Jérémy Honorez raccroche amèrement le vélo

A l'âge de 24 ans, Jérémy Honorez (Dunkerque Close2 Team) a décidé de mettre un terme à sa carrière. Le coureur belge referme ainsi cette parenthèse cycliste qu'il avait ouverte à l'âge de 15 ans chez les cadets. Il aura passé ses deux premières années Espoirs au Team Storez Ath (devenue par la suite Verandas Willems), puis trois années au sein de l'équipe continentale Lotto-Bodysol (ex Bodysol-Euromillion) et enfin donc cette dernière en France dans le club DN3 de Dunkerque Close2 Team. Il revient pour www.directvelo.com sur sa carrière et sur sa décision d'arrêter le vélo.

DirectVélo : Qu'est-ce qui t'a poussé à arrêter le cyclisme de compétition ?
Jérémy Honorez : Lorsque j'ai découvert à la mi-septembre l'effectif de la nouvelle équipe continentale wallone, Adeps - Wallonie - Centre de Formation du Cyclisme Francophone (qui sera la réserve de Wallonie - Bruxelles - Crédit Agricole, NDLR). J'ai vu que je n'en faisais pas partie. J'avais posé ma candidature à Wallonie - Bruxelles. Je n'ai pas eu la moindre réponse. Ce n'était pas acceptable pour moi. J'ai prouvé cette année ainsi que les années précédentes que j'avais l'etoffe pour revendiquer une place dans cette structure parmi un effectif total de 28 coureurs wallons en additionnant ces deux équipes.

« Dès que la politique s'immisce dans le monde sportif, ce n'est jamais dans le but de faire quelque chose de bien au niveau sportif »

Comment expliques-tu le fait que tu n'aies pas pu rejoindre cette formation ?
Malheureusement, toute cette structure est devenue ultra politisée. S'il n'y avait eu que 5 ou 6 contrats, j'aurai pu admettre et comprendre de ne pas être repris. Mais sur un total de 28 coureurs, il n'y a aucun prétexte de ne pas être retenu sur mes performances sportives. Comme partout, dès que la politique s'immisce dans le monde sportif, ce n'est jamais dans le but de faire quelque chose de bien au niveau sportif, mais seulement dans un but de promotion personnelle et de publicité politique.

Comment juges-tu ton année 2011 ?
J'ai signé une très bonne saison à Dunkerque. J'ai mal débuté en n'ayant pas pu obtenir le moindre résultat durant les mois de mars et avril suite à deux bronchites tenaces. Ensuite, à partir de mai, j'ai été régulier tout au long de la saison avec deux victoires en Belgique et de nombreux top 10 sur les courses d'un jour du calendrier belge et les Elites Nationales françaises. Je suis d'ailleurs présent dans le top 5 des coureurs wallons Elites sans Contrat et Espoirs.

« J'ai pu peser autant voire plus qu'en 2009 sur les courses du mois d'août »

Dirais-tu que tu as retrouvé le niveau que tu avais avant ta chute il y a deux ans ? (*)
Oui, j'ai ma référence étalon du mois d'août où j'ai eu de la malchance. C'est durant ce mois que je me sentais le mieux avec entre autres les Elites Nationales du Prix de la Municipalité de Gommegnies où j'ai crevé et au Grand Prix de Beuvry-la-Forêt où j'ai cassé mon guidon. Je me trouvais à chaque fois dans le groupe de tête qui allait se jouer la victoire. Mais ainsi, j'ai pu me comparer sur les mêmes courses que durant la saison 2009. Et j'ai pu peser autant voire plus sur les courses de cette période. Ce qui m'a rassuré complètement sur mon retour et m'a donné confiance pour la suite. Mais les décisions prises par la fédération m'ont finalement un peu dégouté de tous les efforts entrepris ces deux dernières années pour retrouver ce niveau.

Cette saison déjà, tu n'étais pas présent dans l'équipe Wallonie - Bruxelles - Crédit Agricole...
L'an passé, je ne pouvais pas y prétendre car il faut être demandeur d'emploi. Et à ce moment-là fin de l'année 2010 j'étais toujours sur la mutuelle et en pleine revalidation avec quatre séances de kiné par semaine. J'avais aussi encore une grosse opération chirurgicale à faire pour enlever le matériel et les broches métalliques qu'il me restait dans les jambes. Mais cette année, toutes les conditions étaient réunies pour présenter ma candidature.

« La solution était une place chez Wallonie - Bruxelles - Crédit Agricole pour avoir quelque chose de concret »

Pourquoi voulais-tu vraiment faire partie de cette équipe ?
J'espérais trouver quelque chose de concret pour 2012 où j'aurais pu rouler sans arrière-pensées et pouvoir mener également mes projets dans ma vie privée. C'était difficile ces dernières années de me retrouver sans situation stable et de devoir constamment galérer pour joindre les deux bouts. La solution pour moi était donc une place chez Wallonie - Bruxelles - Crédit Agricole.

On imagine que ta plus grande déception est de ne pas avoir pu passer professionnel...
Ma plus grande déception est effectivement de n'avoir pas pu concrétiser par une carrière professionnelle. Ma chute a aussi joué un grand rôle à un tournant de ma carrière où j'étais en pleine explosion physique.

« Heureux d'avoir réussi toutes ces performances en pouvant me regarder dans une glace »

Et quelle est ta plus grande satisfaction ?
Le fait d'avoir réussi une belle carrière avec 43 victoires sur route et 38 sur piste, des titres de champion de Belgique et Wallonie sur piste ainsi que des titres de champion du Hainaut et de Wallonie sur route. Je suis aussi heureux d'avoir réussi toutes ces performances en pouvant me regarder dans une glace en ayant jamais utilisé la moindre pratique de dopage. Maintenant, je n'ai pas de regrets, j'ai tenté mon maximum, il me reste maintenant à réussir les 40 prochaines années dans la vie active et de conclure mes projets personnels.

Quels sont tes projets désormais ?
Je termine ma dernière année en tant que dessinateur industriel. J'avais arrêté avec ma chute étant donné que j'ai raté les cinq premiers mois de l'année scolaire 2009-2010 suite à mon alitement complet de prés de quatre mois. J'ai également commencé un travail en tant que représentant pour une société d'équipements sportifs quelques jours après avoir décider d'arrêter ma carrière. Je ne voulais pas faire de vélo à moitié ou de travail à moitié. Soit je me consacrais entièrement à ma carrière sportive, soit à un travail. Ma décision a donc été prise de donner dorénavant la priorité à ma carrière dans le monde du travail.

« Voler des mes propres ailes et avoir mon indépendance pour avancer dans la vie »

A qui penses-tu au moment de raccrocher le vélo ?
En premier lieu, je pense à mes parents. J'ai toujours pu compter sur eux à 100%, pour me loger, m'aider financièrement et me conduire aux courses. Bien sûr aussi ma petite amie qui a toujours été là pour me soutenir et passer ses temps libres à me suivre sur de nombreuses courses. Ensuite, je remercie mes fidèles supporters qui ont toujours été là même dans les moments difficiles. Et enfin, Je voulais aussi remercier Nico Mattan (le directeur sportif de Dunkerque Close2 Team, NDLR) qui est la meilleure personne qu'il m'ait été donné de rencontrer du point de vue de l'approche du vélo, de la tactique, de l'hygiène de vie mais surtout du point de vue humain.

Est-ce que Nico Mattan a tenté de te faire changer d'avis ?
Oui, Nico voulait vraiment que je continue. Il pense que j'avais le potentiel pour viser plus haut et qu'il s'agissait surtout de travailler mon mental. Et mon mental passait en fait par la sécurité de mon avenir et de mes projets. Donc par un contrat qui pouvait me permettre de rouler sans arrière-pensées comme je l'ai dit précédemment. Il me fallait quelque chose de concret et d'officiel. Désormais, j'ai 24 ans et je me décide enfin à vouloir voler de mes propres ailes et avoir mon indépendance pour avancer dans la vie.

(*) : Il avait été victime, en septembre 2009, d’une terrible chute sur le Mémorial Rik Van Steenbergen. Plongé dans le coma, il souffrait d'une fracture ouverte du tibia gauche ou encore d’une fracture du fémur droit. (Lire le fait du jour que Cyclismag lui avait consacré au début de l'année 2010 : ici)

Crédit Photo : DR
 

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