Deux frères ont les moyens de décrocher le titre de Champion du Monde dans leurs catégories respectives le week-end prochain. Impressionnant sur les routes du dernier Tour d’Espagne, l’ancien Champion de France Elites Nacer Bouhanni partira à la conquête du maillot arc-en-ciel le dimanche 28 septembre. La veille, c’est son frère, Rayane, Champion de France Juniors sur le circuit de Saint-Omer (Pas-de-Calais) en août dernier, qui tentera de ramener le plus prestigieux des maillots en Lorraine. Actuellement en stage dans les Vosges avec son grand frère, Rayane Bouhanni (SC Sarreguemines) a pris le temps de répondre aux questions de DirectVelo.com.

DirectVelo : Dans quel état d’esprit abordes-tu ce Championnat du Monde ?
Rayane Bouhanni : Dans ma tête, je me dis que j’ai déjà réussi une bonne saison 2014. Maintenant, le plus gros rendez-vous de la saison reste quand même le Mondial. Même si je suis Champion de France, cela ne me suffit pas. J’ai toujours envie de gagner plus de courses. J’ai envie d’être Champion du Monde. Après tout, pourquoi ne pas avoir la médaille d’or ? J’y pense, bien sûr. Cela me trotte dans la tête depuis un certain moment déjà. Mais il y aura beaucoup de favoris, plus encore sur une course d’un jour. Il faudra faire la course parfaite.

« N’ETRE QUE SUR UN FRONT NE ME DEPLAIT PAS »

Tu as été régulier tout au long de la saison. Te penses-tu encore capable d’atteindre un pic de forme pour Ponferrada ?
Je n’ai pas fait de break après mon titre de Champion de France. J’ai directement repris l’entrainement et j’étais à nouveau en course le week-end suivant. Je sens que je peux encore avoir un pic de forme d’ici la fin de saison. Et ce pic de forme, je compte bien l’avoir pour le Championnat du Monde. Actuellement je suis en pleine préparation, en stage à Gérardmer (Vosges) avec mon frère Nacer et son entraineur (Jacques Decrion, NDLR). Nous restons tous les trois pendant trois jours puis ensuite, ce sera le retour à la maison.

Dimanche dernier, tu n’es pas passé loin de remporter le Challenge National Juniors lors de la dernière manche, le Signal d’Ecouves. Etait-ce là le meilleur moyen de se rassurer à dix jours du Mondial ?
Le Challenge National était un objectif, d’autant que j’étais placé au général. Je voulais vraiment essayer de piquer la première place du classement général à Valentin Madouas. J’ai tout fait pour gagner mais le Comité de Bretagne était vraiment fort. Je ne suis pas du tout déçu de terminer deuxième du Challenge National. A choisir, évidemment que j’aurais préféré gagner, mais c’est la course. Il y en aura d’autres... Et puis au-delà de cet objectif, c’est vrai que cette dernière manche était aussi une bonne course de préparation pour le Championnat du Monde, puisque la distance était plus ou moins identique.

Le sélectionneur national Julien Thollet a jugé préférable de ne pas t’aligner sur le contre-la-montre pour que tu puisses te consacrer à la course en ligne. Penses-tu également qu’il s’agissait de la meilleure solution ?
J’ai eu l’occasion d’en discuter avec Julien et il m’a dit qu’il préférait me voir focalisé à 100% sur la course en ligne et non pas doubler comme j’avais pu le faire en Suisse aux Championnats d’Europe (il avait alors pris la 10e place de chacune des deux épreuves, NDLR). C’est son choix, je le respecte. Et puis, n’être que sur un front ne me déplait pas forcément. Je ne suis vraiment pas déçu de ne pas faire le chrono. J’ai été sélectionné pour la course en ligne et je vais donc me préparer en conséquence. C’est aussi simple que ça.  

« SANS L’EQUIPE, JE NE PEUX RIEN FAIRE »

Que penses-tu de l’Equipe de France Juniors qui sera alignée à Ponferrada ?
Nous aurons un très bon groupe, très homogène. Nous sommes une vraie bande de copains. On travaille tous très bien ensemble, on a encore pu le voir sur le Grand Prix Rüebliland il y a deux semaines (il avait pris la troisième place du classement général, NDLR). L’équipe est très soudée. Je pense que c’est un gros point fort, qui pourrait faire la différence par rapport aux autres nations.  

Es-tu prêt à assumer un rôle de leader dans cette Equipe de France ?
Il est vrai que j’ai eu des résultats tout au long de l’année. Après, de là à me proclamer leader de l’Equipe de France ? Non, pas forcément. On a tous un profil différent dans cette équipe. Suivant le scénario de course, ce ne sont pas les mêmes coureurs qui seront protégés. Et puis, on est tous prêts à aider le collègue. Moi le premier, s’il le faut, j’aiderai un coureur qui a plus de chance que moi de devenir Champion du Monde. A l’inverse, je sais également que si la course m’est favorable, alors mes équipiers seront tous là pour m’aider. Je veux bien dire que je suis l’un des meilleurs Mondiaux. Par contre, il faut bien comprendre que sans l’équipe, je ne peux rien faire. L’Equipe de France est peut-être bien le meilleur collectif au Monde. Il n’y a qu’à regarder le classement de la Coupe des Nations ! Si j’ai eu d’aussi bons résultats, c’est d’abord grâce à l’équipe.

Ce sera ton premier Championnat du Monde. Comment imagines-tu cette course ?
Participer au Mondial, c’est une récompense de tous les efforts qui ont été faits durant l’ensemble de la saison écoulée. C’est toujours une grande fierté pour moi de pouvoir courir en Equipe de France, et plus encore sur un Championnat du Monde. Cela fait vraiment plaisir. Lors du stage avec l’équipe, j’ai pris le temps de regarder le parcours en vidéo. Je pense que ce parcours peut me convenir. Le circuit sera usant avec deux bosses par tour. J’en ai parlé à Julien (Thollet). Lui aussi considère que ce parcours peut être fait pour moi. Les bosses se monteront très vite, il ne faudra pas manquer de puissance. Après, je ne compte pas m’occuper plus que ça de mes adversaires. Je ferai ma propre course, comme toujours. Le scénario idéal pour moi serait  une course de costauds, avec un écrémage qui se fasse par l’arrière, sans forcément qu’une échappée ne puisse prendre trop de champ. S’il l’on pouvait se retrouver en petit comité dans le dernier tour, je pense que ce serait pas mal pour moi.

« SE PREPARER AVEC NACER, UNE MOTIVATION TOUTE PARTICULIERE »

Ton frère Nacer aura lui aussi une réelle chance de devenir Champion du Monde, dans la catégorie Elites. C’est une situation rare pour deux frères…
Oui, c’est vrai que c’est beau de pouvoir faire le Championnat du Monde avec mon frère. Et puis, le fait que l’on s’entraine ensemble actuellement, en stage, est encore plus spécial car il y a une motivation toute particulière à se préparer ensemble pour ce même objectif. Je pense qu’il y a une possibilité qu’il soit présent à l’arrivée avec les meilleurs, pour la gagne. Après, c’est toujours pareil, il faudra voir comment se déroule sa course. Bon, cela dit, on ne parle pas que du Mondial, et heureusement ! Il faut aussi se vider la tête, avoir l’esprit libre. Si on ne devait penser qu’au Championnat du Monde 24h sur 24, on finirait par se stresser.

Nacer sera sans doute là pour t’encourager sur le bord de la route le samedi. Cela ne doit pas arriver si souvent…
Exact ! Mais moi aussi, je serai là pour le soutenir le dimanche ! C’est sûr que ça n’arrive pas souvent car Nacer est très pris par son calendrier et ses déplacements. Il n’a jamais le temps de venir sur mes grandes courses internationales et c’est bien normal. Il essaie quand même de venir sur certaines courses régionales mais cela s’arrête là. Alors à Ponferrada, ce sera particulier !

Réalises-tu qu’avec Nacer, vous pourriez - dans un scénario idéal - écrire l’une des plus grandes pages de l’histoire de votre sport à Ponferrada ?
Oui évidemment, on en a conscience. On le sent y compris via ce que nous disent les gens. Maintenant, on ne se met pas trop de pression pour autant. Il se passera ce qu’il se passera en Espagne. C’est aussi simple que ça.

Crédit photo : Elen Rius - Elen Rius Photos