julien Guay : « Je n'ai pas d'agent et je n'ai envoyé aucun CV. Au mois d'août 2013, on m'avait dit que je serais professionnel chez 'Soja' l'année suivante. Quand cette piste s'est effondrée, j'ai appelé Stéphane Javalet [manager de BigMat-Auber 93] mais l'effectif était complet. On a gardé contact. En 2014, les discussions se sont réactivées et j'avais une proposition à la fin de l'été. C'est arrivé à point nommé, parce que je pensais avoir laissé passer mon tour. »

7. AVOIR DE LA CHANCE

-Julien Loubet : « C'est pareil dans le sport ou dans la vie en général : il faut un brin de chance pour s'en sortir. Tout le monde n'est pas logé à la même enseigne. Par exemple, les coureurs bretons ont plus de chance de trouver des courses près de chez eux. Nous, dans le Sud Ouest, on aligne les kilomètres en voiture... »

-Julien Guay : « Il faut tomber au bon endroit, au bon moment. L'équipe Sojasun qui s'arrête alors que j'ai un contrat pro assuré, ce n'est pas de chance. »

Bon à savoir ! DirectVelo continuera de suivre Julien Guay et Julien Loubet en 2015 à travers sa nouvelle rubrique consacrée aux équipes Continentales françaises.

Crédit photo : www.velofotopro.com
 

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