Decathlon AG2R La Mondiale : « Un beau défi »

Crédit photo Gus Sev - Decathlon AG2R La Mondiale

Crédit photo Gus Sev - Decathlon AG2R La Mondiale

La saison 2024 est un tournant dans la longue histoire de l’équipe « AG2R ». Après avoir accompagné pendant 21 années le Chambéry CF et soutenu durant cinq saisons une équipe Juniors, la structure managée par Vincent Lavenu a choisi de regrouper les équipes de sa filière formation sous le même toit que la WorldTeam. Une équipe Continentale a donc vu le jour cet hiver, et l’équipe U19 est désormais directement liée à sa grande sœur. Avant les premières courses des deux équipes de jeunes - à Kuurne dimanche pour les Juniors et en Croatie au Trophée Umag, mercredi, pour la Conti -, DirectVelo a fait le point avec Jean-Baptiste Quiclet, responsable de la « New Gen » de Decathlon AG2R La Mondiale.

DirectVelo : C’était donc le moment de regrouper vos équipes de formation sous le même toit que la WorldTeam…
Jean-Baptiste Quiclet : On avait cette volonté de créer le premier projet international qui regrouperait les trois entités sous le même toit. C’était notre objectif d’avoir un réel continuum entre ce qui se passe chez les Juniors jusqu’au WorldTour afin d’avoir la main sur des notions de progressivité, d’accès aux services et aux savoirs. L’idée est qu’il y ait de la cohérence entre les techniciens et les services dédiés à la performance pour gagner du temps et surtout avoir la main sur l’agenda de progression de l’athlète. Avant même qu’on ait les perspectives du nouveau partenaire, Decathlon, il nous paraissait judicieux d’engager une réforme de notre filière de formation. Ça a été un cheminement depuis de longues années avec beaucoup d’échanges avec les deux entités qu’on soutenait, « Plus de sport » et le Chambéry CF. On arrivait systématiquement au même constat vis-à-vis de l’évolution du système de formation du cyclisme mondial. 

Lequel ?
Notre modèle était peut-être singulier mais peut-être trop en marge par rapport à la temporalité des autres structures. On a engagé ces travaux qui nous ont animés pendant une année ultra-intensive. L’objectif était d’intégrer l’activité « Plus de sport » et de créer cette équipe de développement. À partir de là, on s’est mis en mouvement pour être à l’heure avec le recrutement. Sur le projet Juniors, on est plus sur une continuité mais avec quand même quelque chose qui évolue. Pour le recrutement de la structure U19, on s’est appuyé sur l’expérience et l’expertise de « Plus de sport ». On a plutôt été dans la continuité avec quasiment essentiellement une sélection sur dépôt de dossier, une demande volontaire de l’athlète à vouloir rejoindre notre projet. Avec quelques athlètes, il y a aussi eu des opportunités de rencontre. Il y a eu des entretiens et des tests physiques quand c’était nécessaire. Avec les entraîneurs et Alexandre Chenivesse, on a partagé ça et on a eu un arbitrage commun. 

« RESTER À UN NIVEAU DE QUALITÉ SUFFISANT »

Et pour la Continentale ?
C’est moi qui l’ai menée avec un comité de recrutement en lien aussi avec la WorldTeam pour plus de synergie. On avait deux axes : des entrants issus soit de notre structure U19 soit d’autres structures. On a déjà opéré une campagne d’informations sous couvert de nouvelles perspectives de développement, comment on imaginait le projet auprès des agents ou des athlètes. On a essayé de faire le meilleur recrutement possible. On est vraiment satisfait de cette première promotion. Les choses se sont faites plutôt naturellement mais dans un calendrier qui n’était pas forcément facile car on était synchronisé avec l’avancement du projet WorldTour. On a décidé de partir sur dix athlètes. 

Ce qui est peu…
Nous avons l’ambition peut-être à court ou moyen terme d’augmenter ce nombre-là. On voulait déjà rester à un niveau de qualité suffisant. On a réfléchi stratégiquement sur la physionomie de notre groupe. L’évaluation de notre structure de formation ne sera pas sur le nombre d’athlètes qu’on fera passer pro, mais sur les perspectives favorables pour que nos athlètes aillent au très haut niveau. On ne veut pas être forcément sur cinq coureurs qui passent pro. 

Ce ne sera donc pas simple de passer de la Conti à la WorldTeam ?
Oui et non. Ce ne seront pas toujours des critères de résultats. Bien sûr, l’objectif de notre filière de formation alimente nos rangs WorldTour. On veut d’abord sécuriser une formation de qualité et cohérente. Plus il y a d’athlètes qui montent, plus ça voudra dire qu’on a réussi notre travail. Nos critères de sélections pour aller en WorldTour seront assez élevés. On voulait être sûr d’avoir plusieurs niveaux d’influence et plusieurs portes d’entrée dans notre filière de formation.

C’est-à-dire ?
Nous ne recruterons pas uniquement dans la Continentale des coureurs de la structure U19. Au niveau de l’équipe Continentale, ce n’est pas impossible qu’on embauche des Espoirs 2, 3 ou 4 issus d’autres structures. Nous ne serons jamais sur du 100% fermé. On part du principe qu’une équipe de développement est là pour faire révéler des profils qui seraient un peu hors cadre. On essaie de créer un environnement favorable pour que tout le monde y trouve sa place. 

« OUVRIR À LA MULTI-ACTIVITÉS »

D’où la présence de coureurs qui ne sont plus Espoirs dans la Conti ?
Un coureur comme Tom Donnenwirth est un peu hors radar… C’est un beau challenge. Sur certains marqueurs, il peut devenir un très bon pro en WorldTour. Mais il y a du chemin à parcourir pour y arriver et c’est tout l’intérêt de monter une structure de développement. Nous avons pour ambition d’ouvrir à la multi-activités. C’est largement aidé par notre partenaire technique que ce soit en cyclo-cross ou aussi sûrement un jour en VTT. On a aujourd’hui la piste avec le groupe Juniors. Il y a aussi une internationalisation de notre groupe. 

Il était important de vite attirer des coureurs étrangers ?
On ne s’est pas mis un quota ou une règle. À l’image de la U19 en 2024, c’est 50/50. Petit à petit, on va faire évoluer ce modèle dans les futurs recrutements. Notre plus gros challenge est qu’on a une rupture culturelle dans notre équipe tout en gardant notre identité. Aujourd’hui, la concurrence internationale est rude. Sur certains points, on a besoin d’aller vers un modèle anglo-saxon. Sur d’autres points, on essaie de consolider nos valeurs, garder ce sens de formation à la française. Ce sont des balances qui ne sont pas faciles. En synthèse, tout ce qui est de l’ordre du technique et de la performance, on essaie d’aller vers quelque chose de beaucoup plus international et ouvert. Le savoir-être, vivre ensemble, le management… On essaie de garder notre patte qui est attachée à l’ADN de l’équipe. Ce n’est que le début. Il y a encore beaucoup de choses à consolider. Je suis plutôt optimiste pour l’avenir de l’équipe. 

Avoir trois équipes dans la même structure, c’est un sacré challenge…
C’est un beau défi parce qu’on doit mettre en musique une stratégie sportive sur trois échelons. On écrit aujourd’hui des projets sportifs pour des athlètes qui sont chez les Juniors jusqu’à l’horizon WorldTour même si contractuellement, les choses ne sont pas forcément faites. On crée ce travail d’écriture pour s’imaginer ce que sera l’équipe WorldTour Decathlon-AG2R en 2027-2028-2029. On fait ce travail pour que le groupe soit cohérent profil par profil, poste pour poste, spécificité par spécificité. C’est vraiment intéressant. Il y a un travail des techniciens et des dirigeants pour écrire cette carte pour le futur. Il est important de se dire que la marge d’erreur est grande chez les athlètes. On mettra systématiquement l’athlète au centre du projet et on évoluera à la vitesse qu’il évolue. On veut que les coureurs, en sortant du programme, aient gagné quelque chose en venant chez nous soit du point de vue éducatif, scolaire - on encourage et on accompagne encore les jeunes à faire des études - soit du point de vue sportif. Ce n’est pas forcément mauvais de faire deux années dans la U23 même si le projet WorldTour n’est pas accessible pour eux. On essaie de s’assurer de ça. 

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