Tour de l'Avenir : « Vous voulez une tasse de thé ? »

C'est "tea time" ce jeudi sur le Tour de l'Avenir. Le volant d'une main et un mug en porcelaine de l'autre, le directeur sportif des Britanniques sacrifie quelques secondes à ce rituel encore jamais vu dans la caravane. Dans une heure à peine, ses coureurs Simon et Adam Yates vont signer le doublé à l'arrivée de Morzine. L'étape ne fait que 70 kilomètres, mais c'est "tea time" quand même.

"Vous voulez une tasse de thé ?" DirectVélo est invité à participer à la collation sur le siège passager. A l'arrière, le mécanicien a tout prévu : le thermos rempli de thé noir et nuage de lait, sucre en option.

Il y a malgré tout un gros accro avec les ralentisseurs sur la chaussée. Bing, la tasse manque de se renverser. Bang, nouvelle secousse. Mais aucune éclaboussure. Concilier le vélo et l'art de vivre à la britannique est une prouesse qui vaut tous les maillots jaunes.

Autre souci : le mug est frappé de la croix anglaise et non du drapeau du Royaume Uni. "J'ai une autre tasse avec l'Union Jack", s'excuse le directeur sportif. Attention aux susceptibilités identitaires : le mécano est natif du Pays de Galles.

Le volant est placé à droite. Bien pratique pour discuter avec les autres voitures toutes équipées à l'européenne. Petite blague de circonstance avec le coach des Australiens. Après le thé anglais, forcément l'humour anglais. Comme le reporter de DirectVélo a oublié son stylo pour prendre des notes, le directeur sportif rappelle l'histoire d'un ami à lui qui rentrait à des heures tardives et que la police s'était résolue à coffrer, craignant un délit d'alcoolisme et ignorant que ce brave citoyen venait simplement chercher chaque soir son fils employé dans une discothèque. Sauf que la police avait ce jour-là omis d'emporter les clefs des menottes. L'homme est libre, de fait, et il répond : "Moi je suis fossoyeur et je n'oublie jamais ma pelle !" C'est la chute de la blague et on rigole à gorge déployée.

La course traverse Sallanches. Keith Lambert a disputé les Championnats du Monde 1980, dans l'équipe de Robert Millar. Petits souvenirs. Aujourd'hui, il habite dans le Yorkshire, là où le Tour de France prendra son son essor l'été prochain. Il a les manières d'un gentleman farmer de 66 ans. Ses coureurs l'aiment bien car il est plus proche d'eux que l'autre responsable des Espoirs, Paul Manning, 38 ans.

Mauvaise entame pour les Britanniques, qui ont laissé filer une échappée avec des gros rouleurs dès le deuxième kilomètre. Mais les Yates se projettent à l'avant grâce à une contre-attaque dans la Côte de Chatillon. Dans les sept kilomètres de descente qui plongent vers Morzine, les deux frères roulent en tête avec trois autres concurrents. Lesquels tombent miraculeusement comme des mouches avant la ligne d'arrivée, pour cause d'incidents matériels.

"Même sans leurs problèmes, on aurait gagné !" sourit Lambert. Quand radio tour annonce la victoire d'Adam Yates, l’œil frétille. Pas d'effusion de joie, juste le sentiment du travail bien fait. Encore un truc britannique : le flegme.

Crédit Photo : www.directvelo.com
 

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