Sélectionneur de l’Equipe de France sur route Juniors mais également responsable du cyclo-cross français, Julien Thollet fait un point, pour DirectVelo.com, sur le début de saison des représentants tricolores, sans oublier d'évoquer ses attentes pour les semaines à venir dans les sous-bois.

DirectVelo.com : Quel bilan tires-tu du Championnat d’Europe du week-end dernier ?
Julien Thollet : Je crois que nous avons une belle densité de coureurs de talent dans les rangs tricolores, et ce dans toutes les catégories. Seulement, nous avons vu sur ce Championnat d’Europe que les coureurs français avaient du mal à concrétiser. Nous repartons d’Allemagne sans un seul podium au compteur. Clairement, les Belges et les Hollandais nous écrasent à l’heure actuelle.  

« TOUT PEUT ENCORE EVOLUER »

Est-ce irrémédiable pour le reste de l’hiver, et notamment le Championnat du Monde ?
Je ne pense pas. Il faut continuer de travailler. En cyclo-cross, chacun progresse au fil de la saison et à son rythme. Le début de saison de cross est toujours particulier pour cela. Certains coureurs arrivent en grande forme dès les premières épreuves, sur la lancée de leur saison sur route. Et à l’inverse, d’autres ont pu marquer une bonne coupure en juillet et ont besoin de remettre en route progressivement. Tout cela peut donc encore évoluer. L’objectif principal reste le Mondial fin janvier, et je mise beaucoup sur la fraicheur de certains de nos éléments en fin de saison, même s’il est vrai que nous sommes un petit cran en dessous des attentes pour le moment.

Qu’est-ce qui t’a le plus marqué depuis le début de la saison ?
Ce qui est le plus frappant, c’est que l’on voit les Juniors 1ère année directement dans le jeu, chez les filles comme chez les garçons. Ils ont pris la mesure du niveau international. On a vu ce phénomène une première fois à Besançon, sur la première manche de la Coupe de France. Puis cela s’est confirmé à Lorsch (Allemagne) sur le Championnat d’Europe pour certains et certaines. Les Juniors 1 viennent rapidement bousculer les Juniors 2. Thomas Bonnet notamment fait un bon début de saison, même s’il a marqué le pas en Allemagne, sur un parcours qui - sans lui trouver d’excuse - ne l’avantageait sans doute pas beaucoup. Il préfère les parcours plus gars et plus techniques, en fait, moins roulants.  

« CHEZ LES ELITES, C’EST LA DECEPTION QUI PREDOMINE POUR L’INSTANT »

Qu’en est-il des rangs Espoirs et Elites ?
On est toujours dans l’attente d’une confirmation pour Clément Venturini. Lui le premier, doit attendre de décrocher un podium sur une manche de Coupe du Monde ou sur le Mondial. Quant à Fabien Doubey, on sent qu’il a passé un cap depuis le début de la saison. Il a su répondre présent à l’échelle internationale. Chez les Elites, c’est la déception qui prédomine pour l’instant. Je pense que Francis Mourey n’a pas encore trouvé la bonne carburation. Il n’est pas à son niveau, mais ça va venir. Fabien Canal se débrouille pas mal. Mais c’est sûr que l’on reste ultra-dominés.

Que penses-tu du comportement des Dames actuellement ?
On a eu deux superbes révélations chez les Juniors : Juliette Labous et Maëlle Grossetête. Désormais, charge à nous de les faire progresser tranquillement, sans mettre trop de pression à ces jeunes filles. Elles découvrent actuellement le haut-niveau avec les Elites. A 16 ans, c’est intéressant. Avec ces deux filles, ce doit être un travail dans la durée, à fructifier chez les Espoirs puis je l’espère en Elites. Enfin, en parlant justement des Elites, je n’oublie pas Lucie Chainel, une valeur sûre qui devrait monter en puissance au fil de l’hiver. Il faut aussi parler de Marlène Petit, lauréate à Besançon qui a selon moi pu trouver un équilibre entre le cyclo-cross et sa vie professionnelle. Elle commence à mieux gérer ses entraînements, et le travail commence à payer.

« LE CYCLO-CROSS FEMININ RESTE UNE DISCIPLINE TRES JEUNE »

Des filles comme Juliette Labous ou Maëlle Grossetête justement, aussi talentueuses soient-elles, se retrouvent (déjà) à jouer les podiums Elites… à 16 ans. N’est-ce pas inquiétant quant au niveau du cyclo-cross féminin, que faut-il en conclure ?
Disons qu’il y a deux phénomènes. Pour moi, c’est clair que les effectifs féminins sont encore un peu trop maigres, même si on sent que ça commence à prendre petit à petit, et que les pelotons grossissent. Il ne faut pas oublier que ça reste une discipline très jeune, et que l’on a vu apparaitre il n’y a que quelques années. C’est une discipline en progression. Toujours est-il qu’il y a donc encore rapidement de la place sur les podiums pour celles qui s’en donnent les moyens. Le deuxième phénomène à noter, c’est qu’avec Juliette et Maëlle, on tombe certainement sur deux très bonnes compétitrices, qui du coup se retrouvent à pointer le bout de leur nez très rapidement au milieu des Elites. A mon avis, c’est très bien que ces filles-là puissent jouer les podiums. Au Championnat d’Europe, elles ont pu se frotter aux meilleures européennes, qui avaient pour la plupart plus de 20 ans. On est donc en droit d’espérer une belle marge de progression pour ces deux filles, et il faut s’en réjouir.

Il y a donc de belles choses à espérer d'ici la fin de l'hiver. Qu’attends-tu exactement des semaines à venir ?
On en saura déjà un peu plus dimanche après la deuxième manche de la Coupe de France à Sisteron. La première manche est toujours particulière, avec encore une fois, la différence de forme de chaque concurrent, notamment dans les catégories de jeunes. Après Sisteron, il y aura les Championnats régionaux, des rendez-vous importants pour toutes et tous. Là, on va vraiment entrer dans le cœur de la saison. On enchainera avec les manches de Coupe du Monde et bien sûr, le Championnat de France. On y verra bien plus clair sur les forces en présence, entre ceux qui vont confirmer, s’affirmer, et ceux à l’inverse qui risquent de disparaitre de la circulation. Il sera alors temps, à ce moment-là seulement, de penser à une sélection pour le Championnat du Monde.

Crédit photo : Elisa Haumesser - Elisa Haumesser - Cycling pictures