La Grande Interview : Sylvain Blanquefort

C'est une des mutations de l'intersaison. Sylvain Blanquefort quitte l'Océane U-Top 16 pour rejoindre  le Team U Nantes Atlantique. A bientôt 29 ans, il veut se relancer, peut être pour la dernière fois. "Il faut toujours se remettre en question" insiste-t-il.
Le sprinter bordelais sort d'une saison qui le laisse sur sa faim. "Je la termine avec trois victoires. Ce n'est pas mal, mais le bilan est quand même mitigé en terme de résultats. Je pense que j'aurai pu faire beaucoup mieux, on va dire que l'année 2014 a été moyenne." Vainqueur au Circuit des Vignes, de la 3e étape du Tour des Deux-Sèvres et de la Route d'Or du Poitou à Civray, sa formation pour le diplôme d'Etat a empiété sur son entraînement. Sylvain Blanquefort se destine à travailler dans le cyclisme, comme éducateur. Il pourra s'inspirer de ceux qui, tout au long de sa carrière l'ont marqué comme Dominique Arnaud à l'Entente Sud-Gascogne, "un personnage atypique, qui marque les esprits. C'est un Monsieur du vélo", la famille Bauchaud au Top 16, "qui fait énormément pour le vélo" ou Frédéric Mainguenaud son entraîneur pendant trois ans "qui m'a fait évoluer en tant que coureur, on avait un très bon feeling". Son maillot rose de la Boucle de l'Artois en 2012 doit beaucoup à Frédéric Mainguenaud.

DirectVelo.com : Que t'a-t-il manqué pour que le bilan de ta saison soit meilleur ?
Sylvain Blanquefort : J'ai un peu été livré à moi-même, n'ayant plus d'entraineur. Quand on s'entraine seul, on n'est pas forcément objectif avec soi-même. On a peut-être du mal à s'imposer des charges de travail aussi importantes que si il y avait quelqu'un derrière... Même si ce n'est pas la raison primordiale, il y a également le fait que j'étais en formation à Poitiers pour le diplôme d'Etat. J'étais là-bas une semaine par mois, je n'avais donc pas forcément le temps de rouler.

« ENVIE DE TRAVAILLER DANS LE CYCLISME A L'AVENIR »

Tu habites à Bordeaux. Ces déplacements supplémentaires devaient aussi te créer de la fatigue...
On avait 17 semaines de formation sur un an et demi. Ce n'était pas les trajets qui étaient les plus longs, mais ça me perturbait les semaines d'entrainement. C'est une formation que j'apprécie, je la terminerai en décembre mais c'était compliqué à gérer.

Avec cette formation, tu prépares tes arrières ?
Je n'ai pas encore pris de décision sur ce que je ferai en 2016. L'année prochaine avec le Team U Nantes Atlantique sera peut-être l'unique. J'ai eu l'opportunité d'intégrer cette formation. Je l'ai saisie car j'ai envie de travailler dans le cyclisme à l'avenir. Une fois le diplôme en poche, je pourrai devenir entraineur ou directeur sportif. C'était intéressant...

Ce futur métier, tu l'envisages à un certain niveau ?
Non, pas spécialement. Ça pourra très bien être de travailler avec des jeunes. C'est une formation pour exercer dans le milieu du cyclisme, avec des bases pour devenir entraineur. Je verrai ensuite en fonction des opportunités que j'aurai le moment venu.

« PARTIR DU TOP 16 N'ETAIT PAS PREVU »

Ta mutation est-elle dûe au fait de ne pas avoir eu d'entraineur cette année ?
Non, du tout ! Partir du Top 16 n'était pas quelque chose que j'avais prévu. Le choix a été compliqué à faire. D'un côté, il y avait les sept saisons que j'ai passées là-bas et tout le respect que j'ai pour la famille Bauchaud, pour la structure, et le Président du club de l'AC Nersac. De l'autre, il y avait la possibilité d'être devant un autre défi sportif, une autre structure, autre chose tout simplement. C'est ce qui m'a attiré.

Le Team U Nantes Atlantique vient de terminer troisième de la Coupe de France...
Oui, pour moi c'est l'un de ceux qui sont les mieux structurés au niveau national. J'ai toujours eu un bon contact avec les directeurs sportifs, ça a facilité les choses. Partir du Top 16 n'était pas une solution ni un souhait, et peu d'équipes pouvait me faire changer. Quand la proposition de Nantes est arrivée, j'ai réfléchi fortement. J'avais besoin, je pense, de me relancer sportivement, d'être confronté à quelque chose qui me poussait un peu plus. Pour progresser, il faut toujours trouver de nouvelles sources de motivation et se remettre constamment en question. C'est important !

Ton rôle sera-t-il de remplacer le sprinteur Lorenzo Manzin (qui passe professionnel à la FDJ.fr)?
Nous n'en avons pas encore discuté en détail. Ce qui est sûr, c'est que j'aurai un rôle vis-à-vis des jeunes de l'équipe. Il y en a plusieurs, ainsi que des coureurs expérimentés qui pourront les aiguiller. Je pense à Kévin Fouache qui est là-bas depuis un moment ou à Benjamin Le Montagner qui redescend de chez les pros. C'est un peu le rôle que j'avais aussi au Top 16. Je serai là pour apporter des résultats. Les rôles de chacun seront clairement définis dans les prochaines semaines.

Encadrer les jeunes, ce sera déjà un peu de la mise en pratique de ta future carrière...
Oui, mais ce ne sera pas dans le même axe. Le côté expérience du coureur va évidemment primer !

« QUAND ON VIENT DU SUD-OUEST, ON COUTE PLUS CHER EN DEPLACEMENT »

Tu avais fait une très belle saison 2012. Espérais-tu alors passer pro ?
J'ai eu des contacts, mais ça ne s'est pas concrétisé. Sur le moment, j'ai eu un peu de déception parce que je pensais que je pouvais mériter une place à l'étage au-dessus, et qu'une porte allait s'ouvrir. Mon âge (26 ans à l'époque) a dû entrer en jeu et c'est ce qui a probablement pêché. J'ai rapidement relativisé, même si ça aurait été une bonne expérience. Je suis déçu, mais je n'ai pas de regrets. Il faut dire qu'à cette période, véranda Rideau venait d'arrêter, et que beaucoup de coureurs recherchaient un contrat pour l'année suivante. Et puis quand on vient du sud-ouest, on coûte plus cher en déplacement que quand on vient d'ailleurs...

Romain Mathéou a aussi été confronté à ce genre de problème...
J'en ai d'ailleurs discuté avec lui. C'est vrai que dans le sud-ouest, on est handicapé par rapport à cela. Les trois-quarts des équipes pros sont dans le nord ou dans l'est... Mais je n'avais peut-être pas aussi le profil. Pour passer pro, il faut vraiment exceller dans un domaine !

Il y avait donc plusieurs facteurs défavorables à ton passage chez les pros ?
Oui, il faut être là au bon moment et avoir les bonnes personnes autour de soi pour avoir les bons contacts.

Le partenariat entre le Top 16 et La Pomme-Marseille s'est pourtant fait à ce moment-là...
Stéphane Bauchaud en avait un peu discuté avec Frédéric Rostaing. Mais je ne rentrais pas forcément dans ses plans, donc la discussion n'a pas été très longue.

« LES JEUNES SONT PLUS RAPIDEMENT AU NIVEAU »

A Nantes, le Bordelais que tu es va connaître la côte Atlantique par cœur...
Oui, on va dire que je remonte vers le nord (rires). En plus, j'ai commencé à l'Entente Sud-Gascogne. Là, j'étais en Charente. Et l'an prochain, je serai licencié en Loire-Atlantique. En foot, on parle de derby de l'Atlantique. Je ne sais pas quand il aura lieu, mais je préviens tout de suite mes co-équipiers que je serai Bordelais (rires) !

Comment vois-tu le cyclisme ?
Je vois cela un peu comme un jeu. Si on ne s'amuse pas sur le vélo, c'est difficile d'aller s'entrainer et d'être content d'aller courir. Il faut toujours que ce soit un plaisir de faire du vélo. Je pense que sportivement les équipes doivent avoir un retour sur investissement. Le cyclisme amateur progresse beaucoup, l'approche est de plus en plus rigoureuse. La Coupe de France y est aussi pour beaucoup, c'est le fil rouge pour tous les clubs de DN. Il faut donc performer ! Des coureurs ne font que du vélo ce qui fait monter le niveau. Les jeunes sont également plus rapidement au haut niveau.

A quoi est-ce dû selon toi ?
Les structures sont de plus en plus professionnelles et les méthodes d'entrainement ont évolué. Celles que les pros avaient il y a quelques années, sont maintenant dans le peloton amateur. Certains s'entrainent avec des capteurs de puissance. Je pense qu'aujourd'hui, il n'y a plus beaucoup de différences.  Les Challenges Nationaux Juniors et Espoirs favorisent aussi une détection plus rapide des jeunes talents. Une fois qu'ils intègrent une DN1 ou une DN2, ils s'adaptent peut-être plus rapidement au niveau.

« JE NE VOULAIS PAS ALLER SUR LA BOUCLE DE L'ARTOIS »

Tu as fait pas mal de rencontres dans ta carrière
Quand je suis passé en 1ère catégorie, il y avait pas mal d'anciens. J'ai beaucoup appris de ces coureurs, que ce soit au VC Pays de Langon ou au Top 16. Au niveau des directeurs sportifs, j'ai côtoyé Frédéric Mainguenaud pendant deux ans au Top 16. Il m'a entrainé durant trois saisons, de 2011 à 2013. Sa rencontre m'a fait évoluer en tant que coureur. C'est sûrement grâce à lui que j'ai progressé. C'était la première fois que j'avais un entraineur, on avait un très bon feeling.

Qu'as-tu appris avec lui ?
Il m'a appris à avoir un peu plus confiance en moi, il me rassurait. Il me disait que j'étais capable de faire des choses dont je ne pensais pas l'être. Par exemple, je ne voulais pas aller sur la Boucle de l'Artois en 2012 (qu'il a finalement remportée, NDLR). J'ai fait le déplacement car le week-end d'avant, j'avais fait troisième au Tour du Canton de Saint-Ciers. Il avait vu que j'étais en bonne forme et c'est lui qui m'a dit que je devais y aller, que je pouvais y faire quelque chose. Comme Dominique Arnaud et Stéphane Bauchaud, c'est un gars qui sent le vélo !

Crédit photo : Freddy Guérin - www.directvelo.com
 

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